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Protection fonctionnelle vs protection personnelle : êtes-vous incollable ?

Dernière mise à jour le 22 mai 2025

Connaissez-vous les différences fondamentales entre protection fonctionnelle (à la charge de la collectivité) et assurance personnelle (à votre charge) ? Testez vos connaissances avec notre quiz en 5 questions-réponses pour devenir incollable dans le domaine de la protection des élus et des agents !

 

 

1. Le fait d’accorder la protection fonctionnelle à un élu ou à un agent poursuivi pour prise illégale d’intérêts peut constituer un délit de détournement de fonds publics 

VRAI !

La chambre criminelle de la Cour de cassation (Cour de cassation, chambre criminelle, 8 mars 2023, n° 22-82.229) s’est prononcée en ce sens s’agissant d’un élu poursuivi pour prise illégale d’intérêts et qui avait bénéficié de la protection de sa collectivité. Il avait bien pris soin de ne pas participer à la délibération. Mais la Cour de cassation pose le principe que des poursuites pour prise illégale d’intérêts ne peuvent ouvrir droit à la protection fonctionnelle même si l’élu reste présumé innocent : «  les infractions de prise illégale d’intérêts sont détachables des mandats et fonctions publics exercés par leur auteur ».
 

En l’accordant, l’autorité territoriale peut se rendre coupable de détournement de fonds publics, et le bénéficiaire de la protection être poursuivi pour recel. La Cour de cassation en avait jugé de même en 2012 pour le délit de favoritisme. 

 

Autant dire qu’il ne faut pas prendre les décisions d’octroi de la protection fonctionnelle à la légère ! L’élu ou le fonctionnaire poursuivi doit alors se défendre par ses propres moyens (d’où l’intérêt renforcé de souscrire une assurance personnelle). 

 
Le contrat Sécurité Elus, souscrit sur vos deniers personnels, vous couvre dans l’exercice de votre mandat notamment lorsque la protection fonctionnelle ne peut vous être accordée.

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2. Un conseiller municipal sans délégation peut obtenir le bénéfice de la protection fonctionnelle 

FAUX !

En l’état actuel des textes seuls les élus titulaires d’une délégation (maires, adjoints et conseillers délégués) peuvent obtenir le bénéfice de la protection fonctionnelle. Le Conseil constitutionnel (Décision n° 2024-1107 QPC du 11 octobre 2024), saisi d’une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) n’a rien trouvé à redire dès lors que les titulaires de fonctions exécutives ne sont pas placés dans la même situation que les autres conseillers. En attendant une éventuelle intervention législative, les conseillers sans délégation, ne peuvent donc pas bénéficier de la protection fonctionnelle et doivent assumer eux-mêmes les frais engendrés par la procédure. Il leur est donc fortement recommandé de souscrire une assurance personnelle. 
 
 

3. Une mise en cause pénale peut intervenir longtemps après l’expiration du mandat 

VRAI !

Compte-tenu des règles relatives à la prescription, un élu peut effectivement engager sa responsabilité bien après la fin de son mandat. La prescription de l’action publique en matière délictuelle est de six ans (et même 12 ans dans certains cas si l’infraction est considérée comme occulte ou dissimulée). En matière criminelle la prescription de droit commun est de 20 ans. Par exemple le faux en écriture publique commis par un agent public est un crime (au sens juridique du terme) passible de 15 ans de réclusion criminelle et de 225 000 euros d’amende (article 441- 4, alinéa 3, du Code pénal). 
 

Mais il faut également prendre en compte le point de départ de la prescription. Ainsi en matière d’homicide et blessures involontaires, le point de départ de la prescription n’est pas le jour où l’élu prend une décision, mais le jour où cette décision a des conséquences dommageables lesquelles peuvent survenir bien après l’expiration de son mandat. Ainsi dans le drame des inondations de Vaison-la-Romaine en 1993 c’est le préfet qui avait été mis en examen car c’est lui qui, avant les lois de décentralisation, avait délivré les permis de construire litigieux en... 1965. Il était à la retraite depuis longtemps, lorsque sa responsabilité a été recherchée. 

 

La protection fonctionnelle doit alors être accordée à l’élu sous réserve qu’il n’ait pas commis de faute personnelle détachable. Le Code général des collectivités territoriales étend en effet la protection aux exécutifs locaux ayant cessé leurs fonctions (article L2123-34 du Code général des collectivités territoriales). 

 

Si la protection fonctionnelle n’est pas accordée par la majorité en place, l’ancien élu pourra mobiliser son contrat d’assurance personnelle sous réserve qu’il soit toujours dans la période de couverture. Pour faciliter cette prise en charge post-mandat, SMACL Assurances a fait le choix dans son contrat Sécurité élus d’opter pour une garantie avec une base "fait dommageable" : dès lors que l’élu était assuré au moment du fait générateur, il est couvert quelle que soit la date de la réclamation. D’autres assureurs préfèrent opter pour des contrats avec une "base réclamation" : l’élu n’est couvert que si au moment de la réclamation il était toujours assuré (avec un mécanisme de garantie subséquente qui doit être au minimum de 5 ans après l’expiration du contrat). Ce qui signifie, dans ce ce dernier cas, que l’élu n’est plus couvert si la mise en cause intervient plus de 5 ans après l’expiration du mandat. 

La protection fonctionnelle couvre les attaques dont vous êtes victimes dans l’exercice de vos fonctions (outrage, agression, menace, diffamation etc.) ou lorsque vous êtes mis en cause pénalement sans avoir commis de faute personnelle. Le contrat PROMUT souscrit par la collectivité couvre la protection fonctionnelle des élus et des agents. 

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4. Un élu placé en garde à vue lors d’une enquête préliminaire peut bénéficier de la protection fonctionnelle 

FAUX !

En l’état actuel du droit (article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales), les élus locaux ne peuvent bénéficier de la protection fonctionnelle qu’en cas de “poursuites pénales” sans plus de précisions. L’article L. 134-4 du code général de la fonction publique se montre beaucoup plus avantageux pour les fonctionnaires. Il dispose en effet que les agents publics bénéficient d’une protection fonctionnelle lorsqu’ils font l’objet de poursuites pénales ainsi que lorsqu’ils sont entendus en qualité de témoins assistés, placés en garde à vue ou se voient proposer une mesure de composition pénale. Les élus locaux sont donc moins bien protégés que les fonctionnaires territoriaux.
 

En effet, la protection fonctionnelle ne peut leur être accordée que s’ils sont mis en examen ou cités devant une juridiction répressive. Ce qui exclut de facto les actes intervenant au cours de l’enquête préliminaire, comme une garde à vue, ou au cours de l’instruction, comme lorsqu’ils sont entendus comme témoins assistés. Or, de l’avis unanime des avocats, les actes accomplis pendant l’enquête préliminaire sont déterminants pour la suite de la procédure. L’assistance d’un avocat est donc fortement recommandée. Mais il ne peut être pris en charge par la collectivité au titre de la protection fonctionnelle, alors que pour les agents publics, c’est possible depuis la loi du 20 avril 2016.

 

Saisi d’une QPC, le Conseil constitutionnel (Décision n° 2024-1106 QPC du 11 octobre 2024) a jugé cette différenciation conforme à la Constitution dès lors que les fonctionnaires ne se trouvent pas dans la même situation que les élus chargés d’administrer la commune, au regard notamment de la nature de leurs missions et des conditions d’exercice de leurs fonctions : “compte tenu de cette différence de situation, le législateur n’était donc pas tenu de les soumettre aux mêmes règles de protection fonctionnelle.” 

 

A charge pour le législateur d’étendre la protection fonctionnelle bénéficiant aux élus municipaux à d’autres actes de la procédure pénale. Dans l’attente d’une éventuelle intervention législative en ce sens, les élus locaux ont tout intérêt à souscrire une assurance personnelle qui les couvre dans l’exerce de leur mandat. La prime étant payée sur leurs deniers personnels, ils n’ont pas besoin de l’autorisation de la collectivité pour obtenir le déclenchement de la garantie. 

 
 

5. Un élu ou un fonctionnaire dont la responsabilité financière est recherchée devant la Cour des comptes peut obtenir le bénéfice de la protection fonctionnelle 

FAUX !

Pas en l’état actuel des textes. En effet la collectivité publique doit accorder une protection à

ceux de ses agents qui font l’objet de poursuites pénales à raison de faits qui n’ont pas le caractère d’une faute personnelle détachable de l’exercice de leurs fonctions. Or les amendes infligées par la Cour des comptes n’ont pas le caractère d’une sanction pénale a rappelé le Conseil d’Etat (CE, 29 janvier 2025 n° 497840).

 

Là encore dans l’attente d’une éventuelle intervention législative étendant le bénéfice de la protection fonctionnelle à ces situations, les élus ou les fonctionnaires dont la responsabilité financière est recherchée ne peuvent que faire jouer leur contrat d’assurance personnelle pour la prise en charge des honoraires d’avocat.

 

Attention : l’amende reste toujours à la charge de la personne condamnée et ne peut en aucun cas (disposition d’ordre public) être prise en charge par l’assureur ou par la collectivité.