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La jurisprudence de la semaine du 23 juin au 27 juin 2014

Associations / Elections / Responsabilité personnelle des élus et des agents

(dernière mise à jour le 8/07/2014)

Associations

 Une crèche associative peut-elle licencier pour faute grave une salariée ayant refusé d’ôter son voile islamique en violation du règlement intérieur imposant le respect des principes de laïcité et de neutralité ?

Oui si la restriction à la liberté du salarié de manifester ses convictions religieuses est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché. Ainsi une cour d’appel a pu, appréciant de manière concrète les conditions de fonctionnement d’une association [1] de dimension réduite, employant seulement dix-huit salariés, qui étaient ou pouvaient être en relation directe avec les enfants et leurs parents, juger que la restriction à la liberté de manifester sa religion édictée par le règlement intérieur [2] ne présentait pas un caractère général, mais était suffisamment précise, justifiée par la nature des tâches accomplies par les salariés de l’association et proportionnée au but recherché. Le licenciement pour faute grave de l’intéressée était justifié par son refus d’accéder aux demandes licites de son employeur de s’abstenir de porter son voile et par les insubordinations répétées et caractérisées décrites dans la lettre de licenciement et rendant impossible la poursuite du contrat de travail.

Cour de cassation, Assemblée plénière, 25 juin 2014, N° 13-28369

Contentieux et procédure

 Toute atteinte au principe d’impartialité d’un magistrat de chambre régionale des comptes entraîne-t-elle automatiquement l’irrégularité de la composition de la chambre appelée à statuer sur la gestion de fait imputée à un élu ?

Non. Ainsi le cumul, par un même magistrat de chambre régionale des comptes, des fonctions de rapporteur de la procédure administrative de vérification de la gestion d’un organisme aboutissant à un rapport d’observations se prononçant sur la présomption d’une gestion de fait et transmis, à ce titre, au ministère public près la chambre régionale des comptes à fins de poursuites, d’une part, et des fonctions de juge appelé à se prononcer sur la même gestion de fait, d’autre part, constitue une méconnaissance du principe d’impartialité. Pour autant, en l’espèce, le magistrat de la chambre régionale des comptes ne s’étant pas prononcé, dans le cadre de ses fonctions de rapporteur de la procédure administrative de vérification de la gestion de la collectivité concernée, sur la gestion de fait dont la formation de jugement à laquelle il a ensuite appartenu était saisie, aucune irrégularité dans la composition de la chambre régionale de comptes n’est établie.

Conseil d’État, 25 juin 2014, N° 356725

Elections

 La désignation des bureaux centralisateurs des nouveaux cantons emportent-ils transfert du siège des chefs-lieux de canton ?

Non : "en désignant les bureaux centralisateurs des nouveaux cantons, les décrets portant délimitation des cantons d’un département n’ont ni pour objet ni pour effet de procéder au transfert du siège des chefs-lieux de canton". Ainsi une commune, chef-lieu de canton, n’est pas fondée à demander l’annulation d’un décret désignant une autre commune comme bureau centralisateur du canton, une telle désignation ne lui faisant pas perdre sa qualité de chef-lieu de canton et les dotations qui y sont attachées.

Conseil d’État, 23 juin 2014, N° 375929

Responsabilité personnelle des élus et des agents

 Une gestion de fait peut-elle être caractérisée lorsqu’une collectivité confie la gestion des prestations d’action sociale dont bénéficient les agents à une association ?

Oui si le juge dispose d’un faisceau d’indices laissant présumer que ladite association a peu d’autonomie par rapport à la collectivité (notamment compte-tenu de son mode de financement et de la prépondérance d’élus ou d’agents aux postes clés de l’association). En effet l’association sera alors considérée comme « transparente », ce qui induit que les subventions consenties par la collectivité restent des deniers publics bien qu’elles soient rentrées dans la patrimoine de l’association. Les élus et les fonctionnaires impliqués dans la gestion de l’association peuvent ainsi être déclarés comptables de fait car ils ont manié des deniers publics sans avoir la qualité de comptable public et en violation du principe de séparation des ordonnateurs et des comptables...

Ainsi en l’espèce le maire de la commune, la présidente, et le trésorier de l’amicale du personnel sont déclarés solidairement comptables de fait dès lors que « la présidente de l’association, dont le siège était à la mairie, n’avait pas d’autonomie hiérarchique à l’égard des élus » et que le maire était, de par sa position, à même de faire cesser les irrégularités, en ne mandatant pas la subvention. Peu importe que les dispositions de l’article 9 de la loi 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, autorisent les collectivités à confier la gestion de tout ou partie des prestations d’action sociale dont bénéficient les agents à une association régie par la loi du 1er juillet 1901 et à y être représentées dans les instances.

Conseil d’État, 25 juin 2014, N° 356725


 [3]

[1Baby-Loup.

[2Lequel disposait que « le principe de la liberté de conscience et de religion de chacun des membres du personnel ne peut faire obstacle au respect des principes de laïcité et de neutralité qui s’appliquent dans l’exercice de l’ensemble des activités développées, tant dans les locaux de la crèche ou ses annexes qu’en accompagnement extérieur des enfants confiés à la crèche ».

[3Photo : © Treenabeena