Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

Tractations entre les deux tours des élections municipales : attention aux promesses de campagne discriminatoires !

Cour de cassation, chambre criminelle, 11 mars 2014, N° 12-88313

Un nouvel élu qui, pour tenir une promesse de campagne, embauche une personne pour la récompenser de son soutien politique entre les deux tours se rend-il coupable de discrimination ?

 [1]


Oui répond la Cour de cassation qui confirme la condamnation d’un élu qui avait promis d’embaucher le proche d’un dirigeant d’une liste concurrente pour le récompenser de son soutien politique entre les deux tours, dès lors que l’offre d’emploi, même si elle était assortie d’une condition suspensive implicite tenant à l’élection du prévenu en qualité de maire, était subordonnée à une condition fondée sur l’un des éléments visés à l’article 225-1 du code pénal, en l’espèce les opinions politiques du bénéficiaire de l’embauche. Ainsi le délit de discrimination peut non seulement être caractérisé lorsqu’une candidature est écartée mais également lorsqu’une candidature est retenue pour un motif illégitime.

Entre les deux tours des élections municipales de 2008, un candidat se rapproche du chef de liste dissidente et lui propose un ralliement. Pour obtenir un accord il lui promet, en cas d’élection, d’embaucher l’un de ses proches et de lui confier une tâche de direction, "au plus près du maire, dans l’organigramme de ses services"...

Chose promise, chose due : une fois élu, le nouveau maire nomme l’intéressé
aux fonctions de directeur du développement économique et touristique. Le titulaire précédent du poste, fonctionnaire de catégorie A, est pour sa part écarté de façon discrétionnaire pour être placé sous la direction d’un agent de catégorie C !

Les élections sont annulées et l’élu poursuivi pour discrimination à l’embauche.

Il est condamné à quatre mois d’emprisonnement avec sursis, 15 000 euros d’amende et cinq ans d’inéligibilité, ce que confirme la Cour de cassation "dès lors que l’offre d’emploi critiquée, même si elle était assortie d’une condition suspensive implicite tenant à l’élection de M. X... en qualité de maire, était subordonnée à une condition fondée sur l’un des éléments visés à l’article 225-1 du code pénal, en l’espèce les opinions politiques du bénéficiaire de l’embauche".

C’est en effet en pleine connaissance de cause que l’élu "a sciemment choisi M. Z... en raison de ses opinions politiques afin de le récompenser de son engagement en sa faveur".

Cour de cassation, chambre criminelle, 11 mars 2014, N° 12-88313

[1Photo : © Paolo Omero