
Cour administrative d’appel de Marseille 10 novembre 2009, N°07MA03132
Un fonctionnaire s’expose-t-il à une sanction disciplinaire s’il héberge une personne avec laquelle il entretient une relation intime hors mariage ? Posée ainsi, la question parait ressurgir d’un autre âge : en quoi cela regarde-t-il l’administration ? Oui mais quand l’invitée est une prostituée, de surcroît étrangère en situation irrégulière, les choses se compliquent.
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Poursuivi pour aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d’un étranger et aide et assistance à la prostitution d’autrui, ce fonctionnaire est condamné à 18 mois de prison avec sursis.
Motifs ? Il a hébergé une prostituée en situation irrégulière à son domicile, l’a conduite à plusieurs reprises sur ses lieux de prostitution et a même recueilli l’argent des clients.
3 ans après sa condamnation, et 6 ans après les faits, son administration prononce sa mise à la retraite d’office à titre disciplinaire. Son employeur estime en effet que son comportement était contraire aux bonnes mœurs, à l’honneur et à la probité et portait gravement atteinte à la dignité et à l’autorité de sa fonction.
Prétendant avoir agi par pure compassion, le fonctionnaire exerce un recours contre cette sanction devant les juridictions administratives. Débouté en première instance, il obtient gain de cause en appel : l’administration ne pouvait s’en tenir à la seule condamnation pénale sans prendre en compte les éléments de l’enquête démontrant que le fonctionnaire a agi, comme l’attestent les témoignages de l’intéressée et de responsables d’une association de réinsertion, dans le seul but d’aider la jeune étrangère à sortir de la prostitution. Ce qu’il a d’ailleurs réussi à faire. De fait, s’il a accepté de recueillir, sans en tirer profit, les fonds provenant des passes c’est uniquement pour les soustraire à l’avidité des véritables maquereaux.
Ainsi la noblesse du mobile atténue la gravité de la faute.
Pour une analyse plus juridique, suivie de celle d’un jugement du tribunal administratif de Toulouse [2] voir Actualité juridique de la fonction publique (AJFP) Mars Avril 2010, p. 94 à 96