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Point de départ des intérêts moratoires des demandes indemnitaires

Conseil d’Etat, 5 janvier 2011, N° 334905

Les intérêts moratoires peuvent-ils commencer à courir avant même que les juridictions administratives n’aient statué sur la responsabilité de la collectivité et sur le montant du préjudice ?

 [1]


Oui : les intérêts moratoires dus en application de l’article 1153 du code civil courent à compter du jour où la réclamation indemnitaire est parvenue à l’administration ou, à défaut de demande préalable, à la date de la saisine du juge.

Le refus d’agrément opposé par le président d’un conseil général à un couple souhaitant adopter un enfant est jugée illégal. Le département est condamné [2] à verser au couple 21 000 euros dont 10 000 euros au titre du préjudice moral de l’enfant :

"la nécessité dans laquelle cette enfant s’est trouvée de vivre, pendant deux années supplémentaires, dans le centre d’hébergement des orphelins et personnes âgées où elle avait été placée au Vietnam, dans des conditions matérielles et affectives beaucoup moins favorables que celles dont elle aurait bénéficié si elle avait été accueillie dans une famille pendant la même période, est directement imputable à la décision attaquée".

Les parents demandent au département de leur verser les intérêts légaux à compter de leur demande d’indemnisation présentée le 18 octobre 2000. Le département refuse, objectant que les intérêts légaux n’ont pu commencer à courir qu’à compter du 28 octobre 2009, date à laquelle le Conseil d’Etat a définitivement retenu le principe de la responsabilité du département et arrêté le montant du préjudice.

Le Conseil d’Etat donne raison au couple :

 "la créance détenue sur l’administration existe, en principe, à la date à laquelle se produit le fait qui en est la cause, sans qu’il soit besoin que le juge se livre au préalable à une appréciation des faits de l’espèce et en liquide le montant" ;

 "saisie d’une demande tendant au paiement de cette créance, l’administration est tenue d’y faire droit dès lors que celle-ci est fondée" ;

 ainsi, "les intérêts moratoires dus en application de l’article 1153 du code civil, lorsqu’ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue à l’administration ou, en l’absence d’une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine".

Conseil d’Etat, 5 janvier 2011, N° 334905

[1Photo : © Kristina Stasiuliene

[2Conseil d’État, 28 octobre 2009,N° 317010