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La jurisprudence de la semaine

Semaine du 12 au 16 octobre 2009

Retrouvez une sélection de décisions de justice intéressant les collectivités locales et les associations (dernière mise à jour le 27/01/2010).


 [1]

Jurisprudence judiciaire

 Hygiène et sécurité au travail - Groupement d’entreprises à l’occasion de l’attribution d’un marché public - Accident du travail - Personne morale responsable

"En cas d’accident du travail, les infractions en matière d’hygiène et de sécurité des travailleurs commises par le délégataire de pouvoirs désigné par chacune des sociétés constituant un groupement d’entreprises à l’occasion de l’attribution d’un marché engagent la responsabilité pénale de la seule personne morale, membre du groupement, qui est l’employeur de la victime".

Cour de cassation, chambre criminelle, 13 octobre 2009, N° de pourvoi : 09-80857


 Lorsqu’une décision de relaxe est annulée sur le seul pourvoi de la partie civile, la juridiction de renvoi peut-elle prononcer une peine ?

Non. « Lorsqu’une décision de relaxe est annulée sur le seul pourvoi de la partie civile, la juridiction de renvoi ne peut prononcer une peine, la décision ayant acquis force de chose jugée en ce qui concerne l’action publique ». Une cour d’appel ne peut ainsi statuer à nouveau sur l’action publique dès lors que la relaxe d’un élu poursuivi pour dénonciation calomnieuse est définitive.

Cour de cassation, chambre criminelle, 13 octobre 2009, N° 09-80369


 Le contrôle d’alcoolémie est-il automatiquement vicié en cas de non-respect du délai d’attente de trente minutes entre l’absorption d’un produit et la mesure de contrôle ?

Non. Il appartient à l’automobiliste de rapporter la preuve du préjudice subi pour rendre irrégulière l’opération de dépistage.

Cour de cassation, chambre criminelle, 13 octobre 2009, N° 09-82015


 L’origine privée d’un conflit opposant deux fonctionnaires exclut-elle toute poursuite possible pour harcèlement moral ?

Non dès lors que sont imputés des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte au droit et à la dignité, d’altérer la santé physique ou mentale ou de compromettre l’avenir professionnel de la victime. Se rend ainsi coupable de harcèlement moral, le fonctionnaire territorial qui, après avoir eu une relation intime avec une collègue de travail, lui téléphone plusieurs fois par jour pendant l’été suivant la rupture, la rabaisse systématiquement au travail, la poursuit en voiture après une dispute sur le lieu de travail, casse la clé de contact du véhicule de la victime dans le barillet de contact après l’avoir rattrapée et immobilisée et la menace avec un couteau. Poursuivi également pour menaces et dénonciation calomnieuse le fonctionnaire est condamné à deux ans d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve.

Cour de cassation, chambre criminelle, 14 octobre 2009, N° 09-80429


Jurisprudence administrative

 Retrait d’une décision illégale créatrice de droits

Sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l’administration ne peut retirer une décision individuelle créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision.

Une décision administrative explicite accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l’administration avait l’obligation de refuser cet avantage.

En revanche, n’ont pas cet effet les mesures qui se bornent à procéder à la liquidation de la créance née d’une décision prise antérieurement. Le maintien indu du versement d’un avantage financier à un agent public, alors même que le bénéficiaire a informé l’ordonnateur qu’il ne remplit plus les conditions de l’octroi de cet avantage, n’a pas le caractère d’une décision accordant un avantage financier et constitue une simple erreur de liquidation. Il appartient à l’administration de corriger cette erreur et de réclamer le reversement des sommes payées à tort, sans que l’agent intéressé puisse se prévaloir de droits acquis à l’encontre d’une telle demande de reversement.

Constitue ainsi une erreur de liquidation le fait pour une administration, régulièrement informée du changement de situation familiale d’un agent [2], de continuer à lui verser une indemnité au taux correspondant à trois enfants à charges. Il appartient à l’administration de corriger cette erreur et de demander à l’intéressé le recouvrement des sommes indûment payées.

Conseil d’État, 12 octobre 2009, N° 310300


 Fonction publique - Protection fonctionnelle

Ne constitue pas un refus de protection, le fait pour l’administration d’affirmer comprendre l’émotion d’un agent qui a été invectivé et de lui assurer qu’il serait fait part aux auteurs des invectives du caractère regrettable des incidents en cause. En agissant de la sorte, l’administration a pris, compte tenu des circonstances de l’espèce, une mesure de protection appropriée aux attaques dont l’agent a fait l’objet.

Conseil d’État, 12 octobre 2009, N° 321444


 Collaborateur bénévole de service public - Sauvetage en mer - Collaborateur déjà indemnisé au titre la législation sur les accidents du travail

Est un collaborateur bénévole de service public, l’agent qui prend personnellement part à une mission de service public de sauvetage, dont un C.R.O.S.S. [3] assure la coordination pour le compte de l’Etat. Il a en effet ainsi volontairement accepté, en raison de l’urgente nécessité de l’intervention, de porter secours à une personne blessée en dehors du cadre des missions qui lui étaient normalement confiées en vertu de son contrat de travail et de prendre les risques inhérents à une telle opération.

"Le collaborateur occasionnel du service public, par ailleurs titulaire d’un contrat de travail, lorsqu’il est victime à l’occasion de sa collaboration d’un accident susceptible d’ouvrir droit à réparation en application du régime de couverture des risques professionnels dont il bénéficie, a droit, et le cas échéant ses ayants cause, à être indemnisé, par la collectivité publique ayant bénéficié de son concours, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d’agrément ainsi que du préjudice économique résultant de l’accident, dans la mesure où ces préjudices n’ont pas été réparés par son employeur ou par son régime de couverture des risques professionnels".

Conseil d’État, 12 octobre 2009, N° 297075


 La présence de panneaux, à chaque extrémité et à chaque carrefour signalant la présence de gravillons sur une portion de chaussée en cours de réfection, est-elle suffisante ?

Non dès lors que le chantier comporte plusieurs zones de travaux réparties sur plusieurs km. Chacune de ces zones doit faire l’objet d’une signalisation particulière. Une signalisation à chaque extrémité du chantier et à chaque carrefour est en effet, en raison de son trop grand éloignement du danger, insuffisante pour prévenir les risques encourus. Le département ne peut pas s’exonérer de toute responsabilité en invoquant une faute de l’entreprise chargée de l’exécution des travaux.

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 13 octobre 2009, N° 08BX02408


 Violences urbaines - Responsabilité de l’Etat

La circonstance que l’incendie d’un hangar d’un lycée agricole se soit déroulé au cours du dernier trimestre de l’année 2005 durant lequel des violences urbaines ont pu être commises en attroupements dans certaines communes et que l’état d’urgence avait été déclaré le 8 novembre 2005 "n’établit pas à elle seule que les agissements à l’origine des dommages en cause présentent le caractère d’attroupement ou de rassemblement au sens de l’article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales".

Cour Administrative d’Appel de Nantes, 13 octobre 2009, N° 09NT00184


 Urbanisme - Permis de construire - Personne justifiant d’un titre l’habilitant à construire sur le terrain

Il résulte des dispositions de l’ancien article R. 421-1-1 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction alors applicable, que "lorsqu’une demande de permis de construire est présentée par plusieurs personnes, chacune de ces personnes doit justifier d’un titre l’habilitant à construire". Ainsi "un permis accordé conjointement à plusieurs personnes dont l’une ne justifie pas d’un tel titre est illégal en tant qu’il est délivré à cette personne".

Depuis le 1 octobre 2007,le nouvel article R423-1 du code de l’urbanisme ne fait plus référence à la notion de "personne justifiant d’un titre l’habilitant à construire sur le terrain" mais à celle de "personnes attestant être autorisées par [Le ou les propriétaires] à exécuter les travaux".

Conseil d’État, 14 octobre 2009, N° 297727


 Association transparente - Incidences sur la qualité de véritable employeur

Constitue une association transparente, une association créée à l’initiative d’une commune qui en contrôle l’organisation et le fonctionnement et qui lui procure l’essentiel de ses ressources. Il en résulte notamment [1] que la commune doit être considérée comme le véritable employeur du personnel de l’association. Ainsi un agent, initialement recruté par une telle association avant d’être titularisé au sein de la commune sur des fonctions identiques, peut revendiquer la prise en compte de ses missions exercées au sein de cette structure associative pour le calcul de son ancienneté.

Conseil d’État, 14 octobre 2009, N° 299554


 Fonction publique - Indemnités - Astreintes

"Les organes délibérants des collectivités territoriales pouvaient, avant l’édiction du décret du 19 mai 2005 (...) [4] fixer par délibération un régime de rémunération ou de compensation des astreintes et permanences par référence au régime applicable aux fonctionnaires de l’Etat en vertu des équivalences établies par le décret du 6 septembre 1991,(...) [5], et dans la limite de leur montant".

Commet ainsi un erreur de droit, le tribunal administratif qui juge qu’un agent ne peut prétendre au versement d’une indemnité d’astreinte pour la journée du 6 juin 2004 au motif qu’à cette date, aucune base légale ne permettait au conseil municipal d’instaurer une telle indemnité.

Conseil d’État, 14 octobre 2009, N° 300835


 Contrôle budgétaire - Rapport de la Cour des comptes - possibilité pour une commune de demander des rectifications

Une commune demandait l’annulation de la décision par laquelle laquelle le premier président de la Cour des comptes avait rejeté sa demande de rectification de certaines mentions relatives à la gestion financière de la commune. Le Conseil d’Etat rejette cette demande :

1° "Lorsque la Cour des comptes insère dans son rapport public annuel des observations relatives à la gestion d’une collectivité territoriale, elle doit recueillir et publier la réponse de la collectivité territoriale intéressée et celle du ministre, lesquelles n’engagent cependant que leurs auteurs" ;

2° "s’il est vrai que la collectivité territoriale n’est pas en mesure de faire valoir d’éventuelles remarques sur la réponse du ministre, la Cour ne saurait, sauf dans le cas où elle serait tenue de retirer une mention dont la publication est interdite par la loi, procéder à une modification quelconque dans le texte des réponses qu’elle a publiées".

Conseil d’État, 14 octobre 2009, N° 309047


 Décentralisation - Transferts de personnels

"Une autorité administrative est tenue de se conformer aux dispositions réglementaires légalement édictées qui fixent les règles de forme et de procédure selon lesquelles elle doit exercer ses compétences ; (...) ces dispositions s’imposent à elle tant qu’elles sont en vigueur et alors même que cette autorité en serait l’auteur ou qu’elles émaneraient d’une autorité qui lui est subordonnée ; (...) une décision à caractère réglementaire ou individuel prise en méconnaissance de ces règles est en principe illégale".

L’arrêté du ministre de l’agriculture et de la pêche du 25 juillet 2007 [6] est annulé dès lors que le décret [sur le fondement duquel l’arrêté attaqué a été pris (décret du 23 décembre 2006 pris en application des dispositions précitées du VII de l’article 104 de la loi du 13 août 2004 pour fixer les modalités du transfert définitif de services ou parties de services de l’Etat dans le domaine de l’enseignement agricole)]] a été adopté sans consultation préalable des commissions tripartites locales.

Pour autant une annulation rétroactive des dispositions de l’arrêté attaqué porterait une atteinte manifestement excessive à la sécurité juridique des collectivités territoriales et des personnels concernés. Aussi les pouvoirs publics ont jusqu’au 1er mars 2010 pour prendre l’ensemble des mesures nécessaires pour que soient légalement mises en oeuvre les dispositions du VII de l’article 104 de la loi du 13 août 2004.

Conseil d’État, 14 octobre 2009, N° 310594


 Fonction publique - Indemnité - notion d’emploi permanent

"L’existence, ou l’absence, du caractère permanent d’un emploi doit s’apprécier au regard de la nature du besoin auquel répond cet emploi et ne saurait résulter de la seule durée pendant laquelle il est occupé". Commet ainsi une erreur de droit, le tribunal qui, pour dénier à un agent le droit de percevoir une indemnité réservée aux agents non-titulaires affectés sur des emplois permanents, relève que l’intéressé a été recruté sur son emploi par des contrats mensuels dont la durée cumulée n’a pas excédé six mois pour chacune des années en litige, et qui ne sont pas succédés de manière ininterrompue.

Conseil d’État, 14 octobre 2009, n° 314722


 Protection fonctionnelle

Un agent, victime de la diffusion d’un tract largement diffusé qui met gravement en cause son comportement, a droit à la protection fonctionnelle de son administration dès lors que cette dernière n’invoque aucun motif d’intérêt général ou d’une faute personnelle de la requérante pour justifier son refus.

L’administration ne peut se contenter, en pareilles circonstances, de demander à l’instance disciplinaire de résoudre le litige.

Conseil d’État, 14 octobre 2009, N° 315956


 Dépassement téméraire sur une zone de travaux - mauvais éclairage de l’ilot directionnel en construction - faute de la victime

Un département est jugé responsable de l’accident survenu à un motocycliste dès lors que la zone de travaux où se situait l’îlot directionnel en construction était mal éclairée et se trouvait dans la pénombre, tant en raison de l’insuffisance de l’éclairage public, dont l’un des lampadaires était défaillant, que de l’absence de dispositif réfléchissant sur le terre-plein en chantier. Cette situation révèle en effet un défaut d’entretien normal de la voie publique de nature à engager la responsabilité du département.

Cependant, la victime qui connaissait les lieux [7] et qui avait pu apprécier l’insuffisance de l’éclairage lors de son arrêt au feu alternatif, a commis une imprudence en entreprenant de dépasser, dans la zone des travaux, les véhicules la précédant. Cette faute de la victime est de nature à atténuer la responsabilité du département à hauteur des deux tiers des conséquences dommageables de l’accident.

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 15 octobre 2009, N° 08BX01254


 Une commune engage-t-elle sa responsabilité pour ne pas avoir pris les mesures de police nécessaires pour réduire les nuisances sonores d’une station de lavage automatique ?

Non dès lors que les bruits perturbateurs dus au fonctionnement de la station de lavage restent en deçà des seuils réglementaires de présomption de gêne.

Cour Administrative d’Appel de Marseille, 15 octobre 2009, N° 07MA04675


 Occupation du domaine public - égalité de traitement des commerçants

Il appartient au maire [8] de subordonner les autorisations temporaires d’occupation du domaine public aux conditions exigées par l’intérêt général de l’aménagement du domaine et de la circulation.

Ainsi pour assurer notamment la commodité de circulation des piétons et l’accès des véhicules de secours à l’axe concerné, un maire peut légalement déterminer des conditions d’attribution de permis de stationnement différentes pour les commerçants sédentaires et limiter, pour certains, le droit d’étaler leurs marchandises sur cette portion du domaine public.

Si la vente à l’étalage sur la voie publique de végétaux et de denrées périssables, pour la plupart d’entre elles de première nécessité, résulte d’usages constants, il n’en va pas de même du commerce des articles d’équipement de la maison et de la personne qui sont proposés à la vente dans des locaux commerciaux prévus à cet effet. Dans ces conditions, un maire peut, sans porter une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l’industrie, imposer aux commerces d’équipement de la personne et de la maison des mesures d’installation de leurs étalages sur la voie publique plus restrictives que celles imposées aux autres commerces sédentaires.

Cour Administrative d’Appel de Versailles, 15 octobre 2009, N° 08VE01365


 Urbanisme - ZAC - Modification

Une modification du règlement de plan d’aménagement de zone qui entraîne un accroissement, au regard des objectifs initiaux, du nombre de logements n’a pas nécessairement pour effet de bouleverser l’équilibre de l’ensemble de l’opération d’aménagement. Tel n’étant pas le cas en l’espèce, le conseil municipal n’était pas tenu de modifier, au préalable, les objectifs de la zone d’aménagement concerté.

Cour Administrative d’Appel de Versailles, 15 octobre 2009, N° 08VE00751


 Urbanisme - Plan de remembrement - affichage en mairie

Il résulte des dispositions de l’article R. 121-29 du code rural qu’à l’expiration du délai de quinze jours suivant l’affichage en mairie du plan définitif de remembrement, les transferts de propriété prévus par le plan sont effectifs. Le juge des référés ne peut donc plus en ordonner postérieurement la suspension.

Conseil d’État, 16 octobre 2009, N° 326524

[1Photo : © Gary Blakeley

[2Un seul enfant à charge au lieu de trois

[3centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage

[4relatif aux modalités de la rémunération ou de la compensation des astreintes et des permanences dans la fonction publique territoriale, pris pour l’application du décret du 12 juillet 2001

[5dont l’annexe, dans sa version résultant du décret du 23 octobre 2003, ne comporte d’ailleurs plus d’énumération des indemnités concernées par une telle équivalence

[6fixant le nombre d’emplois ou de fractions d’emplois affectés aux services ou parties de services transférés par l’Etat à la REGION MIDI-PYRENEES et participant aux missions d’accueil, de restauration, d’hébergement et d’entretien général et technique dans les établissements dont elle a la charge

[7et ne pouvait ignorer l’existence du chantier qui était signalé par de nombreux panneaux

[8En application des dispositions du 1° de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales.