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Sécurité des immeubles collectifs : ce que change le décret sur le diagnostic structurel

Dernière mise à jour le 8 octobre 2025

Issu de la loi du 9 avril 2024, dite « Loi Habitat dégradé », le diagnostic structurel des immeubles collectifs d’habitation répond à une série d’événements tragiques survenus ces dernières années, notamment les effondrements d’immeubles à Marseille (2018) et à Lille (2022). Ce dispositif vise à anticiper les risques liés à la solidité des bâtiments et à la sécurité des occupants, en évaluant leur état structurel. 

La loi confère aux collectivités l’initiative nécessaire pour faciliter l’action des élus locaux, longtemps démunis pour intervenir dans certains secteurs. Elle vise à offrir aux communes une meilleure connaissance du bâti afin de détecter les fragilités et agir en amont.
Le décret du 12 août 2025 précise les modalités concrètes de mise en œuvre de ce mécanisme préventif.

 

Quels sont les secteurs et les bâtiments concernés par le diagnostic structurel ?


Les communes peuvent délimiter des secteurs géographiques à risque où le diagnostic devient obligatoire pour les immeubles d’habitation collectifs (article L.126-6-1 du Code de la construction et de l’habitation).

La démarche est à l’initiative de la commune, qui doit justifier la création de ces secteurs par la présence d’habitat dégradé ou ancien sur son territoire.

 

 ✔ Une délibération du conseil municipal 


Une délibération motivée du conseil municipal délimite les périmètres des secteurs dans lesquels tout bâtiment d’habitation collectif doit faire l’objet d’un diagnostic structurel (article R. 126-43-1 du CCH).
 
 
 
Les secteurs ne peuvent être créés que dans les zones suivantes :
  •  Les zones présentant une proportion importante d’habitat dégradé ; 
  •  Les zones concentrant un habitat ancien susceptible de fragilités structurelles (époque de construction, caractéristiques techniques, matériaux, état des sols)..
 
 
Lorsque la commune est couverte par un plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI), la délibération du conseil municipal est transmise au président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent. Cette transmission vise à coordonner l’action communale avec l’échelle intercommunale, l’EPCI devant ensuite intégrer ces secteurs dans le PLUi.
 

✔ Annexes aux documents d’urbanisme


Les périmètres des secteurs concernés sont indiqués sur un ou plusieurs documents graphiques annexés au plan local d’urbanisme, au document d’urbanisme en tenant lieu ou à la carte communale. 

Le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent annexe les périmètres des secteurs dans un délai de 3 mois (article R. 126-43-1 du CCH). 
 

Cette annexion assure la publicité de la mesure : les secteurs à risque deviennent visibles par tous dans les documents d’urbanisme, ce qui informe les propriétaires, les professionnels de l’aménagement et les habitants


✔ Immeubles concernés

Sont soumis à un diagnostic structurel tous les bâtiments d’habitation collectifs situés dans les secteurs désignés par la commune dès lors qu’ils ont été réceptionnés depuis plus de 15 ans. La date retenue pour apprécier ce délai est celle de la réception des travaux de construction du bâtiment.
 
La notion de « bâtiment d’habitation collectif » est définie à l’article L.111-1 6° du Code de la construction et de l’habitation. Il s’agit d’ « un bâtiment à usage principal d’habitation regroupant plus de deux logements partiellement ou totalement superposés ». Il faut donc au moins trois appartements et au moins un étage. 


✔ Cas des copropriétés :

Pour les immeubles à destination totale ou partielle d’habitation soumis au statut de la copropriété, l’obligation de réaliser un diagnostic structurel de l’immeuble est satisfaite par l’élaboration du projet de plan pluriannuel de travaux (PPPT) [1] mentionné à l’article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

Le professionnel ayant élaboré le projet de plan pluriannuel de travaux doit répondre aux mêmes exigences de compétence et garantie que l’auteur d’un diagnostic structurel (L.126-6-1 du CCH).

Lorsque ce projet de plan pluriannuel de travaux (PPPT) permet de satisfaire à l’obligation de réaliser le diagnostic structurel, il doit être transmis dans un délai de 18 mois à compter soit de la notification de la délibération du conseil municipal soit de la date la plus tardive de son affichage (R.126-43-3 du CCH). Les copropriétés qui ne transmettent pas dans ce délai de 18 mois le PPPT en mairie, s’exposent aux mêmes mesures coercitives qu’en l’absence de diagnostic.
 

Comment informer les propriétaires ?


La délibération du conseil municipal est notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception aux propriétaires des bâtiments situés dans les périmètres délimités par la commune ou aux syndics représentant les syndicats des copropriétaires de ces bâtiments (article R. 126-43-2 du CCH). Cette notification individualisée par courrier recommandé vise à s’assurer que chaque propriétaire ou syndic prenne formellement connaissance de l’obligation nouvelle concernant son immeuble.
 
À défaut, elle est affichée en mairie (ou en arrondissement à Paris, Marseille, Lyon) et sur la façade du bâtiment.
 
Le syndic de copropriété est tenu de notifier aux copropriétaires cette délibération dans les conditions prévues par l’article 42-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. L’article 42-1 de la loi de 1965 impose au syndic d’informer tous les copropriétaires, généralement par une notification envoyée dans les mêmes formes (recommandé) ou via la convocation d’assemblée générale, afin que chaque copropriétaire soit au courant de l’obligation de diagnostic pesant sur l’immeuble.
 

Quel est le contenu du diagnostic ?


Le diagnostic inclut une description des désordres observés qui portent atteinte à sa solidité et évalue les risques qu’ils présentent pour la sécurité des occupants et celle des tiers. Le diagnostic porte exclusivement sur la structure du bâtiment (fondations, murs porteurs, planchers…), et non sur des aspects secondaires comme l’isolation ou la conformité électrique. Cela le distingue des autres diagnostics immobiliers connus.
 
 

La personne réalisant le diagnostic structurel effectue une inspection visuelle extérieure et intérieure du bâtiment. En complément de son inspection visuelle, le diagnostiqueur pourra préconiser des examens plus poussés si nécessaire (voir ci-dessous les investigations complémentaires). Le rapport est établi sous format numérique.

Afin d’établir son diagnostic, le diagnostiqueur doit recevoir les documents suivants (lorsqu’ils existent) :
  •  Historique des travaux (descriptifs, factures, plans, PV d’AG, carnet d’entretien) ;
  • Diagnostics immobiliers et études techniques ;
  • Arrêtés de péril ou de mise en sécurité des 10 dernières années ;
  • Projet de PPPT, si non conforme aux exigences légales.
Le contenu du diagnostic structurel est précisé par l’article R. 126-43-10 du CCH. En résumé, le rapport de diagnostic structurel comprendra :
  • l’identité et les assurances du professionnel ;
  •  la localisation et l’implantation du bâtiment ;
  • la liste des désordres structurels constatés ;
  • les derniers travaux et l’analyse de leur impact.
  • et si nécessaire des préconisations : examens techniques complémentaires, mesures d’urgence (ex. étaiement, évacuation partielle) et travaux à court ou moyen terme, priorisés selon l’urgence.
 

L’arrêté du 22 août 2025 définit le modèle de rapport de diagnostic structurel qui devra être utilisé par les professionnels qui interviennent sur des bâtiments d’habitation collectifs situés dans les secteurs géographiques prioritaires définis par délibération du conseil municipal. Ce modèle standardisé de rapport a été mis en place pour harmoniser les pratiques. Il détaille la trame du rapport (par ex. parties obligatoires, rubriques à couvrir) et assure que tous les diagnostics comportent les mêmes rubriques essentielles.

 

Compétences et indépendance du diagnostiqueur

Le diagnostiqueur peut être une personne physique, morale ou un groupement doté de la personnalité juridique. Il doit justifier de compétences telles que définies par les articles R.126-43-4 à R.126-43-7 du CCH. Ce professionnel est tenu de souscrire une assurance de responsabilité civile professionnelle. 
L’article R.126-43-8 précise que le diagnostiqueur est tenu de fournir au propriétaire ou au syndic ou à la commune lorsqu’elle le fait réaliser d’office :
  •  Les documents justifiant ses compétences, ou celles de ses employés ou des membres du groupement qui interviennent, prévus par l’article R. 126-43-5 ; 
  •  Une attestation d’assurance de responsabilité civile professionnelle répondant aux conditions fixées par l’article R. 126-43-6 . 
  •  Une attestation sur l’honneur de son impartialité et de son indépendance à l’égard du propriétaire ou du syndic de copropriété et des entreprises intervenant sur l’immeuble sur lequel porte le diagnostic structurel, destinée à être adressée à la commune avec le rapport.
 

Quel délai pour la transmission du rapport à la commune ?


✔ Un délai de 18 mois

Le propriétaire ou le syndicat des copropriétaires transmet le rapport à la commune au plus tard dix-huit mois à compter de la notification de la délibération du conseil municipal ou de la date la plus tardive de l’affichage.


✔ Pouvoirs du maire en cas de non-transmission du diagnostic ou du projet de plan pluriannuel de travaux en faisant office 

  • Le maire peut intervenir dans le cadre de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles. Il peut demander au propriétaire ou au syndic de le lui produire. 
 Réforme de la police de l’habitat : les nouveaux pouvoirs du maire : depuis le 1er janvier 2021, le maire dispose de nouvelles prérogatives en cas de risques pour la sécurité des occupants des logements.
  • Réalisation d’office du diagnostic par le maire : le propriétaire ou le syndic dispose d’un délai d’un mois à compter de la notification de la demande pour produire le diagnostic. A défaut de transmission, le maire peut faire réaliser d’office le diagnostic en lieu et place du propriétaire ou du syndicat des copropriétaires et à ses frais (article L.126-6-1 du CCH). Dans ce cas les frais engagés par la commune sont recouvrés comme en matière de contributions directes à son profit (article R.126-43-11 du CCH). Cela signifie que la commune pourra recouvrer les frais du diagnostic comme s’il s’agissait d’un impôt local dû par le propriétaire. Par exemple, la somme pourra être inscrite sur le rôle des impôts fonciers du propriétaire, garantissant son paiement prioritaire. 
 
L’effondrement d’un immeuble peut engager la responsabilité pénale du maire dès lors qu’alerté sur la dangerosité du bâtiment, il n’a pas exercé ses pouvoirs de police relatifs aux immeubles menaçant ruine. Il a été jugé que les négligences des propriétaires qui n’ont pas correctement entretenu leur bien n’exonèrent pas l’élu de ses propres responsabilités : en n’engageant pas de procédure de péril, l’élu a en effet commis une faute qui exposait les riverains à un danger qu’il ne pouvait ignorer. Le maire est reconnu coupable de blessures involontaires, faute pour lui d’avoir pris un arrêté de péril alors qu’il avait été alerté du mauvais état de l’immeuble (Tribunal correctionnel de Valenciennes, 15 avril 2015, n° 875/20140). 
 

Le tribunal correctionnel de Marseille (Tribunal correctionnel de Marseille 7 juillet 2025) a pour sa part condamné un ancien adjoint au maire pour homicides involontaires, après l’effondrement de deux immeubles vétustes ayant causé la mort de huit personnes.

Il lui était reproché, en sa qualité d’adjoint en charge du logement insalubre, de ne pas avoir mis en œuvre une politique de prévention suffisante face aux risques liés aux immeubles en péril. Le tribunal a souligné l’absence de mobilisation et de mesures concrètes, malgré les alertes récurrentes sur l’état du bâti. Il a cependant retenu que les fautes commises ne sont pas détachables de ses fonctions.
Le tribunal a prononcé une peine de deux ans d’emprisonnement avec sursis, une interdiction d’exercer une fonction publique pendant cinq ans, ainsi qu’une amende de 8 700 €. Dans le même dossier :
  • L’architecte ayant autorisé la réintégration des habitants a été condamné à deux ans de d’emprisonnement avec sursis et à une interdiction définitive d’exercer ;
  • Trois copropriétaires ont été condamnés à des peines allant jusqu’à quatre ans de d’emprisonnement, dont deux ans ferme sous bracelet électronique ; 
  • Le syndic de copropriété a été condamné à 100 000 € d’amende ;
  • Le bailleur social propriétaire de l’un des immeubles et ses dirigeants ont été relaxés, faute de lien de causalité établi.
Plusieurs parties civiles, le parquet et des prévenus ont relevé appel du jugement.
 

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Quelle est la durée de validité du diagnostic ?


La durée de validité du diagnostic est de 10 ans. En effet, l’article L.126-6-1 du CCH précise que tout bâtiment d’habitation collectif doit faire l’objet au moins une fois tous les 10 ans d’un diagnostic structurel du bâtiment.
 
Cette périodicité décennale inscrit le diagnostic dans une logique de suivi régulier : tous les 10 ans, un contrôle structurel de l’immeuble sera à renouveler, un peu à la manière d’un contrôle technique automobile mais à l’échelle du bâtiment. Cela permet de suivre le vieillissement de l’immeuble dans le temps et de détecter de nouveaux désordres éventuels.
 

 

 

[1Le PPPT est un document obligatoire pour les copropriétés depuis la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, qui planifie les travaux à réaliser sur 10 ans.