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Accident en colonie de vacances : consignes de sécurité équivoques, responsabilité de l’association engagée

TGI de Digne-les-Bains, 20 juin 2018, N° 18/00181

Une association organisant une colonie de vacances peut-elle être tenue responsable de l’accident survenu à un enfant qui s’est blessé en tentant un saut dangereux lors d’une activité de baignade encadrée par des animateurs ?

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Oui : les associations accueillant des mineurs lors de séjours ont une obligation de sécurité qui leur impose "de surveiller les activités des enfants pour éviter qu’ils s’exposent à des dangers dont ils pourraient sous-estimer la gravité en leur interdisant notamment de pratiquer des jeux à caractère dangereux". Il s’agit d’une obligation de sécurité de moyens et non de résultat. Il appartient donc à la victime d’établir une faute de l’association. En l’espèce les juges retiennent la responsabilité d’une association après un accident survenu à un enfant qui s’est blessé en tentant un salto lors d’une activité de baignade. Si les règles relatives à la sécurité de l’activité et à l’encadrement étaient bien respectées, le tribunal relève que, d’une part, c’est un animateur qui avait montré aux enfants comment réaliser des saltos et d’autre part, les consignes données étaient équivoques quant à l’interdiction de cette pratique. L’association est condamnée à verser plus de 100 000 euros de dédommagement à l’enfant, à la CPAM et à la mère de la victime.

Au cours d’un séjour en colonie de vacances, un jeune garçon âgé de 12 ans est grièvement blessé, après avoir réalisé un salto sur la plage dans une eau peu profonde.

Ses parents et la CPAM assignent en justice l’association organisatrice, estimant qu’elle a failli à son obligation de sécurité.

Le tribunal de grande instance de Digne-les-Bains confirme que l’obligation contractuelle de sécurité pesant sur les responsables d’une colonie
de vacances est bien une obligation de moyens et non de résultat.

A cet égard, il appartient à la victime de prouver une faute de l’association organisatrice comme un défaut de prévoyance et de diligence dans l’exécution de son obligation de surveillance. Ainsi s’agissant d’associations qui accueillent des mineurs, cette obligation de sécurité leur impose "de surveiller les activités des enfants pour éviter qu’ils s’exposent à des dangers dont ils pourraient sous-estimer la gravité en leur interdisant notamment de pratiquer des jeux à caractère dangereux".

En l’espèce, l’enquête administrative n’a révélé aucune violation de la réglementation en vigueur tant du point de vue du taux d’encadrement, que des conditions matérielles et des règles de sécurité de la baignade. En effet :

 un périmètre de baignade, matérialisé par des lignes d’eau, avait bien été délimité par la surveillante de baignade ;

 les 21 enfants dans l’eau étaient encadrés par trois animateurs répartis dans ce périmètre et par la surveillante de baignade présente au bord de l’eau.

Pour autant le tribunal retient la responsabilité de l’association. En effet, il ressort de l’enquête que le jeu consistait pour certains enfants à partir de la plage de sable en courant, et de réaliser des saltos quand l’eau leur arrivait aux chevilles sachant qu’à la réception ils avaient de l’eau jusqu’aux genoux. Or c’est un animateur qui avait montré aux enfants comment procéder.

En outre, les témoignages recueillis après l’accident sont contradictoires quant aux consignes qui auraient été données sur cette pratique. En effet, si la surveillante de baignade indique dans un premier temps, lors de son audition par la gendarmerie, que les enfants avaient interdiction de faire des saltos au bord de l’eau, elle précise ensuite qu’ils y étaient autorisés s’ils avaient de l’eau jusqu’aux cuisses. Le témoignage de l’animatrice spécialisée est tout aussi équivoque : après avoir précisé que la consigne avait été donnée aux enfants de ne pas faire de saltos, elle avait ajouté que la victime avait fait un petit salto mais en respectant les règles énoncées par la surveillante de baignade.

Et le tribunal de souligner "qu’outre le fait d’avoir été à l’initiative de cette pratique imprudente et d’en avoir eu connaissance, [l’association], par l’intermédiaire de ses animateurs, n’a pas su l’interdire de manière claire et non équivoque". Ainsi l’association a commis une faute en lien direct et certain avec le dommage subi par la victime.

En conséquence, l’association et son assureur sont condamnés solidairement à verser plus de 60 000 euros à l’enfant en réparation de ses préjudices, plus de 45 000 euros à la CPAM pour les frais de soins engagés, et 10 000 euros à la mère de l’enfant en réparation de son préjudice d’affection.

TGI Digne-les-Bains, 20 juin 2018, N° 18/00181

[1Photo : @arstyy via unsplash