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La jurisprudence de la semaine du 23 au 27 mars 2015

Aide sociale à l’enfance / Biens et domaines / Elections / Informatique et liberté / Laïcité / Fiscalité locale / Fonction publique / Urbanisme

(dernière mise à jour le 21/04/2015)

Aide sociale à l’enfance

 Un département est-il automatiquement responsable des faits d’attouchements sexuels commis sur une mineure par le conjoint d’une assistante familiale qui avait déjà fait l’objet d’accusations de même nature ?

Non : encore faut-il que le département ait commis une faute dans la mission de contrôle qui lui incombe. Tel n’est pas jugé le cas en l’espèce dès lors que l’assistante familiale était agréée depuis près de 30 ans et avait fait l’objet de rapports élogieux sur ses capacités professionnelles. En outre le département a été très réactif en mettant fin sur le champ au placement et en signalant aussitôt les faits au procureur de la République. La circonstance qu’une plainte avait déjà été déposée quatre ans plus tôt pour des faits similaires contre le même conjoint ne suffit pas à caractériser une faute du département, la plainte ayant été classée sans suite.

Tribunal administratif de Rennes, 26 mars 2015, N° 1201691


Biens et domaines

 Un ouvrage implanté sur le domaine public peut-il être qualifié d’ouvrage public même s’il fait l’objet d’une convention d’occupation au profit d’une personne privée pour l’exercice d’une activité sans mission de service public ?

Non : le bien ne peut recevoir la qualification d’ouvrage public que s’il est affecté à un service public. Il ne peut plus être qualifié d’ouvrage public tant qu’il n’est pas de nouveau affecté à une activité publique et ce même si, n’ayant fait l’objet d’aucune procédure de déclassement, il n’a pas cessé de relever du domaine public. Tel est est jugé le cas d’un hangar situé sur le domaine public et qu’une commune à mis à disposition d’une société pour la construction d’un catamaran. Le Conseil d’Etat approuve en outre les juges d’appel de n’avoir retenu aucune faute contre la commune dans la destruction par incendie dudit hangar, la société ne caractérisant pas l’existence de manquements de la part de la collectivité à son obligation de sécurité, à l’origine de l’incendie dont la cause demeure inconnue. De fait, la commune avait procédé d’urgence à la fermeture des portes du hangar à la suite d’une effraction constatée un mois plus tôt.

Conseil d’État, 27 mars 2015, N° 361673


Elections

 La loi du 17 juillet 1978 relative à la communication des documents administratifs s’applique-t-elle aux documents soumis au contrôle de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) ?

Oui : ces documents [1] sont dépourvus de tout caractère juridictionnel et constituent par conséquent des documents administratifs qui ne peuvent être régis, en l’absence de disposition législative particulière, que par la loi du 17 juillet 1978. Cependant le droit à communication ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu’elle est en cours d’élaboration. Ainsi ces documents sont exclus du droit à communication jusqu’à l’expiration du délai de recours contre la décision de la CNCCFP rejetant, approuvant ou réformant le compte de campagne d’un candidat ou, le cas échéant, jusqu’à l’intervention de la décision rendue par le Conseil constitutionnel sur le recours formé contre cette décision. Après cette date, il appartient à la CNCCFP, saisie d’une demande de communication de tels documents (ici de la part d’un journaliste), de rechercher si les dispositions qui leur sont applicables permettent d’y faire droit.

Conseil d’Etat, 27 mars 2015, N° 382083


Informatique et liberté

 La mise en ligne sur internet d’une base de données de jurisprudence non anonymisée peut-elle être assimilée à un traitement automatisé de données à caractère personnel au sens de la loi du 6 janvier 1978 ?

Oui. Les personnes identifiées dans les décisions de justice ont dès lors un droit d’opposition. Ce droit n’ayant pas été garanti, le Conseil d’Etat approuve la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) d’avoir enjoint à une association pour l’accès au droit, responsable d’un site internet d’information juridique comportant une base de données de jurisprudence, de cesser la mise en œuvre de ce traitement de données, et d’avoir prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 10 000 euros.

Conseil d’État, 23 mars 2015, N° 353717


Laïcité

 Un maire peut-il refuser d’exécuter un jugement lui enjoignant de retirer une croix installée à l’entrée du village au motif qu’un particulier revendique la propriété du terrain ?

Non : il appartient à la personne qui prétend être propriétaire du terrain sur lequel est implantée la croix litigieuse de former tierce opposition contre le jugement. Le maire ne peut utilement, pour établir qu’il n’est pas en mesure d’exécuter la décision de justice, se borner à invoquer une telle circonstance, dont il ne soutient pas qu’elle résulterait d’une mutation de propriété postérieure au jugement, ni à produire un arrêté d’alignement signé par lui et qui se borne à constater les limites de la voie publique. En effet, ce faisant, le maire remet nécessairement en cause le bien-fondé de la mesure d’exécution définitivement prononcée par le tribunal administratif ainsi que le motif qui en constitue le soutien nécessaire.

Conseil d’État, 23 mars 2015, N° 366813


Fiscalité locale

 L’administration peut-elle modifier chaque année les éléments concourant à la détermination de la valeur locative d’un logement devant servir de base à son imposition à la taxe foncière ?

Oui : les dispositions des articles 1517 et 1508 du code général des impôts relatives à la révision des valeurs locatives en fonction des changements pouvant affecter les propriétés bâties et des insuffisances d’évaluation résultant du défaut ou de l’inexactitude des déclarations souscrites par les contribuables, n’excluent pas, pour l’administration, le droit de modifier chaque année, si elle s’y croit fondée, les éléments concourant à la détermination de la valeur locative d’un logement devant servir de base à son imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties.

Par ailleurs la surface à retenir pour le calcul de la valeur locative servant de base à la taxe foncière sur les propriétés bâties est définie par l’article 324 M de l’annexe III au code général des impôts (CGI). Par suite, est sans incidence sur l’application de la loi fiscale la circonstance qu’au regard de la loi n° 96-1107 du 18 décembre 1996 améliorant la protection des acquéreurs de lots de copropriété (dite loi Carrez), la superficie d’un logement serait inférieure à celle calculée par application de l’article 324 M de l’annexe III à ce code.

Conseil d’État, 27 mars 2015, N° 374460


Fonction publique

 Le maire est-il lié par la date de consolidation de la blessure ou de l’état de santé d’un agent fixée par la commission de réforme à la suite d’un accident de service ?

Non : la commission de réforme se borne à émettre un avis. Le pouvoir de décision appartient à l’autorité administrative dont relève l’agent, éclairée par cet avis. Le juge de l’excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur la date de consolidation retenue par l’autorité administrative.

Conseil d’État, 27 mars 2015, N° 362407


Urbanisme

 Le maire doit-il vérifier, dans le cadre de l’instruction d’une déclaration préalable ou d’une demande de permis, la validité de l’attestation établie par le demandeur ?

Non : les autorisations d’utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s’assurer de la conformité des travaux qu’elles autorisent avec la législation et la réglementation d’urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n’appartient pas à l’autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l’instruction d’une déclaration ou d’une demande de permis, la validité de l’attestation établie par le demandeur. Les tiers ne sauraient donc utilement, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l’attestation requise, faire grief à l’administration de ne pas en avoir vérifié l’exactitude.

Par contre lorsque l’autorité saisie d’une telle déclaration ou d’une demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une instruction lui permettant de les recueillir, d’informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose d’aucun droit à la déposer, il lui revient de s’opposer à la déclaration ou de refuser la demande de permis. Ainsi un maire est fondé à s’opposer à la déclaration préalable déposée par des propriétaires en vue de l’édification d’une clôture en limite du tracé d’un chemin rural, les pétitionnaires n’ayant pas qualité, au sens de l’article R. 423-1 du code de l’urbanisme, pour déposer une déclaration préalable pour ce projet.

Conseil d’État, 23 mars 2015, N° 348261

 Un adjoint à l’urbanisme habilité par délégation à signer toutes les décisions relevant du code de l’urbanisme peut-il signer les arrêtés accordant un permis de construire qui emportent autorisation pour l’exécution des travaux conduisant à la création, l’aménagement ou la modification d’un établissement recevant du public (ERP) ?

Oui mais le permis de construire ne peut toutefois être octroyé qu’avec l’accord de l’autorité compétente pour délivrer cette autorisation. "Une délégation du maire habilitant l’un de ses adjoints à signer toutes les décisions relevant du code de l’urbanisme doit être regardée comme habilitant son titulaire à signer les arrêtés accordant un permis de construire, y compris lorsque le permis tient lieu de l’autorisation prévue par l’article L. 111-8 du code de la construction et de l’habitation pour l’exécution des travaux conduisant à la création, l’aménagement ou la modification d’un établissement recevant du public".

Conseil d’État, 27 mars 2015, N° 367896


 [2]

[1Qui justifient les écritures figurant dans le compte de campagne d’un candidat à l’élection présidentielle et permettent à la CNCCFP de s’assurer de sa régularité, sont produits ou reçus par cette autorité administrative indépendante dans le cadre de la mission de contrôle des comptes de campagne qui lui a été confiée par le législateur organique en vue de garantir l’égalité entre les candidat.

[2Photo : © Treenabeena