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Publicité et enseignes : les nouveaux pouvoirs du maire et des présidents d’EPCI

Dernière mise à jour : le 15 janvier 2024

Le nouveau régime (prévu par loi Climat et résilience du 22 août 2021) relatif au pouvoir de police de la publicité extérieure est entré en vigueur le 1er janvier 2024. Le décret d’application a été publié au journal officiel le... 31 décembre (décret n°2023-1409 du 29 décembre 2023). Décryptage.

 

 [1]

Quelle est l’autorité compétente en matière de police de la publicité extérieure ?

Pour assurer la protection du cadre de vie, le code de l’environnement fixe des règles applicables à la publicité, aux enseignes et aux préenseignes visibles de toute voie ouverte à la circulation publique (Titre VIII du cinquième livre articles L.581-1 et suivants).

 

Créé par la loi du 12 juillet 2010 dite Grenelle II, l’article L.581-14-2 du code de l’environnement définit l’autorité compétente en matière de police de la publicité.
 
Jusqu’à présent c’était l’existence ou non d’un règlement local de publicité (RLP) qui déterminait l’autorité compétente. L’existence de ce document, qui permet aux collectivités territoriales (à l’échelon communal ou intercommunal) d’adapter la réglementation nationale aux enjeux locaux, avait pour corrolaire l’attribution de compétence en matière de police : le maire était compétent si la commune avait adopté un RLP ; à défaut c’était le préfet. 
 

La loi Climat et résilience a opéré un transfert du pouvoir de police de la publicité au maire (ou président de l’intercommunalité) même en l’absence de règlement local de publicité (RPL).

 

Le nouvel article L.581-3-1 du code de l’environnement dispose que :

 
Les compétences en matière de police de la publicité sont exercées par le maire au nom de la commune ». [2]
Désormails il n’y a donc plus lieu de distinguer selon que la commune est couverte ou non par un RLP. Le maire (ou le président de l’EPCI) est compétent qu’un RLP ait été ou non adopté. Le pouvoir de substitution du préfet en cas de carence du maire est supprimé (article L.581-14-2 du code de l’environnement abrogé par l’article 17 de la loi Climat et résilience).
 

Exercer la police de la publicité sur son territoire, c’est instruire les demandes d’autorisations, contrôler le respect de la réglementation et sanctionner les contrevenants (mise en demeure, sanction administrative, signalement à la justice pénale). Concrètement cela signifie notamment que :

  •  L’installation, le remplacement ou la modification des dispositifs ou matériels qui supportent la publicité sont soumis à déclaration préalable auprès du maire seulement (article L.581-6 modifié) ;
  •  Le maire est seul compétent s’agissant des autorisations pour l’installation des dispositifs de publicité lumineuse autres que ceux qui supportent des affiches éclairées par projection ou par transparence (article L.581-9 modifié) ;
  • Le maire est compétent pour délivrer les autorisations pour les enseignes à faisceau de rayonnement laser (article L.581-18 modifié) ; 
  •  Les sanctions en cas d’infraction relèvent de la compétence du maire (articles L.581-26 et suivants du code de l’environnement).

Le saviez-vous ?

Doivent faire l’objet d’une déclaration préalable (article R 581-6 du code de l’environnement), l’installation, le remplacement ou la modification : 
  • d’un dispositif ou d’un matériel qui supporte de la publicité ;
  • de préenseignes dont les dimensions excèdent 1 mètre en hauteur ou 1,50 mètre en largeur. 
  • Le remplacement ou la modification des bâches comportant de la publicité.
 

La délibération approuvant le règlement local de publicité est publiée conformément aux dispositions des articles L.2131-1 et R.2131-1 du code général des collectivités territoriales » (article R.581-79 du code de l’environnement modifié).
 

La loi prévoit-elle un transfert automatique de ce pouvoir de police du maire au président de l’EPCI ?

Oui : les maires des communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI) compétent en matière de PLU ou de règlement local de publicité (RPL) transfèrent au président de cet EPCI leurs prérogatives en matière de police de la publicité (article L.5211-9-2 I A modifié du code général des collectivités territoriales).

 

Le transfert des pouvoirs de police au président de l’EPCI est automatique lorsque l’EPCI est compétent en matière de plan local d’urbanisme (PLU) ou de RLP. Si la compétence n’est pas exercée au niveau intercommunal, le pouvoir de police reste aux mains du maire. 

Initialement, la loi Climat et résilience avait prévu, dans les communes de moins de 3 500 habitants, un transfert des pouvoirs de police obligatoire et automatique au président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, « y compris lorsque cet établissement n’est pas compétent en matière de plan local d’urbanisme ou de règlement local de publicité » (article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales modifié). La loi de finances pour 2024 met fin à ce transfert automatique puisqu’elle supprime la phrase de l’article L.5211-9-2 du CGCT (Article 250 de la loi n°2023-1322 du 29 décembre 2023). 

 
Lorsque la compétence a été transférée au président de l’EPCI, il appartient au maire de transmettre la déclaration préalable ou la demande d’autorisation au président de l’EPCI dans la semaine qui suit le dépôt (articles R581-8-1 et R581-9-1 du code de l’environnement). 
 
Afin d’assurer la cohérence de l’exercice du pouvoir de police de la publicité, la conférence des maires prévue à l’article L. 5211-11-3 du code général des collectivités territoriales peut être réunie dans les conditions prévues par cet article (article L.581-3-1 du code de l’environnement). 
 

Les maires peuvent-ils s’opposer au transfert des pouvoirs de police au président de l’EPCI ?

 

Oui : un ou plusieurs maires peuvent s’opposer au transfert des pouvoirs de police de la publicité au président de l’EPCI, dans un délai de six mois à compter du 1er janvier  (article 17 III de la loi, article L.5211-9-2 du CGCT ).

 

Le président de cet établissement peut, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la fin de la période pendant laquelle les maires étaient susceptibles de faire valoir leur opposition, renoncer à ce que les pouvoirs de police spéciale des maires des communes membres lui soient transférés de plein droit, dans les conditions prévues au III de l’article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales.

 
Le transfert de la compétence « police de la publicité » au président de l’EPCI prendra effet :
  • soit le 1er juillet 2024 (si aucun maire n’a fait valoir son droit d’opposition) ;
  •  soit le 1er août 2024 (si un ou plusieurs maires ont fait valoir leur droit d’opposition au 1er juillet 2024 et si le président de l’EPCI ne renonce pas à l’exercice de la police de la publicité avant le 1er août 2024)  (Source : fiche du ministère de l’écologie - PDF -).
 
Comme il est d’usage en matière de transfert des pouvoirs de police, les maires auront toujours la possibilité de s’opposer à ce transfert soit dans un délai de six mois après l’élection d’un nouvel exécutif au niveau intercommunal, soit dans un délai de six mois après transfert de la compétence PLU ou de la compétence RLP à l’EPCI à fiscalité propre (III de l’article L. 5211-9-2 du CGCT). Voir "La réglementation de la publicité extérieure, enseignes et préenseignes" (site ecologie.gouv.fr
 

Le maire peut-il réglementer les publicités et enseignes lumineuses situées à l’intérieur des vitrines ?

Oui si elles sont visibles depuis la rue. Le règlement local de publicité peut ainsi contenir des prescriptions concernant les horaires d’extinction, la surface, la consommation énergétique, la prévention des nuisances lumineuses.

 
Le règlement local de publicité peut prévoir que les publicités lumineuses et les enseignes lumineuses situées à l’intérieur des vitrines ou des baies d’un local à usage commercial qui n’est pas principalement utilisé comme un support de publicité et destinées à être visibles d’une voie ouverte à la circulation publique respectent des prescriptions qu’il définit en matière d’horaires d’extinction, de surface, de consommation énergétique et de prévention des nuisances lumineuses » (nouvel article L. 581-14-4 du code de l’environnement).
 
S’agissant des publicités et enseignes lumineuses mises en place avant l’entrée en vigueur du nouveau RLP, un délai de deux ans est laissé aux commerçants pour se conformer aux prescriptions définies dans le règlement local de publicité (Article L. 581-43 du code de l’environnement modifié).
 

Quelles sanctions pour lutter contre les nuisances lumineuses ?

Le cadre législatif et règlementaire concernant la lutte contre les nuisances lumineuses est fixé aux articles L.583-1 à L.583-5 et R.583-1 à R.583-7 du code de l’environnement.

L’article L.583-5 détermine les sanctions administratives applicables :

 
 En cas d’inobservation des dispositions applicables aux installations régies par le présent chapitre ou des règlements pris pour leur application, l’autorité administrative compétente met en demeure la personne à qui incombe l’obligation d’y satisfaire dans le délai qu’elle détermine.
Si, à l’expiration de ce délai, l’intéressé n’a pas déféré à la mise en demeure, l’autorité administrative compétente suspend par arrêté le fonctionnement des sources lumineuses jusqu’à exécution des conditions imposées et prend les mesures conservatoires nécessaires, aux frais de la personne mise en demeure ».
Désormais, pour lutter contre les nuisances lumineuses, les maires peuvent également ordonner une astreinte journalière au plus égale à 200 € proportionnée aux niveaux de nuisance générée : 
L’autorité administrative compétente peut ordonner une astreinte journalière au plus égale à 200 € applicable à partir de la notification de la décision la fixant et jusqu’à satisfaction de la mise en demeure ou de la mesure ordonnée ».
« Les astreintes sont proportionnées à la gravité des manquements constatés et tiennent compte notamment de l’importance du trouble causé à l’environnement
 » (article L.583-5 du code de l’environnement).

L’article fixe toutefois un plafond puisque le « montant total des sommes résultant de l’astreinte ne peut excéder 20 000 euros ».

 
Le décret n°2023-1409 du 29 décembre 2023 modifie en outre l’article R581-15 du code de l’environnement. Ainsi la demande de l’autorisation d’installer certains dispositifs de publicité lumineuse (prévue par le troisième alinéa de l’article L. 581-9) doit comporter (outre les informations et pièces énumérées par l’article R. 581-7) :
  • l’analyse du cycle de vie du dispositif ;
  • sa visibilité depuis la voie publique la plus proche ;
  • l’indication des valeurs de luminance moyenne à ne pas dépasser telles que définies par arrêté ministériel.
L’autorisation d’installer un dispositif de publicité lumineuse [3] ou un mobilier urbain destiné à supporter de la publicité lumineuse doit prendre en compte "le cadre de vie environnant" et "la nécessité de limiter les nuisances visuelles pour l’homme et l’environnement". 
L’autorisation d’installer un dispositif de publicité lumineuse ou un mobilier urbain destiné à supporter de la publicité lumineuse est délivrée pour une durée maximale de huit ans.
 
Le décret lève l’interdiction systématique de publicité sur le mobilier urbain dans les petites agglomérations qui résultait d’une erreur rédactionnelle. Le mobilier urbain peut désormais supporter de la publicité non lumineuse dans les agglomérations de moins de 10 000 habitants ne faisant pas partie d’une unité urbaine de plus de 100 000 habitants (la référence à l’article R.581-31 au troisième alinéa de l’article R.581-42 du code de l’environnement a été supprimée). 

 

 

[1Photo : Emre Karataş sur Unsplash

[2Métropole de Lyon : la compétence est exercée par le président du conseil de la métropole Article L.3642-2 du code général des collectivités territoriales.

[3visé par le troisième alinéa de l’article L. 581-9