Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

Accident au cours d’un voyage organisé par un comité de jumelage : responsabilité de plein droit de l’association ?

Cour de cassation, chambre civile, 22 juin 2017, N° 16-14035

Une association est-elle responsable de plein droit en cas d’accident survenu au cours d’un voyage touristique organisé pour ses membres ?

Non dès lors que l’association n’est pas rémunérée pour cette occasion. Ainsi un comité de jumelage qui propose à ses adhérents un voyage, dont l’organisation est confiée à une agence de voyage, n’est pas responsable de plein droit en cas d’accident dont l’un de ses adhérents est victime au cours d’une excursion. En effet, les dispositions du code tourisme qui posent le principe de la responsabilité de plein droit à l’égard des organisateurs de voyage, supposent le versement d’une rémunération. Or si le prix du voyage et celui des excursions ont été encaissés en premier lieu par l’association, la preuve n’est pas rapportée que celle-ci ait été rémunérée à cette occasion. L’association ne peut donc être assimilée à un vendeur de voyage. A contrario, s’il peut être démontré que l’association a, au passage, réalisé une marge sur le prix du voyage pour se financer, en le vendant plus cher que le prix réellement facturé par l’agence, le régime de responsabilité de plein droit du Code du tourisme pourrait s’appliquer. Une jurisprudence transposable aux comités d’entreprise (CE), ou comité des œuvres sociales (COS) qui organisent des voyages pour leurs adhérents.

Un comité de jumelage, propose à ses membres un voyage de huit jours au Sénégal. L’organisation du voyage est confiée à une agence caennaise et celle des excursions à une agence locale au Sénégal. L’association collecte les fonds relatif à ce séjour et choisit les prestataires des activités qui sont proposées aux participants sur place.

Lors d’une excursion en 4X4 organisée par une agence locale, l’une des adhérentes se blesse et doit être rapatriée en France. La victime assigne l’association organisatrice ainsi que son assureur sur le fondement de l’article 211-16 du code du tourisme.

En effet, il résulte de ces dispositions que toute personne physique ou morale qui se livre à une opération consistant en l’organisation ou la vente de voyages ou de séjours individuels ou collectifs est responsable de plein droit à l’égard de l’acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat. Et ce quelles que soient les modalités de la rémunération.

L’argument fait mouche devant tribunal qui retient la responsabilité de plein droit de l’association. Mais la cour d’appel infirme le jugement, écartant toute responsabilité automatique de l’association en l’absence de rémunération.

A l’appui de son pourvoi, la victime objecte :

 que l’association a bien été rémunérée puisque les participants lui ont directement versé le prix du voyage et des activités ;

 qu’il existe un lien contractuel entre les participants et l’association puisque c’est l’association qui a proposé ce voyage et que c’est également elle qui a proposé un certain nombre d’excursions possibles sur place, au choix des participants et que le prix en a été à chaque fois encaissé en premier lieu par l’association ou le coordinateur du voyage ;

 que l’association a commis une faute d’imprudence en ne vérifiant pas les conditions de transport et de sécurité offertes par le prestataire local, notamment la présence de ceintures de sécurité dans ses véhicules ;

 que l’association a reconnu implicitement sa responsabilité en versant à la victime un chèque de 150 euros pour commencer à la couvrir des frais et du préjudice subi.

La Cour de cassation n’en confirme pas moins l’arrêt de la cour d’appel et écarte toute responsabilité de l’association :

 si le prix du voyage et celui des excursions ont été encaissés dans un premier temps par l’association, la preuve n’est pas rapportée que celle-ci a été rémunérée à cette occasion ;

 en l’absence de preuve d’une rémunération de l’association, la responsabilité de plein droit de celle-ci ne pouvait être engagée, et la cour d’appel a pu en déduire qu’aucune relation contractuelle n’existait entre l’association et les participants au voyage ;

 la requérante n’a fondé au départ son action que sur les articles L. 211-1 et suivants du code du tourisme et non sur la responsabilité délictuelle de l’association ni sur la reconnaissance tacite et non équivoque de cette responsabilité. Les moyens soulevés en ce sens par la victime devant la Cour de cassation sont donc nouveaux et mélangés de fait et comme tels irrecevables [1].

Cet arrêt s’inscrit dans la droite ligne d’un précédent arrêt de la Cour de cassation [2] où celle-ci avait exclu la responsabilité de plein droit d’un CCAS après un accident [3], celui-ci ne pouvant être assimilé à un vendeur de voyage au sens du Code du tourisme, en l’absence de rémunération.

A contrario, s’il peut être démontré que l’association a, au passage, réalisé une marge sur le prix du voyage pour s’auto-financer, en le vendant plus cher que le prix réellement facturé par l’agence, le régime de responsabilité de plein droit du Code du tourisme pourrait s’appliquer.

Cour de cassation, chambre civile, 22 juin 2017, N° 16-14035

[1La Cour de cassation ne se prononce donc pas sur la responsabilité délictuelle de l’association en raison d’une faute d’imprudence qu’elle aurait commise dans le choix des prestataires, ni sur le versement du chèque comme reconnaissance tacite et non équivoque de responsabilité.

[2Cour de cassation,
chambre civile, 9 avril 2015, N° de pourvoi : 14-15720 14-18014

[3Un participant s’était blessé en plongeant depuis une pirogue au cours d’une activité.