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Elu intéréssé, prise illégale d’intérêts et pouvoirs du juge administratif

Conseil d’État, 27 septembre 2010, N° 320905

Pour apprécier la légalité d’une délibération d’un conseil municipal au regard de la notion de "conseiller intéressé", le juge administratif doit-il d’office vérifier si l’élu intéressé pouvait se prévaloir des dérogations prévues par le code pénal pour les communes de moins de 3501 habitants ?


 [1]


Non : le juge administratif n’est pas tenu de rechercher d’office si l’élu remplissait les conditions posées par l’article 432-12 du code pénal pour prétendre aux dérogations prévues par ce texte


Un conseil municipal (commune de 900 habitants) cède à une SCI
le rez-de-chaussée d’un immeuble et autorise le maire à signer les pièces nécessaires à la transaction.

Un habitant de la commune demande aux juridictions administratives l’annulation de l’acte en relevant que l’adjoint aux finances de la commune est associé de la SCI.

Par un arrêt du 3 juillet 2008, la cour administrative d’appel de Marseille annule la délibération dès lors que la double casquette de l’adjoint était susceptible d’exposer cet élu à l’application des dispositions de l’article 432-12 du code pénal.

La commune se pourvoit en cassation en reprochant aux juges du fond de ne pas avoir vérifié si l’élu intéressé ne pouvait pas se prévaloir des dérogations prévues par le code pénal s’agissant des communes de moins de 3501 habitants.

Le Conseil d’Etat écarte l’argument et confirme l’annulation de la délibération : "il n’appartient pas au juge du fond, pour apprécier la légalité d’une délibération au regard des dispositions de cet article, de rechercher d’office si sont applicables, au cas d’espèce qui lui est soumis, les dispositions prévues aux deuxième à quatrième alinéas de ce même article permettant aux élus d’une commune, par dérogation au principe d’interdiction de toute prise d’intérêt direct ou indirect posé par le premier alinéa et sous certaines conditions, d’acquérir un bien communal".

En tout état de cause, poursuit le Conseil d’Etat, il ressort des éléments de l’instruction que les conditions cumulatives requises pour pouvoir bénéficier de ces dérogations n’étaient pas, en l’espèce, réunies. ◆

Conseil d’État, 27 septembre 2010, N° 320905

[1Photo : © Artmann Witte