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OGM : les bons voeux du conseil général

Conseil d’État , 30 décembre 2009, N° 308514

Un conseil général peut-il exprimer son opposition aux essais et cultures en plein champ de plantes génétiquement modifiées sur le territoire départemental ?


 [1]

Le conseil général du Gers exprime, dans une délibération, son opposition aux essais et cultures en plein champ de plantes génétiquement modifiées sur le territoire départemental. Il invite à cet égard les maires à faire usage de leurs pouvoirs de police pour interdire de tels essais et cultures en les assurant de son soutien en cas d’ actions contentieuses.

Estimant que le département a ainsi outrepassé ses attributions, le préfet défère l’arrêté devant les juridictions administratives.

Le tribunal administratif donne raison au préfet et annule l’arrêté, ce que confirme la cour administrative d’appel de Bordeaux : le conseil général a délibéré sur un objet étranger à ses attributions dès lors que les textes en vigueur confient à l’Etat seul un pouvoir de police spéciale en ce qui concerne les organismes génétiquement modifiés et aux maires un pouvoir de police générale.

Le Conseil d’Etat [2] annule l’arrêt sur le visa de l’article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales [3] :

 « sur le fondement de cet article, il est loisible aux conseils généraux de prendre des délibérations qui se bornent à des voeux, des prises de position ou des déclarations d’intention » ;

 « de telles délibérations peuvent porter sur des objets à caractère politique et sur des objets qui relèvent de la compétence d’autres personnes publiques, dès lors qu’ils présentent un intérêt départemental ».

Evoquant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat rappelle que « la délibération par laquelle l’organe délibérant d’une collectivité territoriale émet un voeu ne constitue pas un acte faisant grief et n’est donc pas susceptible de faire l’objet d’un recours devant le juge de l’excès de pouvoir même en raison de prétendus vices propres ». Sauf si la loi en dispose autrement « comme c’est le cas lorsque, sur le fondement de l’article L. 3132-1 du code général des collectivités territoriales, le préfet défère au tribunal administratif les actes qu’il estime contraire à l’ordre public ou à la légalité ». Le déféré préfectoral est à ce titre recevable.

Mais poursuit le Conseil d’Etat, c’est à tort que le tribunal administratif s’est fondé, pour annuler la délibération, sur le motif tiré de ce qu’il avait délibéré sur une matière étrangère à ses attributions. En effet « comme le soutient le département du Gers, dans lequel l’activité agricole est significative, la délibération déférée (...) porte sur un objet d’intérêt départemental ».

Par ailleurs, « eu égard à la portée d’un simple voeu, il ne peut en tout état de cause être utilement soutenu que la délibération déférée méconnaîtrait le principe de liberté du commerce et de l’industrie, qu’elle conduirait à instaurer une tutelle du département sur d’autres collectivités publiques ou encore qu’elle aurait dû être motivée ».

[1Photo : © James Thew

[2Conseil d’État , 30 décembre 2009, N° 308514

[3Aux termes duquel « le conseil général règle par ses délibérations les affaires du département. Il statue sur tous les objets sur lesquels il est appelé à délibérer par les lois et règlements et, généralement, sur tous les objets d’intérêt départemental dont il est saisi. (...)  »