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Maire diffamé : la consignation doit être créditée à temps sur le compte du régisseur sous peine de nullité de la plainte

Cour de cassation, chambre criminelle, 16 avril 2013, N° 12-81027

La plainte avec constitution de partie civile d’un maire diffamé par des opposants reste-elle recevable si la consignation fixée par le juge d’instruction, bien que virée dans les temps, a été créditée sur le compte du régisseur du tribunal hors délai ?

 [1]


Non : lorsqu’elle est effectuée sous la forme, non d’un dépôt au greffe, mais d’un virement, la consignation est réputée faite à la date à laquelle le compte du régisseur d’avances et de recettes est effectivement crédité de la somme fixée par le juge d’instruction, peu important que le compte du débiteur de la consignation et celui du régisseur soient ouverts dans le même établissement. Doit être ainsi déclarée caduque la plainte déposée par un maire pour diffamation, la somme exigée par le juge d’instruction n’ayant été débitée sur le compte du régisseur du tribunal après l’expiration du délai imparti. Lorsque la mise en mouvement de l’action publique est subordonnée au dépôt d’une plainte préalable (comme c’est le cas en matière de diffamation envers un dépositaire de l’autorité publique), c’est l’ensemble de la procédure qui doit alors être annulée. En effet l’irrecevabilité de la plainte assortie de constitution de partie civile entraîne la nullité du réquisitoire introductif qui s’y réfère, ainsi que des actes subséquents.

Les opposants à une majorité municipale publient sur un blog un article intitulé "la note sera salée" dans lequel ils mettent en cause la gestion financière du maire, et évoquent des "cadeaux faits à des promoteurs".

Le maire porte plainte avec constitution de partie civile. Il s’acquitte à ce titre du montant de la consignation fixée par le juge d’instruction [2].

Oui mais voilà : si le virement du compte de la commune au Trésor public à celui du régisseur du tribunal a bien été effectué dans le délai fixé par le juge d’instruction, le compte de la régie du tribunal, ouvert pourtant dans le même établissement, n’a été crédité que le surlendemain, soit un jour trop tard !

Les opposants soulèvent en conséquence la nullité de la plainte et du réquisitoire subséquent. Ils obtiennent gain de cause :

"la consignation est devenue effective, non pas à la date d’exécution par la trésorerie de l’ordre de virement donné par le maire (...), soit le 26 octobre 2010, mais à la date à laquelle le compte de la régie du tribunal a été effectivement crédité, soit le 28 octobre 2010".

Et les juges d’en conclure que le délai fixé pour consigner ayant expiré le 27 octobre, la plainte était caduque. Par contagion, le réquisitoire introductif est lui même déclaré nul, ainsi que les actes subséquents...

La Cour de cassation approuve ce raisonnement :


 "lorsqu’elle est effectuée sous la forme, non d’un dépôt au greffe, mais d’un virement, la consignation est réputée faite à la date à laquelle le compte du régisseur d’avances et de recettes est effectivement crédité de la somme fixée par le juge d’instruction, peu important que le compte du débiteur de la consignation et celui du régisseur soient ouverts dans le même établissement" ;


 "lorsque la mise en mouvement de l’action publique est subordonnée au dépôt d’une plainte préalable, l’irrecevabilité de la plainte assortie de constitution de partie civile entraîne la nullité du réquisitoire introductif qui s’y réfère, ainsi que des actes subséquents, et que tel est le cas en matière de diffamation envers un dépositaire de l’autorité publique" ;

Cour de cassation, chambre criminelle, 16 avril 2013, N° 12-81027

[1Photo : © Peter Baxter

[2Dans le cadre d’une plainte avec constitution de partie civile, le juge d’instruction peut demander au plaignant de verser une somme d’argent, dont il fixe le montant, en garantie du paiement d’une éventuelle amende, qui serait prononcée dans le cas où la constitution de partie civile s’avérerait abusive ou dilatoire. Elle est restituée si l’enquête judiciaire confirme la bonne foi de l’auteur de la plainte.