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Noyade au cours d’une sortie : les animateurs responsables ?

Cass crim 30 janvier 2007 N° de pourvoi : 05-87617 Publié au bulletin

Ces animateurs sont-ils responsables de la noyade d’un adolescent au cours d’une sortie organisée par la commune alors que l’autopsie a identifié une pathologie cardiaque pouvant être à l’origine du décès ?

Le 18 août 2000, six adolescents encadrés par deux animateurs saisonniers employés par une commune (35 000 habitants) de la région Centre se rendent sur un site où se trouvent six plans d’eau dont l’un est ouvert à la baignade sous le contrôle d’un maître nageur. La sortie s’inscrit dans une opération dite "camion-mobile" consistant pour les animateurs à aller à la rencontre des jeunes sur la commune pour leur proposer des activités.


Les deux animateurs permanents de la commune autorisent la sortie, après l’obtention d’un ordre de mission délivré par la coordinatrice pédagogique, en rappelant aux animateurs saisonniers le strict respect des zones de baignades.

 

En dépit de ces consignes et des panneaux implantés sur les lieux, les deux animateurs saisonniers, voulant privilégier le dialogue, laissent les adolescents, qui prétendent connaître les lieux, s’aventurer dans un bassin où la baignade est interdite.


L’un d’eux, qui ne sait pas bien nager, montre rapidement des signes de fatigue, et disparaît sous la surface de l’eau après avoir appelé à l’aide. L’un des animateurs plonge à sa recherche tandis que l’autre court appeler le surveillant de baignade présent sur le plan d’eau ouvert à la baignade.

 

L’adolescent n’est retrouvé qu’au bout d’un quart d’heure, en raison de la profondeur du bassin et de l’opacité de l’eau. Il ne peut être réanimé par les services de secours. Le médecin légiste décèle un état pathologique du coeur pouvant être à l’origine de la noyade. Des poursuites pour homicide involontaire sont ouvertes contre les quatre animateurs et la coordinatrice pédagogique de la direction de l’action sociale et de la jeunesse de la commune.

 

En première instance seuls les animateurs saisonniers sont condamnés (au pénal et au civil) bien que l’enquête ait relevé leur inexpérience et leur absence de formation puisqu’aucun n’est titulaire du BAFA. La Cour d’appel (CA Orléans 22 novembre 2005 n° 2005-863) prononce pour sa part une relaxe générale : la pathologie cardiaque décelée par l’autopsie étant suffisamment grave pour provoquer la mort, la cause du décès ne peut être imputée avec certitude à la noyade. La citation délivrée à la commune est par ailleurs annulée, les magistrats constatant qu’il n’est pas précisé en quelle qualité (témoin ou civilement responsable) celle-ci est appelée à comparaître.

 

La Cour de cassation confirme ce dernier point mais censure l’arrêt sur l’absence de lien de causalité certaine entre la noyade et le décès : "l’imputabilité du dommage corporel doit être appréciée sans qu’il soit tenu compte des prédispositions de la victime dés lors que ces prédispositions n’avaient pas déjà eu des conséquences préjudiciables au moment où s’est produit le fait dommageable".


Il appartenait en conséquence à la Cour d’appel "de rechercher si, d’une part, la décompensation de la pathologie cardiaque congénitale, dont Simon X... était atteint, n’avait pas été provoquée par l’effort intense déployé par la victime, qui ne savait pas bien nager, afin de progresser dans un bassin de cinq mètres de profondeur interdit à la baignade, et, d’autre part, dans l’affirmative pour les besoins de l’action civile, si le décès n’entretenait pas un lien direct ou indirect, avec les fautes pouvant être reprochées [aux prévenus]".