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Autorisation d’occupation temporaire (AOT) du domaine public : la gratuité désormais possible pour toutes les associations

Dernière mise à jour le 23 mai 2024

La loi n° 2024-344 du 15 avril 2024 a pour objectif de soutenir l’engagement bénévole et de simplifier la gestion associative. Elle introduit notamment une mesure permettant aux collectivités territoriales d’octroyer des autorisations temporaires d’utilisation du domaine public sans paiement de redevance, indépendamment de l’objet de l’association concernée.

Le principe

En principe toute occupation privative du domaine public suppose le paiement d’une redevance :
 
Toute occupation ou utilisation du domaine public d’une personne publique mentionnée à l’article L. 1 donne lieu au paiement d’une redevance sauf lorsque l’occupation ou l’utilisation concerne l’installation par l’Etat des équipements visant à améliorer la sécurité routière ou nécessaires à la liquidation et au constat des irrégularités de paiement de toute taxe perçue au titre de l’usage du domaine public routier (Article L2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques)
La non-perception de la redevance peut en outre caractériser le délit de concussion (article 432-10 du code pénal) passible de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 000 €. 
 
Les associations, qui disposent d’une autorisation pour occuper le domaine public, doivent donc en principe s’acquitter du paiement d’une redevance dont le montant, fût-il symbolique, doit être fixé par le conseil municipal. 
 

Les dérogations 

Le législateur a cependant prévu plusieurs dérogations dont deux concernent les associations. L’une est générale et propre à certaines associations, l’autre est plus spécifique et s’applique aux acteurs publics ou privés qui participent au développement de la nature en ville [1]  : 
  • l’autorisation d’occupation ou d’utilisation du domaine public peut être délivrée gratuitement aux associations à but non lucratif qui concourent à la satisfaction d’un intérêt général (article L2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques) ;
  • l’organe délibérant de la commune peut décider par délibération de délivrer à titre gratuit les autorisations d’occupation temporaire du domaine public communal, lorsqu’elles sont sollicitées au bénéfice de personnes morales de droit public ou de personnes privées qui participent au développement de la nature en ville et répondent à un objectif d’intérêt public en installant et entretenant des dispositifs de végétalisation (article L2125-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques). 
 

La nouveauté

La loi du 15 avril 2024 étend désormais la possibilité de gratuité à toutes les associations, quel que soit leur objet. Un nouvel article L. 2125-1-2 est à cet effet intégré dans le code général de la propriété des personnes publiques :
 
Art. L. 2125-1-2. - Par dérogation aux articles L. 2125-1 et L. 2125-1-1, l’organe délibérant de la commune peut décider de délivrer à titre gratuit les autorisations d’occupation temporaire du domaine public communal sollicitées par une association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou inscrite au registre des associations en application du code civil local applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. »
Il n’est donc plus nécessaire de se demander si l’association contribue à la satisfaction de l’intérêt général pour pouvoir lui accorder la gratuité d’occupation du domaine public.
 
Pour autant, il ne s’agit pour la collectivité que d’une faculté et non d’une obligation. Les collectivités restent bien entendu libres de demander le paiement d’une redevance.
 

Attention aux discriminations

Il est crucial de veiller au respect du principe d’égalité de traitement entre les associations pour prévenir toute forme de discrimination. Par exemple, le refus d’attribuer un créneau pour l’utilisation d’une salle à une association handisport a été considéré comme abusif. La municipalité invoquait un risque de dommages au revêtement causé par les fauteuils. Sauf que le gymnase accueillait déjà divers événements tout au long de l’année, y compris des activités non sportives comme des bals, la fête du village ou le marché de Noël. Les photos fournies par l’association démontraient que lors de ces événements, des tables et chaises avec des pieds en métal étaient installées, et que la circulation de personnes en chaussures de ville, de poussettes ou de fauteuils roulants était autorisée. Ces éléments contredisent l’affirmation de la municipalité, qui plus est non appuyée par un règlement intérieur, selon laquelle le terrain nécessitait une protection spéciale et un accès limité et conditionnel (Cour administrative d’appel de Bordeaux, 15 juillet 2016, N° 14BX03314). 
 

Pas de droit acquis au renouvellement

Les titulaires d’autorisations ou de conventions d’occupation temporaire du domaine public ne disposent pas de droit acquis au renouvellement de leur titre. Il appartient au gestionnaire du domaine d’examiner chaque demande de renouvellement en appréciant les garanties qu’elle présente pour la meilleure utilisation possible du domaine public. Pour autant une collectivité ne peut refuser le renouvellement du bail qu’en invoquant, sous le contrôle du juge, un motif d’intérêt général. Pour déterminer si un tel motif existe, il y a lieu, de tenir compte, le cas échéant, parmi l’ensemble des éléments d’appréciation, des contraintes particulières qui pèsent sur l’activité de l’occupant, notamment de celles qui peuvent résulter du principe de continuité du service public. Le Conseil d’Etat (Conseil d’État, 25 janvier 2017, N° 395314) a ainsi jugé qu’une commune ne disposait pas d’un motif d’intérêt général justifiant le refus du renouvellement du bail d’un immeuble du domaine public à une association départementale des pupilles de l’enseignement public pour les besoins d’un centre éducatif renforcé accueillant des jeunes gens relevant de la protection judiciaire de la jeunesse.

 

[1D’autres dérogations sont prévues par le législateur : 

"Par dérogation aux dispositions de l’alinéa précédent, l’autorisation d’occupation ou d’utilisation du domaine public peut être délivrée gratuitement :

1° Soit lorsque l’occupation ou l’utilisation est la condition naturelle et forcée de l’exécution de travaux ou de la présence d’un ouvrage, intéressant un service public qui bénéficie gratuitement à tous ;

2° Soit lorsque l’occupation ou l’utilisation contribue directement à assurer la conservation du domaine public lui-même ;

3° Soit lorsque l’occupation ou l’utilisation contribue directement à assurer l’exercice des missions des services de l’Etat chargés de la paix, de la sécurité et de l’ordre publics ou du contrôle aux frontières dans les aéroports, les ports et les gares ;

4° Soit lorsque l’occupation ou l’utilisation permet l’exécution de travaux relatifs à une infrastructure de transport public ferroviaire ou guidé.

5° Soit lorsque l’occupation ou l’utilisation est soumise au paiement de redevances sous la forme de baux ou de licences consentis à titre onéreux autorisant l’exercice de pêche professionnelle ainsi que la navigation, l’amarrage et le stationnement des embarcations utilisées pour cette activité.

En outre, l’autorisation d’occupation ou d’utilisation du domaine public peut être délivrée gratuitement aux associations à but non lucratif qui concourent à la satisfaction d’un intérêt général.

Lorsque l’occupation du domaine public est autorisée par un contrat de la commande publique ou qu’un titre d’occupation est nécessaire à l’exécution d’un tel contrat, les modalités de détermination du montant de la redevance mentionnée au premier alinéa sont fonction de l’économie générale du contrat. Lorsque ce contrat s’exécute au seul profit de la personne publique, l’autorisation peut être délivrée gratuitement."