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Elus agressés : peines encourues aggravées, protection fonctionnelle automatisée

Dernière mise à jour le 25 mars 2024

La loi n° 2024-247 du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux a été promulguée pour tenter d’enrayer le phénomène préoccupant des agressions dont ils sont trop souvent victimes. Les peines encourues par les auteurs des agressions sont aggravées. L’octroi de la protection fonctionnelle due par la collectivité est semi-automatisée. Des points de vigilance n’ont pas nécessairement été anticipés par le législateur. Décryptage en trois points.

 

1° Durcissement des peines encourues 

1.1 Aggravation des peines en cas de violences contre les élus locaux et anciens élus

La loi aligne les peines encourues pour les violences contre les élus sur celles à l’encontre des forces de l’ordre. Jusqu’à présent les violences exercées contre les élus locaux étaient passibles de peines aggravées mais qui étaient inférieures à celles prévues pour les violences contre les forces de sécurité. L’article 222-14-5 du code pénal est complété en ce sens et vise désormais spécifiquement « le titulaire d’un mandat électif public ou, dans la limite de six ans à compter de l’expiration du mandat, l’ancien titulaire d’un mandat électif public ». 

 

Les anciens élus aussi protégés mais... 

Cette aggravation de la peine est également encourue par les auteurs de violences exercées contre l’ancien titulaire d’un mandat électif public dans la limite de six ans à compter de l’expiration du mandat. Se posera en pratique la question de la connaissance par l’auteur des faits de la qualité d’ancien élu de la victime. Il faudra en effet établir que c’est bien en cette qualité que la victime a été visée pour que la circonstance aggravante puisse être retenue. 
 
Les peines encourues sont désormais fixées à : 
  • 2 ans d’emprisonnement et 60 000 € d’amende en cas d’atteinte à l’intimité de la vie privée d’un élu, d’un candidat, ou de sa famille.  
  • 5 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende en cas de violences contre les élus ayant entrainé une incapacité inférieure ou égale à 8 jours.
  • 7 ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende (contre 5 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende avant la loi) pour les violences ayant entraîné pour l’élu une incapacité totale de travail pendant plus de 8 jours.
  • 20 ans de réclusion criminelle et 150 000 euros d’amende (il s’agit d’un crime) en cas de destruction, dégradation ou la détérioration d’un bien appartenant à une personne dépositaire de l’autorité publique ou "chargée d’une mission de service public" (ajout de la loi) visée en cette qualité par l’effet d’une substance explosive, d’un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes. 
En cas de violences contre un élu, ​​​​​​la peine complémentaire d’interdiction de séjour (qui emporte interdiction de paraître dans certains lieux déterminés par le juge, comme par exemple le territoire de la commune où a lieu l’agression) pourra également être prononcée pour une durée maximale de 5 ans (article 131-31 du code pénal). 
 

Jusqu’à 10 ans d’emprisonnement en cas de violences volontaires avec circonstances aggravantes

Les peines encourues (articles 222-14-5 et 222-12 du code pénal) sont encore plus élevées si l’une ou plusieurs des circonstances aggravantes sont réunies. C’est le cas lorsque les faits ont été commis : 

 Par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice ;

 Avec préméditation ou avec guet-apens ;

 Avec usage ou menace d’une arme ;

 Dans des établissements d’enseignement ou d’éducation ou dans les locaux de l’administration, ainsi que, lors des entrées ou sorties des élèves ou du public ou dans un temps très voisin de celles-ci, aux abords de ces établissements ou locaux ;

 Par un majeur agissant avec l’aide ou l’assistance d’un mineur ;

 Dans un moyen de transport collectif de voyageurs ou dans un lieu destiné à l’accès à un moyen de transport collectif de voyageurs ;

 Par une personne agissant en état d’ivresse manifeste ou sous l’emprise manifeste de produits stupéfiants ;

 Par une personne dissimulant volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée. 

 

 

Peines encoures ≠ peines prononcées ≠ peines exécutées

Le législateur ne peut intervenir que sur les peines encourues et non sur les peines qui seront effectivement prononcées par les magistrats. Se posera également la question de l’exécution des peines prononcées. La fermeté affichée par le législateur ne se traduira donc pas nécessairement dans les faits. Rappelons en outre que ces nouvelles peines ne pourront être prononcées que pour les faits commis postérieurement après l’entrée en vigueur de la loi du 21 mars. Toutes les affaires en cours qui ne sont pas encore définitivement jugées ne sont pas concernées par l’aggravation des peines. Seules les lois pénales plus douces sont en effet d’application immédiate aux affaires non définitivement jugées (ce que les pénalistes appellent la rétroactivité "in mitius"). 

 

♦ Le Gouvernement doit remettre au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi, un rapport recensant les actions menées pour lutter contre les violences faites aux élus et leurs résultats. Ce rapport doit dresser également le bilan des suites données aux plaintes déposées par les élus auprès des services de police ou de gendarmerie pour les faits de violences dont ils sont victimes.

 

1.2 Extension du travail d’intérêt général

En cas de diffamation publique (article 31 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) ou d’injure publique (article 32 de la loi sur la presse) contre un élu, une peine de travail d’intérêt général pourra désormais être prononcée. 
 

Gare à l’effet boomerang !

Le contentieux de la diffamation et de l’injure, oppose souvent des élus entre eux, comme le soulignent nos résumés de jurisprudence publiés dans notre rapport annuel. On ne peut donc exclure qu’un maire, par exemple, soit condamné à un travail d’intérêt général pour une diffamation ou une injure visant un élu d’opposition. Et réciproquement. Si la peine de travail d’intérêt général doit être exécutée au sein de la commune, il n’est pas acquis qu’elle soit de nature à apaiser les tensions... 
 

Pas de rallongement du délai de prescription

Le législateur avait initialement envisagé de porter à un an le délai de prescription en la matière lorsque c’est un élu qui est visé. Cette disposition a finalement été abandonnée. Le délai de prescription reste donc de trois mois et ce quelle que soit la qualité de la victime.
 
La même peine de travail d’intérêt général pourra être prononcée en cas d’outrage visant un élu (article 433-5 du code pénal).
 

1.3 Protection des candidats à une élection et de la famille des élus

L’article 223-1-1 du code pénal (créé par la loi du 24 août 2021 réprime "le fait de révéler, de diffuser ou de transmettre, par quelque moyen que ce soit, des informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d’une personne permettant de l’identifier ou de la localiser aux fins de l’exposer ou d’exposer les membres de sa famille à un risque direct d’atteinte à la personne ou aux biens"
 

Lorsque les faits sont commis au préjudice d’une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou titulaire d’un mandat électif public les peines sont portées à 5 ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende. 

 
La loi du 21 mars étend cette protection aux candidats à un mandat électif public pendant la durée de la campagne électorale.
 
Il en est aussi de même si de tels faits visent le conjoint, un ascendant ou un descendant en ligne directe ou de toute autre personne vivant habituellement au domicile de l’élu, en raison des fonctions exercées par celui-ci.
 

2° Accélération et extension de la protection fonctionnelle 

2.1 Une procédure semi-automatisée

Jusqu’à présent lorsqu’un élu était victime d’une agression, d’une injure, d’une menace... il devait saisir le conseil municipal qui devait se prononcer, hors sa présence, sur l’octroi ou non de la protection fonctionnelle.
 
Désormais la démarche est semi-automatisée selon le mécanisme suivant :
 

 

 

Une logique inversée

Jusqu’ici il fallait une délibération du conseil municipal pour que la protection soit accordée, désormais le principe est inversé : la protection est automatique sauf délibération motivée retirant la protection dans le délai de 4 mois (dans les conditions prévues aux articles L. 242-1 à L. 242-5 du code des relations entre le public et l’administration).
 
 
 
Un garde-fou est prévu si des élus souhaitent s’opposer à l’octroi de la protection fonctionnelle. En principe le maire ne peut être contraint de convoquer le conseil municipal que par le préfet ou à la demande :
- du tiers au moins des membres du conseil municipal en exercice dans les communes de 1 000 habitants et plus ;
- par la majorité des membres du conseil municipal dans les communes de moins de 1 000 habitants.
 
Désormais, lorsque le conseil municipal a été informé d’une demande de protection, le maire est tenu de convoquer le conseil municipal dans les 4 mois à la demande d’un ou plusieurs membres du conseil. Il n’est donc pas nécessaire d’avoir un quorum minimum pour obtenir la convocation du conseil municipal. Et la convocation devra être accompagnée d’une note de synthèse. 
 

Un débat pourra notamment s’ouvrir sur la nature des attaques pour savoir si l’élu a bien été visé en sa qualité d’élu et non comme simple particulier. 

 
Le dispositif est analogue pour les élus du conseil départemental ou régional. 
 

Une procédure inchangée en cas de mise en cause pénale et pour les agents

La procédure d’octroi de la protection fonctionnelle est inchangée en cas de mise en cause pénale. L’automatisation de la protection fonctionnelle ne joue que dans l’hypothèse où l’élu est victime. Lorsque l’élu est poursuivi pénalement, il faut toujours une délibération du conseil municipal à laquelle ne prend pas part l’élu intéressé. En effet, en cas de poursuites pénales, l’octroi de la protection fonctionnelle suppose que l’élu n’ait pas commis de faute personnelle. Et si le juge estime que la protection a été accordée trop largement, cela peut générer des poursuites supplémentaires pour détournement de fonds publics (lire à ce sujet "L’octroi de la protection fonctionnelle peut caractériser un détournement de fonds publics !").

 

Les agents agressés ne bénéficient pas d’un dispositif analogue. En ce qui les concerne, il faut toujours une décision de l’autorité territoriale leur accordant expressément le bénéfice de la protection. 

 

2.2 Une dépense obligatoire

L’article 6 de la loi concerne aussi bien les élus que les fonctionnaires. Il est désormais expressément prévu que les frais relatifs à la mise en œuvre de la protection des élus, comme des agents, constituent des dépenses obligatoires (article L2321-2 du code général des collectivités territoriales). Mais si les frais liés à la protection fonctionnelle constituent une dépense obligatoire pour les agents comme pour les élus, l’obligation d’assurance ne concerne que les seuls élus. 
 
En effet, depuis la loi Engagement et proximité (L. n° 2019-1461 du 27 déc. 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique), les communes ont l’obligation de s’assurer pour couvrir leurs obligations de protection à l’égard des élus. Cette nouvelle obligation d’assurance ne concerne que les communes (les EPCI, les départements et régions ne sont pas visés) pour la protection des seuls élus (les agents ne sont pas concernés). 
 

Compensations de l’Etat pour les communes de moins de 10 000 habitants

La loi Engagement et proximité a prévu un mécanisme de compensation par l’Etat. Initialement seules étaient concernées les communes de moins de 3500 habitants. Ce seuil a été porté à 10 000 habitants par la loi de finances 2024 (loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 - article 247).
 

2.3 Protection de l’Etat lorsque l’élu agit en qualité de représentant de l’Etat

L’article L. 2123-35 du CGCT est modifié pour préciser que c’est l’État qui doit accorder la protection lorsque l’élu agit en qualité d’agent de l’État :

Lorsque le maire ou un élu municipal le suppléant ou ayant reçu une délégation agit en qualité d’agent de l’État, il bénéficie, de la part de l’État, de la protection prévue aux articles L. 134-1 à L. 134-12 du code général de la fonction publique. » 
C’est notamment le cas lorsque le maire agit en qualité d’officier d’état civil ou d’officier de police judiciaire. Par exemple si un maire est agressé au cours d’une cérémonie de mariage, c’est l’Etat qui devra assurer la protection de l’élu.
 
De même si le maire est agressé lorsqu’il dresse procès-verbal comme il est habilité à le faire en sa qualité d’officier de police judiciaire ("vitesse manifestement excessive en agglomération : le maire peut dresser procès-verbal").
 
En revanche si le maire est agressé par un administré mécontent d’un arrêté municipal imposant une mesure de police, ou d’une délibération prise par le conseil municipal, c’est la commune qui devra sa protection à l’élu agressé.
 

L’élu a-t-il été visé en tant qu’élu municipal ou comme agent de l’Etat ?

Un débat pourra s’ouvrir dans certaines situations pour savoir si l’élu a été visé en tant qu’agent de l’Etat ou en sa qualité d’élu municipal. Que l’on songe par exemple à l’incendie criminel de la maison du maire de Saint-Brevin-les-Pins le 22 mars 2023 par des opposants à un centre d’accueil pour demandeurs d’asile. Ce n’est pas nécessairement en qualité d’agent de l’Etat que le domicile du maire a été visé par les auteurs, mais c’est l’Etat qui a demandé à la commune de trouver un lieu pour implanter le Cada sur le territoire. En outre lorsque les auteurs des faits ne sont pas identifiés et/ou leur mobile indéterminé, il n’est pas toujours évident de savoir en quelle qualité l’élu a été visé. Sans oublier que l’agresseur peut avoir poursuivi plusieurs mobiles. En pratique, pour ne pas retarder le déclenchement de la protection, les élus continueront sans doute à privilégier la protection de la commune sauf hypothèse flagrante où le maire a été visé en qualité de représentant de l’Etat. 
 

2.4 Prise en charge des frais d’assistance psychologique

L’étendue des frais pris en charge par la commune est précisée par l’article L2123-35 du CGCT : 
 
La protection mentionnée aux mêmes premier à cinquième alinéas implique notamment la prise en charge par la commune de tout ou partie du reste à charge ou des dépassements d’honoraires résultant des dépenses liées aux soins médicaux et à l’assistance psychologique engagées par les bénéficiaires de cette protection pour les faits mentionnés auxdits premier à cinquième alinéas.
Ainsi lorsqu’un élu est agressé dans l’exercice de ses fonctions, il ne doit lui incomber aucun reste à charge et il doit avoir droit à une assistance psychologique. L’emploi de l’adverbe notamment rappelle qu’il ne s’agit là que cette liste n’est naturellement pas limitative. 
 

La famille des élus, exclue de l’extension de la protection

En revanche, cette extension qui concerne notamment les frais d’assistance psychologique, n’inclut pas les conjoints, enfants et ascendants directs des maires (ou des élus municipaux les suppléant ou ayant reçu délégation) lorsqu’ils sont agressés en raison de leur lien de parenté avec l’élu. Les nouvelles dispositions visent en effet les cinq premiers alinéas de l’article L2123-35 du CGCT alors que la protection de la famille de l’élu est visée au 6ème alinéa. 
 

2.5 Extension de la protection aux candidats aux élections

Un nouvel article L. 52-18-1 est intégré dans le Code électoral :
 
Chaque candidat bénéficie, pendant les six mois précédant le premier jour du mois de l’élection et jusqu’au tour de l’élection auquel il participe, de la protection prévue aux articles L. 134-1 à L. 134-12 du code général de la fonction publique. Cette protection est assurée par l’Etat."
Cette extension de la protection fonctionnelle à l’ensemble des candidats aux élections induit qu’un candidat agressé, injurié, menacé, diffamé dans l’exercice de ses fonctions aura désormais droit à une protection par l’Etat.
 

Diffamation et injures entre candidats pendant la campagne électorale

Cette extension induit aussi que le contentieux abondant de la diffamation entre candidats pendant une campagne électorale pourra faire l’objet de demandes de protection à l’Etat. Et ce aussi bien pour le plaignant que pour le candidat mis en cause puisque ce sont l’ensemble des articles L134-1 à L134-12 du code général de la fonction publique qui sont visés. Or la protection fonctionnelle inclut non seulement l’hypothèse du fonctionnaire victime que celle du fonctionnaire mis en cause. Par extension il est en sera de même pour les candidats à une élection.

L’Etat pourra néanmoins décliner la protection, sous le contrôle du juge administratif, s’il estime que le candidat, par ses propos, a commis une faute personnelle détachable de ses fonctions... de candidat. Ce qui promet de beaux débats juridiques... 

 

Alors que les conseillers d’opposition ne bénéficient pas pendant leur mandat de la protection de la commune, ils pourront de fait bénéficier de la protection de l’Etat pendant la campagne électorale lorsqu’ils se sont déclarés candidats. Ce qui peut induire, par exemple, la prise en charge des frais d’une procédure ouverte contre le maire sortant qui aurait tenu à leur encontre des propos injurieux ou diffamatoires. Il n’est pas certain que le législateur, qui avait en tête le cas des candidats agressés ou menacés pendant la campagne, ait anticipé ces possibles points de friction. 

 
 

L’assurance des permanences électorales en débat 

L’article 11 de la loi crée un nouvel article L. 253-1 dans le code des assurances dans le but de faciliter l’assurance des permanences électorales qui sont parfois la cible de dégradations :
"Le titulaire d’un mandat électif ou la personne s’étant publiquement déclarée candidate à un tel mandat qui s’est vu refuser la souscription d’un contrat par au moins deux entreprises d’assurance couvrant en France les risques de dommages des biens meubles et immeubles tenant lieu de permanence électorale ou accueillant des réunions électorales peut saisir un bureau central de tarification prévu à l’article L. 212-1."
Dans l’hypothèse où un candidat a essuyé au moins deux refus pour l’assurance de sa permanence électorale, le bureau central de tarification (BCT) détermine le montant de la prime et le cas échéant de la franchise. L’entreprise d’assurance qui maintiendrait son refus de garantie s’exposerait à des sanctions, dont un retrait d’agrément. Ce qui ne manque pas d’interpeler France Assureurs qui évoque un texte inopérant dès lors que "les permanences d’élus ne sont pas soumises à une obligation d’assurance" (Loi sur la protection des élus locaux : l’alerte de France Assureurs, Argus de l’Assurance, 25 mars 2024). 
 

La loi prévoit également un remboursement des frais liés à la protection physique du candidat (ex : service de garde du corps) ou de ses biens (ex : gardiennage) à la condition que la menace soit avérée.

Les demandes doivent être adressées à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (au plus tard à 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour du scrutin), sous la forme d’un état détaillé des dépenses de sécurité accompagné des factures, des devis et des autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées par le candidat ou pour son compte. Un nouvel article L. 52-18-1 est ainsi intégré dans le code électoral :
 
Pendant la période définie à l’article L. 52-18-1, l’Etat prend à sa charge, lorsqu’elles ne sont pas exercées par un service public administratif, qu’elles ne peuvent faire l’objet d’une prise en charge au titre des dépenses de sécurité remboursées au titre de l’article L. 52-12 et qu’une menace envers un candidat est avérée, les dépenses engagées par un candidat provenant des activités qui consistent en :
« 1° La fourniture de services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles tenant lieu de permanence électorale ou accueillant des réunions électorales ainsi que la sécurité du candidat se trouvant dans ces immeubles ou dans les véhicules de transport public de personnes ;
« 2° La protection de l’intégrité physique du candidat."

Un décret doit préciser les modalités d’application de ces dispositions notamment les critères permettant de définir différents niveaux de menace dans le cadre d’un référentiel national. Il appartiendra au préfet, en fonction de chaque scrutin, d’évaluer le caractère avéré et le degré de gravité de la menace à laquelle le candidat est exposé.

 

Un rapport attendu sur l’extension de la protection fonctionnelle à tous les élus

Le Gouvernement (article 18 de la loi) devra en outre remettre au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi, un rapport sur l’opportunité d’élargir le bénéfice de la protection fonctionnelle :
1° A tous les élus locaux, y compris à ceux qui n’exercent pas de fonctions exécutives (lesquels sont pas couverts par la protection fonctionnelle en l’état du droit) ;
2° Aux conjoints, aux enfants et aux ascendants directs des conseillers départementaux et régionaux lorsque, du fait des fonctions de ces derniers, ils sont victimes de menaces, de violences, de voies de fait, d’injures, de diffamations ou d’outrages.
 

3° Prévention de la délinquance et autres dispositions

3.1 Délocalisation possible des procédures mettant en cause des élus locaux

Dans le cadre de leurs fonctions d’officiers de police judiciaire et de leur rôle dans la prévention de la délinquance, les élus sont en liens réguliers avec le procureur de la République. Ce qui peut être gênant lorsqu’ils sont mis en cause pénalement et sont poursuivis par le même procureur de la République. L’article 43 du code de procédure pénale est modifié pour étendre expressément aux maires et aux adjoints, la possibilité d’une délocalisation dans ce cas.
 

Le procureur général peut alors, d’office, sur proposition du procureur de la République et à la demande de l’intéressé, transmettre la procédure au procureur de la République auprès du tribunal judiciaire le plus proche du ressort de la cour d’appel.

 
Il s’agit plus d’une clarification que d’une extension véritable puisque l’article 43 visait déjà la "personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public qui est habituellement, de par ses fonctions ou sa mission, en relation avec les magistrats ou fonctionnaires de la juridiction" (sur ce sujet et d’autres questions de procédure voir l’article du professeur Yves Mayaud que nous avons publié à l’occasion des 30 ans de la réforme du code pénal).
 

3.2 Droits à l’information du maire 

L’article L132-3 du code de la sécurité intérieure, 3e aliéna, est modifié pour prévoir une information systématique du maire par le procureur de la République des suites judiciaires qui ont été données des infractions constatées sur le territoire de sa commune par les agents de police municipale ou par les gardes champêtres. 
 
Jusqu’à présent, le maire devait en faire la demande. Désormais l’information sera due même si le maire n’a pas formulé de demande en ce sens. 
 
Par ailleurs lorsque le maire a effectué un signalement de faits délictueux au procureur de la République au titre de l’article 40 du code de procédure pénale, le maire devra être informé dans un délai d’un mois (jusqu’à présent aucun délai n’était fixé) des suites qui ont été données (classement sans suite, mesures alternatives aux poursuites, condamnations, relaxes, voies de recours...). 
 

Protocoles d’information signé avec les associations départementales de maires

Pour fluidifier les circuits d’informations des conventions prévoyant un protocole d’information des maires sur le traitement judiciaire des infractions commises à l’encontre des élus pourront désormais être signées entre les associations représentatives des élus locaux, le préfet et le procureur de la République.
 

Communiqué de presse du procureur dans le journal municipal

Dans les communes de plus de 999 habitants, le procureur de la République pourra désormais "diffuser dans un espace réservé toute communication en lien avec les affaires de la commune" (article L2121-27-1 alinéa 2 du CGCT). Le procureur de la République pourra ainsi rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause. Cela notamment "afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public ou lorsque tout autre impératif d’intérêt public le justifie" (article 11 du code de procédure pénale). A noter que, rien ne s’oppose dans les textes, à ce que le procureur utilise cette prérogative pour communiquer dans le journal municipal sur une affaire en cours qui vise le maire ou un élu de la majorité notamment "afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ".
 
 

3.3 Conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) et (conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CISPD)

L’article 16 de la loi redéfinit la composition des Conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) :

  •  Le préfet doit désormais désigner un « agent coordinateur au sein des services de l’État afin d’assister le maire dans l’animation du CLSPD » ;
  • La composition des CLSPD est désormais fixée par les textes (article L. 132-4 du code de la sécurité intérieure). Sont membres de droit du CLSPD, outre le maire, le préfet et le procureur de la République ou leur représentant, ainsi que, le cas échéant, le président de l’EPCI « compétent en matière de dispositifs locaux de prévention de la délinquance et dont la commune est membre ». Des parlementaires, des représentants d’associations, les maires des communes limitrophes, des personnes qualifiées peuvent également être membres des CLSPD. Leur composition exacte devra désormais faire l’objet d’un arrêté du maire.
  • Le CLSPD devra se réunir au moins une fois par an en présence des membres de droit ou de leurs représentants spécialement désignés à cet effet ;
  • A la demande du maire, du préfet ou de l’autorité judiciaire, un groupe thématique chargé des violences commises à l’encontre des élus peut être constitué au sein du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance. Il peut traiter de l’organisation d’une réponse aux violences et d’une stratégie d’accompagnement des élus victimes. 

Des dispositions analogues sont prévues pour le conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance. Les maires des communes membres de l’établissement public de coopération intercommunale ou leurs représentants ne sont pas membres de droit mais doivent en faire la demande.