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Un nouvel outil de sécurisation juridique à disposition des collectivités territoriales : la prise de décision formelle

Dernière mise à jour : le 3 juin 2020

La loi Engagement et proximité a mis en place une nouveau dispositif pour sécuriser juridiquement les actes des collectivités territoriales : la demande de prise de position formelle. Un décret d’application du 25 mai 2020 en précise les modalités.

Pour devenir exécutoires, outre leur publication ou leur notification aux intéressés, certains actes des collectivités territoriales doivent être transmis au représentant de l’Etat dans le département (préfet) ou à son délégué dans l’arrondissement (sous-préfet de l’arrondissement).
Celui-ci, chargé du contrôle de légalité, vérifie la conformité des actes pris par les collectivités territoriales et leurs établissements publics avec les dispositions législatives et réglementaires en vigueur.
L’article L.2131-2 du code général des collectivités territoriales arrête ainsi une liste des délibérations et actes que les collectivités doivent transmettre aux services de la préfecture pour contrôle a posteriori.

La loi « engagement et proximité » (Loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019) a instauré en amont une procédure de « demande de prise de position formelle » (ou « rescrit normatif »). Un article L. 1116-1 a ainsi été inséré dans le Code général des collectivités territoriales. Le décret d’application était attendu. Il a été publié au journal officiel du 27 mai 2020.

Quel est l’intérêt de ce nouveau dispositif ?

Avant d’adopter un acte susceptible d’être déféré au tribunal administratif, les collectivités territoriales ou leurs groupements ainsi que leurs établissements publics peuvent saisir le représentant de l’Etat chargé de contrôler la légalité de leurs actes d’une demande de prise de position formelle relative à la mise en œuvre d’une disposition législative ou réglementaire régissant l’exercice de leurs compétences ou les prérogatives dévolues à leur exécutif.

L’intérêt est pour les collectivités et leurs groupements d’obtenir en amont une prise de position éclairée sur la légalité de l’acte projeté. Sachant que les services de la préfecture seront ensuite liés par cette prise de position : si l’acte adopté par la collectivité est conforme à la prise de position formelle, le représentant de l’Etat ne pourra plus ensuite déférer l’acte devant les juridictions administratives. Sauf si, entre-temps, il y a eu un changement de circonstances.

Quelle forme doit prendre la demande ?

 Elle doit être transmise au représentant de l’Etat par tout moyen permettant d’apporter la preuve de sa réception.
 La demande est nécessairement transmise par écrit.
 Elle doit être signée par une personne compétente pour représenter l’auteur de la demande.
 La demande doit être précise et complète : elle doit comprendre le projet d’acte ainsi que la présentation claire et précise de la ou des questions de droit portant sur l’interprétation d’une disposition législative ou réglementaire directement liée au projet d’acte. Elle doit en outre être assortie d’un exposé des circonstances de fait et de droit fondant le projet d’acte ainsi que de toute information ou pièce utile de nature à permettre à l’autorité compétente de se prononcer.

Si la demande est incomplète, le représentant de l’Etat doit inviter la collectivité à fournir les éléments complémentaires nécessaires.

🚨Lors de la transmission de l’acte définitivement adopté au représentant de l’Etat ou, le cas échéant, au délégué dans l’arrondissement du représentant de l’Etat dans le département, dans le cadre de l’exercice du contrôle de légalité, l’auteur de la demande de prise de position formelle devra joindre à l’acte transmis, la prise de position formelle.

Sous quel délai le représentant de l’Etat doit-il répondre ?

Dans le délai de trois mois à compter de la date de réception de la demande ou, le cas échéant, à compter de la date de réception des éléments complémentaires demandés. Autant dire que ce délai de réponse relativement important, ne convient pas aux situations qui nécessitent une prise de position rapide. L’intérêt du dispositif dépendra donc avant tout de la capacité des services de la préfecture à pouvoir traiter les demandes de manière réactive.

L’absence de réponse équivaut-il à une prise de position en faveur de la collectivité ?

Non. L’absence de réponse vaut au contraire absence de prise de position formelle. La collectivité qui a interrogé les services de la préfecture ne pourra donc pas se prévaloir d’une absence de réponse. Le représentant de l’Etat reste libre dans cette hypothèse de déférer l’acte.

La prise de position formelle évite-t-elle tout contentieux ?

Non. Une prise de position formelle a simplement pour effet d’interdire aux services de l’Etat de se déjuger et d’attaquer l’acte si la collectivité a pris une décision conforme à la prise de décision formelle. Rien n’interdit à une personne ayant qualité pour agir (ex : contribuable de la commune, entreprise évincée d’un marché public, association...) d’exercer un contentieux bien que la collectivité ait pris un acte conforme à la prise de décision formelle. Et le juge administratif (voire le juge pénal si commission d’une infraction) n’est pas lié par la prise de position de l’administration et reste souverain dans son appréciation. Ce nouveau dispositif n’en conserve pas moins sa pertinence et son efficacité dépendra avant tout de la capacité des services de l’Etat à répondre de manière réactive aux demandes des collectivités.

🚨 On ne s’improvise pas juriste et les conséquences d’une impasse sur un texte ou d’une mauvaise interprétation sont potentiellement lourdes. Autant les grandes collectivités peuvent s’appuyer sur des compétences internes solides notamment de juristes territoriaux, autant les collectivités de taille plus modeste sont souvent démunies. Pourtant, sauf exceptions , les règles à appliquer sont les mêmes, quelle que soit la taille de la collectivité, et les conséquences en cas de méconnaissance identiques et potentiellement très lourdes en terme de responsabilité.
Recourir à un cabinet d’avocat spécialisé pour recueillir un avis éclairé et sécuriser juridiquement un projet peut s’avérer indispensable. Être bien conseillé en amont peut en effet éviter bien des désagréments.
Lorsqu’un litige est avéré (mais c’est déjà un peu tard…), les honoraires de l’avocat pourront être pris en charge par l’assurance de la collectivité ou de l’élu (les élus peuvent souscrire une assurance personnelle pour se couvrir d’éventuelles recherches en responsabilité dirigées directement contre eux devant les juridictions judiciaires) dans la limite des plafonds de garantie prévus au contrat applicable et sous réserve que le litige entre dans les champs juridiques couverts par le contrat. Les contrats d’assurance de protection juridique incluent généralement une prestation d’information juridique dans différents domaines du droit. C’est le cas des contrats proposés par SMACL Assurances. Cela permet aux assurés d’avoir accès à une information juridique de 1er niveau par des juristes aguerris aux recherches juridiques et qui ont accès à un panel de base de données métiers et aux publications spécialisées.