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Pouvoirs du maire en matière d’affichage électoral sauvage

Décret n°2020-1397 du 17 novembre 2020

Le 3 décembre 2019 était publiée au Journal Officiel la loi visant à clarifier certaines dispositions du droit électoral (loi n°2019-1269 du 2 décembre 2019). Le décret d’application de cette loi a enfin été publié au Journal Officiel du 19 novembre 2020. Ce texte apporte notamment des précisions concernant le pouvoir du maire en matière d’affichage électoral sauvage.

 [1]

Un maire peut-il retirer un affichage électoral apposé en dehors des emplacements prévus par le code électoral ?

Oui, après une mise en demeure restée infructueuse du ou des candidats en cause.

Aux termes de l’article L.51 du code électoral, il appartient à l’autorité municipale de réserver des emplacements spéciaux pour l’apposition des affiches électorales, pendant la durée de la période électorale, avec une surface égale est attribuée à chaque candidat dans chacun de ces emplacements. Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d’une élection , tout affichage relatif à l’élection est interdit en dehors de cet emplacement ou sur l’emplacement réservé aux autres candidats, ainsi qu’en dehors des panneaux d’affichage d’expression libre lorsqu’il en existe.

En cas d’affichage illégal, le maire doit mettre en demeure de procéder à l’enlèvement des affiches dans un délai imparti. A défaut d’exécution le maire peut faire procéder d’office à la dépose des affiches incriminées.

📌Jusqu’à présent, le maire (ou le préfet) pouvait s’appuyer sur l’article L.581-35 du code de l’environnement pour mettre en demeure le candidat de supprimer l’affichage et de remettre les lieux en état des lieux dans un délai de deux jours francs.

A qui doit être notifié l’arrêté de mise en demeure ?

L’arrêté de mise en demeure est adressé « au candidat, au candidat tête de liste, ou à son représentant » (article R.28-1 du code électoral dans sa rédaction issue du décret du 17 novembre 2020).

Le préfet peut-il se substituer au maire en cas d’inaction de celui-ci ?

Oui : le préfet peut adresser au maire une mise en demeure en cas d’affichage illégal sur le territoire communal. Si celle-ci reste sans effet au-delà de 48 heures, le préfet se substitue au maire pour faire retirer les affiches.

Qu’en est-il en cas d’affichage sur une propriété privée ou sur une dépendance du domaine public n’appartenant à la commune ?

Dans cette hypothèse, « l’exécution d’office est subordonnée à la demande ou à l’accord préalable du propriétaire ou du gestionnaire du domaine public  ». Une réponse ministérielle [2] souligne en effet que l’interdiction de l’affichage sauvage n’est pas limitée dans son champ d’application au domaine public et qu’il est notamment interdit d’apposer des affiches, ou des banderoles, de propagande électorale, quand bien même ce serait sur une propriété privée, notamment sur une vitrine ou une fenêtre d’un local servant de permanence électorale. A ainsi été jugée irrégulière un affichage de propagande électorale devant la permanence électorale d’un candidat [3]. De même le Conseil constitutionnel a eu à se prononcer sur le caractère irrégulier d’un affichage sur les fenêtres d’un établissement commercial. Le Conseil constitutionnel n’avait pas toutefois pas invalidé l’élection, l’affichage litigieux n’ayant duré que quelques jours, et résultant de l’initiative d’un salarié de cet établissement [4]. Dans le cadre d’un contentieux électoral, il appartiendrait en tout état de cause au juge de l’élection, saisi d’un moyen de cette nature, d’apprécier dans quelle mesure ce type d’affichage serait susceptible d’avoir altéré la sincérité du scrutin contesté devant lui.


Autres précisions issues du décret :

 
Le décret clarifie également d’autres dispositions de la loi du 2 décembre 2019.
 
A retenir notamment :
 
- L’abrogation de l’alinéa 5 de l’article R.30 du code électoral aux termes duquel les bulletins ne peuvent pas comporter d’autres noms de personne que celui du ou des candidats ou de leurs remplaçants éventuels.
En effet, cette interdiction figure, depuis la recodification opérée par la loi du 2 décembre, à l’article L.52-3 du même code. [5]
 
- Les précisions concernant les missions du mandataire relatives au financement des campagnes électorales via des plateformes de paiement en ligne :
 
Pour rappel, l’article 1er de la loi du 2 décembre 2019 a ouvert aux associations de financement électoral ou au mandataire financier la possibilité de recourir à des prestataires de services de paiement en ligne pour recueillir des dons.
 
Le décret fixe les modalités de recueil de fonds en ligne pour le financement d’une campagne électorale en détaillant précisément les missions du mandataire.
Aux termes de l’article R.39-1-1 le mandataire doit s’assurer :
 
« 1° Que la page internet de l’opération de financement comprend bien l’intégralité des mentions prévues par l’article L. 52-9 s’agissant des dons, et des mentions prévues par les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 52-7-1 s’agissant de prêts de personnes physiques ;
« 2° Que le prestataire met en place des procédures permettant d’assurer, pour la collecte de dons, le respect des dispositions prévues aux deux premiers alinéas de l’article L. 52-8 et, pour la réception de prêts de personnes physiques, le respect des dispositions des articles L. 52-7-1 et R. 39-2-1 ;
« 3° Que le prestataire lui fournit, pour chaque donateur, toutes les informations requises en application de l’article R. 39-1, concomitamment au versement des fonds sur le compte de dépôt ouvert par le mandataire, ainsi qu’une attestation sur l’origine des fonds et la qualité de personne physique du donateur ou prêteur ;
« 4° Que le montant des fonds perçus est versé intégralement et sans délai sur le compte de dépôt qu’il a ouvert. La perception éventuelle de frais par le prestataire ne peut intervenir qu’après ce versement ;
« 5° Qu’aucun remboursement n’est effectué par le prestataire sans son autorisation ;
« 6° Que lorsqu’il a recours à ce prestataire dans le cadre d’une intermédiation en financement participatif, celui-ci, outre le respect des obligations prévues du 1° au 5°, remplit les conditions pour exercer en cette qualité conformément aux articles L. 548-1 et suivants du code monétaire et financier. Dans ce cadre, l’article D. 548-1 du code monétaire et financier n’est pas applicable.
« Le contrat passé avec le prestataire de service doit figurer parmi les pièces justificatives du compte de campagne.
« Les opérations éventuelles de remboursement des donateurs sont retracées dans le compte de campagne en complément de l’annexe identifiant les donateurs. »
 
- La fixation du montant des dépenses en-deça duquel le candidat n’est pas tenu de présenter son compte de campagne :
 
Le candidat n’est pas tenu de présenter un compte de campagne s’il obtient moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas la somme de 4000 euros (montant fixé par l’article 1er du décret).

[1Photo : Jennifer Griffin sur Unsplash

[2Réponse du 27 août 2015 à la question écrite n° 15892 de M. Jean Louis Masson

[3Conseil d’Etat, 25 mars 2002, N° 236396

[4Décision n° 2012-4628 AN du 14 décembre 2012

[5« Les bulletins de vote ne peuvent pas comporter :

1° D’autres noms de personne que celui du ou des candidats ou de leurs remplaçants éventuels, à l’exception, pour la Ville de Paris et les communes de Marseille et de Lyon, du candidat désigné comme devant présider l’organe délibérant concerné par le scrutin ;

2° La photographie ou la représentation de toute personne, à l’exception de la photographie ou de la représentation du ou des candidats à l’élection concernée et, pour la Ville de Paris et les communes de Marseille et de Lyon, de la photographie ou de la représentation du candidat désigné comme devant présider l’organe délibérant concerné par le scrutin ;

3° La photographie ou la représentation d’un animal.

Les bulletins de vote peuvent comporter un emblème. »