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La jurisprudence de la semaine

Semaine du 26 au 30 octobre 2009

Retrouvez une sélection de décisions de justice intéressant les collectivités locales et les associations (dernière mise à jour le 08/03/2010).


 [1]

Jurisprudence judiciaire

 Protection des élus - Diffamation

La Cour de cassation confirme la condamnation d’une journaliste pour diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public [2]. La journaliste, lors d’une chronique à la radio, avait insinué que l’élu mélangeait ses affaires et la politique à son profit.

Cour de cassation, chambre criminelle, 27 octobre 2009, N° 09-81498


 Les échelles doivent-elles être équipées de patins antidérapants ?

Oui. Une société est ainsi reconnue responsable de la chute d’un salarié qui est tombé d’une hauteur de près de quatre mètres alors que, monté sur une échelle, il procédait à des opérations d’installation de portes d’accès d’un entrepôt. L’absence de patins antidérapants permet de retenir que l’employeur n’a pas fourni un matériel disposant des équipements de sécurité exigés et a ainsi commis un manquement délibéré aux obligations de sécurité.

Cour de cassation, chambre criminelle, 27 octobre 2009, N° 09-80490


 Une ambiguïté de la signalisation peut-elle être sanctionnée pénalement en cas d’accident ?

Oui. Ainsi commet une faute caractérisée le maire qui ne fait pas correspondre la signalisation avec un arrêté interdisant la circulation des véhicules à moteur. L’ambiguïté de la signalisation peut, en outre, être entretenue par l’absence de verbalisation des contrevenants qui ont l’habitude d’emprunter la voie interdite à la circulation. C’est dire que les maires doivent non seulement être attentifs à la cohérence des aménagements et de la signalisation, mais doivent, également, être vigilants à l’effectivité des mesures de police prises en invitant les forces de l’ordre à verbaliser les éventuels contrevenants. La commission d’une faute caractérisée n’est cependant pas suffisante pour établir la responsabilité pénale du maire pour homicide involontaire. Encore faut-il que cette faute expose autrui à un danger que l’élu ne pouvait ignorer. Cette conscience du risque ne peut se déduire de la seule survenance d’un accident. En l’espèce les magistrats d’appel relaxent l’élu en considérant qu’il n’a pas mesuré les risques encourus par les usagers.

Cour d’appel de Besançon 27 octobre 2009, n°08/01353


Jurisprudence administrative

 Urbanisme - Antenne de téléphonie mobile - Opposition à travaux - Pouvoirs du maire - Compétence du juge des référés

"L’usage par le maire du pouvoir, qu’il tient du troisième alinéa de l’article L. 480-2 du code de l’urbanisme, d’ordonner l’interruption de travaux réalisés en méconnaissance d’une autorisation de construire est subordonné, en vertu des termes mêmes de cette disposition, à la condition qu’un procès-verbal d’infraction ait au préalable été dressé et, en application des dispositions de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000, à la condition que l’intéressé ait été mis à même de présenter des observations avant l’intervention d’une telle mesure".

Un maire ne peut ainsi enjoindre à une société de téléphonie mobile d’interrompre des travaux d’installation d’une antenne [3] qui ont fait l’objet d’une décision initiale de non-opposition, sans respecter ces formalités préalables.

"Eu égard à l’intérêt public qui s’attache à la couverture du territoire national par le réseau de téléphonie mobile", la condition d’urgence requise pour saisir le juge des référés est, en l’espèce, jugée remplie.

Conseil d’État, 26 octobre 2009, N° 328467


 Taxe foncière - décharge d’imposition - bail emphytéotique - OPHLM

Un OPHLM peut obtenir auprès du tribunal administratif une décharge d’imposition de taxe foncière s’il est démontré que le bail [4] ne peut être qualifié de bail emphytéotique, eu égard aux restrictions portant sur la cession éventuelle de ses droits. Toutefois, le juge administratif ne peut prononcer la décharge des impositions contestées, sans désigner le redevable légal des taxes foncières en litige.

Conseil d’État, 27 octobre 2009, N° 319917


 Fonction publique : un changement d’affectation constitue-t-il une sanction déguisée ?

Non dès lors que :

1° les nouvelles missions confiées à l’agent sont conformes à son grade ;

2° la décision été prise pour remédier aux problèmes d’organisation du service, sans que ces problèmes soient imputés à l’agent.

Conseil d’État, 28 octobre 2009, N° 299252


 Dans quels cas un arrêté de mutation doit il être soumis à l’avis de la commission administrative paritaire (CAP) ?

Seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation des intéressés sont soumises à l’avis des commissions administratives paritaires [5].

Des arrêtés qui mettent fin aux fonctions d’un chef de centre d’incendie et de secours (SDIS), et qui prévoient que l’intéressé cesse de percevoir les indemnités liées à ces fonctions, présentent le caractère d’une modification de situation de l’agent. Ils auraient ainsi dû faire l’objet, préalablement à leur adoption, d’une consultation de la commission administrative paritaire.

Conseil d’État, 28 octobre 2009, N° 304062


 Urbanisme - Annulation du plan d’occupation des sols (POS) - Responsabilité de la commune - Préjudice indirect

 "La responsabilité d’une personne publique n’est susceptible d’être engagée que s’il existe un lien de causalité suffisamment direct entre les fautes commises par cette personne et le préjudice subi par la victime". Le préjudice résultant pour des acquéreurs de terrains de la différence entre le prix auquel ils ont acquis ces terrains et la valeur réelle de ces derniers consécutivement à l’annulation partielle du POS [6] est un préjudice indirect. En effet les actes ayant permis l’aménagement de la zone puis ultérieurement la vente des terrains ne conféraient aucun droit à construire. Le préjudice des requérants trouve sa cause directe dans les contrats de vente passés entre les acquéreurs et l’aménageur de la zone, lesquels pouvaient prévoir, en particulier, que la vente n’était conclue que sous réserve de l’obtention des permis de construire.

Conseil d’État, 28 octobre 2009, N° 299753


 Fonction publique - pratique des délégations de masse - Nature juridique - Retenue sur traitement

La pratique dite des délégations de masse , consistant pour les agents qui y participent, à se présenter en groupe sans préavis dans le bureau d’un chef de service pour lui présenter leurs revendications ne constitue pas l’une des formes d’exercice des réunions statutaires ou d’information prévues par les dispositions de l’article 4 du décret du 28 juillet 1982 relatif à l’exercice de la liberté syndicale dans la fonction publique.

Une administration ne peut pas instituer le principe d’une retenue sur traitement pour tout agent participant, à l’avenir, à une délégation de masse , sans distinguer les cas où cette pratique porte atteinte à l’accomplissement par l’agent de ses heures ou obligations de service de ceux où tel n’est pas le cas, et sans réserver les retenues sur traitement aux cas où la participation à une telle délégation de masse s’accompagnerait d’une absence de service fait.

Conseil d’État, 28 octobre 2009, N° 317313


 Police de l’affichage - Publicité à l’intérieur d’un local visible depuis la voie publique

Ne relèvent pas de l’exception prévue au dernier alinéa de l’article L. 581-2 en faveur de la publicité située à l’intérieur d’un local, des photographies de deux mètres de long sur deux mètres de large, uniquement visibles depuis la voie publique, placées derrière les baies à l’intérieur d’un magasin de vente de vêtements et représentant des mannequins portant des vêtements de la marque.

Conseil d’État, 28 octobre 2009, N° 322758


 Est-ce à la victime d’apporter la preuve du lien de causalité entre l’accident et l’ouvrage public ?

Oui. "La responsabilité des collectivités publiques ne peut être engagée, à l’égard des usagers d’un ouvrage public, que si la victime apporte la preuve d’un lien de causalité entre l’ouvrage et le dommage dont elle demande réparation". Ainsi, en l’absence de témoignage direct sur les circonstances de l’accident, un département ne saurait être déclaré responsable de la chute d’un piéton imputé à la présence d’un trou dans la voirie. En effet la victime ne peut se borner à produire un rapport du chef du service voirie-réseaux des services techniques de la ville, qui n’était pas présent au moment de l’accident et qui reconnaît ne détenir aucune information sur ses circonstances exactes, le rapport d’intervention des sapeurs-pompiers qui ne comporte aucune mention sur les causes de la chute, ainsi que diverses photographies peu exploitables.

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 29 octobre 2009, N° 08BX03242


 L’irrégularité de la convocation des conseillers municipaux entache-t-elle d’illégalité les délibérations adoptées au cours de cette séance ?

Oui. Les convocations aux réunions du conseil municipal doivent être envoyées aux conseillers municipaux à leur domicile personnel et il doit être procédé à cet envoi dans un délai de trois jours francs avant cette réunion. La méconnaissance de ces règles est de nature à entacher d’illégalité les délibérations prises par le conseil municipal. La commune ne peut pas s’affranchir de cette formalité par la seule production d’attestations des membres du conseil municipal qui ne font aucunement mention des conditions dans lesquelles leur ont été notifiées lesdites convocations. Dès lors, l’irrégularité de la convocation des conseillers municipaux entache d’illégalité les délibérations adoptées au cours de cette séance. Ainsi les sociétés requérantes sont fondées à obtenir l’annulation de la délibération du conseil municipal instituant un droit de préemption urbain.

Cour Administrative d’Appel de Versailles, 29 octobre 2009, N° 08VE02980


 Droit communautaire - Effet direct des directives

La transposition en droit interne des directives communautaires constitue une obligation constitutionnelle. Il appartient au juge national, juge de droit commun de l’application du droit communautaire, de garantir l’effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l’égard des autorités publiques. Ainsi "tout justiciable peut en conséquence demander l’annulation des dispositions règlementaires qui seraient contraires aux objectifs définis par les directives et, pour contester une décision administrative, faire valoir, par voie d’action ou par voie d’exception, qu’après l’expiration des délais impartis, les autorités nationales ne peuvent ni laisser subsister des dispositions réglementaires, ni continuer de faire application des règles, écrites ou non écrites, de droit national qui ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par les directives". En outre, "tout justiciable peut se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d’une directive, lorsque l’Etat n’a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires".

Conseil d’État, 30 octobre 2009, N° 298348

[1Photo : © Gary Blakeley

[2Président d’une province de Nouvelle-Calédonie

[3au motif que la dalle supportant l’antenne de téléphonie mobile présentait une surface hors oeuvre brute supérieure à 20 m² et devait, par suite, faire l’objet d’un permis de construire

[4d’une durée de 99 ans portant sur la réhabilitation de logements sociaux

[5Article 52 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

[6En tant qu’il créait une zone NAb, au motif que celle-ci s’inscrivait dans un site remarquable dans lequel aucune construction ne pouvait être légalement autorisée