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Promenade sur le littoral : attention aux vagues !

Tribunal administratif de Pau, 27 mars 2024 : n°2103300

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Les maires des communes du littoral doivent-ils signaler le danger d’être emporté par une vague en se promenant simplement sur la plage ?

 
 
Oui si la plage est connue pour être exposée à des rouleaux de bord. Il incombe en effet au maire de prendre des mesures appropriées en vue d’assurer la sécurité des baigneurs et des promeneurs sur les plages qui font l’objet d’une fréquentation régulière et importante, et notamment de signaler les dangers qui excèdent ceux contre lesquels les intéressés doivent normalement se prémunir.
En l’espèce, une mère et ses deux enfants , ont été happés par une vague en se promenant sur une plage des communes des Landes. L’un des enfants, âgé de six ans est malheureusement décédé.
La responsabilité de la commune est écartée dès lors que le danger résultant de l’existence de rouleaux de bord et de risques de submersion, ainsi que de baïnes et de courants violents était signalé par un panneau d’information suffisamment visible. Le panneau mentionnait également les numéros d’appel des services de secours.
Cette information était suffisante pour rappeler le caractère dangereux du site, en particulier le danger que représentent certaines vagues à proximité du rivage.
La signalisation des risques était visible pour les promeneurs qui souhaitaient accéder à la plage (panneau de grande taille positionné en hauteur et situé au niveau de l’unique accès à la plage), et alors même qu’il était orienté perpendiculairement à la plage.
Le maire n’a donc pas commis de faute au titre de son pouvoir de police spéciale des baignades (article L.2213-23 du code général des collectivités territoriales).
 
En mai 2020 une mère et ses deux enfants sont emportés par une vague (rouleau de bord) alors qu’ils se promenaient sur la plage d’une commune des Landes. L’un des enfants âgé de 6 ans est décédé.
 
La famille reproche au maire une faute dans l’exercice de son pouvoir de police spéciale prévu à l’article L.2213-23 du code général des collectivités territoriales.
 
Elle soutient que le maire n’a pas pris les mesures appropriées pour informer de la nature exacte du danger d’être emporté par une vague au cours d’une simple promenade sur la plage, sans pratique de la baignade. Elle estime également que la visibilité du panneau d’information était insuffisante.
 
Les parents de l’enfant réclament une somme de 150 000 € chacun en réparation du préjudice moral ainsi que la réparation du préjudice matériel correspondant aux frais d’obsèques. La requête indemnitaire porte également sur le préjudice moral subi par la grand-mère et les deux frères à hauteur de 100 000 euros chacun.


Les obligations du maire

 
Pour assurer la sécurité des lieux de baignades et des plages, le maire dispose d’un pouvoir de police spéciale en vertu de l’article L.2213-23 du CGCT.

Cette police s’exerce en mer jusqu’à une limite fixée à 300 mètres à compter de la limite des eaux. Ce pouvoir de police concerne les baignades et des activités nautiques pratiquées à partir du rivage avec des engins de plage et des engins non immatriculés.

Au titre de ce pouvoir, le maire :
  •  réglemente l’utilisation des aménagements réalisés pour la pratique de ces activités ;
  •  pourvoit d’urgence à toutes les mesures d’assistance et de secours ;
  •  délimite une ou plusieurs zones surveillées dans les parties du littoral présentant une garantie suffisante pour la sécurité des baignades et des activités nautiques ;
  •  détermine des périodes de surveillance ;
  •  informe le public par une publicité appropriée, en mairie et sur les lieux où elles se pratiquent, des conditions dans lesquelles les baignades et les activités nautiques sont réglementées.

« Hors des zones et des périodes ainsi définies, les baignades et activités nautiques sont pratiquées aux risques et périls des intéressés » dispose l’article L.2213-23 du CGCT.

Mais, il incombe également au maire de signaler les dangers qui excèdent ceux contre lesquels les intéressés doivent normalement se prémunir y compris dans les zones de baignades non surveillées.
 
 

Une information suffisante du danger

Le juge relève la présence d’un panneau d’information installé au niveau de l’unique accès à la plage.
 
Ce panneau :
  • portait la mention « baignade interdite » et « plage non surveillée » ; 
  •  signalait également l’existence de rouleaux de bord et de risques de submersion, ainsi que de baïnes et de courants violents ;
  •  et mentionnait les numéros d’appel des services de secours.
Ce panneau était suffisamment visible par les promeneurs se rendant à la plage dit le juge en s’appuyant sur les caractéristiques du panneau : « panneau de taille importante et positionné en hauteur ».
 
Peu importe qu’il fût « orienté en direction du sud, perpendiculairement à la plage, en vue de lui offrir une moindre prise au vent, et non en direction de l’aire de stationnement public et du centre-bourg de la commune, situés à l’est ».
 
Et le juge de conclure que :
 
 cette signalisation constituait une information suffisante sur la nature du danger et le rappel du caractère dangereux du site, en particulier sur le danger que représentent certaines vagues à proximité du rivage, à l’attention des promeneurs qui souhaitaient accéder à la plage ».
 
La requête est rejetée, l’information donnée aux promeneurs était suffisante et visible. 
 
 

* Merci aux éditions Lexis Nexis de nous avoir autorisés à publier le jugement téléchargé sur Lexis360 intelligence (disponible sur abonnement)