Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative
Image générée par l’IA

Chute d’une passante lors d’une promenade nocturne : l’absence d’éclairage public en question

Cour administrative d’appel de Bordeaux, 20 février 2025, N° 22BX02461

Image générée par l’IA

Le défaut d’éclairage public peut-il engager la responsabilité de la commune en cas de chute nocturne d’un piéton ?

 
Oui, si l’endroit présente un danger particulier. En l’espèce, le juge administratif retient la responsabilité d’une commune après l’accident d’une passante qui se promenait de nuit et qui est tombée dans une ravine en contrebas d’un pont non protégé sur les côtés et non éclairé. Le juge souligne que "l’absence de barrière le long du radier, associée à l’absence d’éclairage public, caractérise ainsi un défaut d’entretien normal". Peu importe qu’il n’y ait pas eu de témoins de la chute, le lien de causalité entre l’ouvrage public et les blessures étant établi par la configuration des lieux. Pour autant, la victime, qui connaissait les lieux et leur dangerosité, aurait dû être plus prudente alors qu’il faisait nuit. La commune est donc exonérée pour deux tiers des conséquences de l’accident.
 

Une passante fait une chute dans une ravine alors qu’elle se promenait de nuit sur un pont submersible d’une commune réunionnaise. Elle demande réparation de son préjudice à la commune, invoquant un défaut d’entretien normal de l’ouvrage public et l’absence d’éclairage public.
La cour administrative d’appel de Bordeaux retient la responsabilité de la commune. Le juge administratif considère en premier lieu que l’absence de témoins ne constitue pas, en l’espèce, un élément de nature à écarter le lien de causalité entre les blessures et l’ouvrage public : 

 

lors même que la chute n’a pas eu de témoin, il y a lieu d’admettre que Mme D..., qui se trouvait immobilisée par ses blessures dans la ravine lorsqu’elle a été secourue, y est tombée alors qu’elle circulait sur le trottoir aménagé sur le radier, de sorte que le lien de causalité entre cet ouvrage public et le dommage peut être regardé comme établi .

L’absence d’éclairage d’un ouvrage dangereux caractérise un défaut d’entretien

La cour administrative d’appel poursuit son raisonnement en soulignant le caractère dangereux de l’ouvrage, accentué par l’absence d’éclairage : 
 
les photographies versées au dossier font apparaître que le trottoir bordant la rue de la République présente comme seule délimitation de petits plots en béton, espacés et non visibles de nuit, ce qui les rend d’ailleurs dangereux. L’absence de barrière le long du radier associée à l’absence d’éclairage public caractérise ainsi un défaut d’entretien normal.
L’absence d’éclairage public est donc considérée comme un élément d’appréciation permettant au juge de conclure à un défaut d’entretien normal de l’ouvrage public, qui présente un danger particulier (lire sur ce point notre dossier "Extinction de l’éclairage public : quelles responsabilités pour les collectivités en cas d’accident ?"). 
 

Une faute d’imprudence de la victime 

Pour autant, la victime connaissait les lieux, et les radiers sont courants à La Réunion, constituant un danger potentiel bien connu des habitants. Il appartenait donc à la victime de faire preuve de prudence en cheminant de nuit sur le trottoir :
 
Toutefois, il résulte de l’instruction qu’à La Réunion, les radiers constituent un danger potentiel bien connu des habitants, et que Mme D..., domiciliée à proximité du lieu de sa chute, connaissait parfaitement les lieux. Il lui appartenait donc de faire preuve d’une particulière prudence en cheminant de nuit sur la partie du trottoir surplombant la ravine.
La commune est donc exonérée de responsabilité pour deux tiers.