Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

La jurisprudence de la semaine

Semaine du 1er au 5 juin 2009

Retrouvez une sélections de décisions de justice intéressant les collectivités territoriales rendues entre le 1er le 5 juin 2009 (dernière mise à jour : 30/12/2009)


 [1]

Jurisprudence judiciaire

 Les agents de l’ONF doivent-il porter l’uniforme pour pouvoir verbaliser ?

Non. Tout agent assermenté de l’office national des forêts (ONF) est habilité par application des dispositions du code forestier, notamment de ses articles L. 122-7 et L. 122-8, à dresser un procès-verbal valant foi jusqu’à preuve du contraire.

Encourt, dès lors, la cassation l’arrêt, qui, pour annuler le procès-verbal dressé par un agent de l’ONF, retient qu’il a effectué les constatations en tenue civile, en méconnaissance de l’article R. 221-17-6 du code de l’environnement, devenu R. 421-22 du même code, qui prescrit le port de l’uniforme, lequel ne concerne que les agents de l’office national de la chasse et de la faune.

Cour de cassation, chambre criminelle, 3 juin 2009, N° 08-87434


 Urbanisme : une réponse erronée de la mairie peut-elle constituer une erreur de droit pour un particulier qui pensait être dispensé de la nécessité d’obtenir un permis de construire ?

Non. Ainsi la condamnation d’un restaurateur est confirmée pour avoir transformé, sans permis de construire, le garage d’un immeuble d’habitation en salle de restaurant. Peu importe que la mairie lui ait indiqué que cette modification ne nécessitait pas de permis de construire. En effet, d’une part, la transformation de locaux à usage de garage en salle de restaurant emporte un changement de la destination des lieux au sens de l’article L. 421-1 du code de l’urbanisme dans sa rédaction applicable au moment des faits et, d’autre part, il incombe au prévenu d’établir qu’il a cru, par une erreur de droit qu’il n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir légitimement accomplir le fait reproché.

Cour de cassation, chambre criminelle, 3 juin 2009, N° 08-86212


 Responsabilité des élus

"Les juridictions pénales sont compétentes pour apprécier, à la suite de sa condamnation pénale, la responsabilité d’un maire à raison de ses fautes personnelles détachables de la fonction".

Ainsi les juridictions répressives sont compétentes pour condamner le maire d’une commune à indemniser les victimes sur ses deniers personnels dès lors que, poursuivi pour avoir frauduleusement obtenu de diverses administrations et collectivités territoriales des subventions sollicitées sur la présentation de faux documents pour justifier de prestations et travaux fictifs, il a été définitivement condamné des chefs de détournement de fonds publics, faux et usage.

Cour de cassation, chambre criminelle, 4 juin 2009, N° 08-86166


 Les juridictions répressives peuvent-elles se fonder sur les déclarations d’un témoin de la défense pour condamner un élu ?

Oui si le témoin a prêté serment de dire toute la vérité et rien que la vérité. En l’espèce la condamnation d’un élu pour prise illégale d’intérêts, complicité d’abus de confiance, complicité et usage de faux [2] est annulée. En effet la Cour d’appel s’est notamment fondée sur le témoignage de la secrétaire de mairie citée par la défense alors que celle-ci n’avait pas prêté serment. Il appartiendra à la Cour d’appel de renvoi de juger à nouveau l’élu conformément à la loi.

Cour de cassation, chambre criminelle, 4 juin 2009, N° 08-86052


 Le versement d’un salaire disproportionné à la directrice d’une association peut-il être constitutif d’abus de confiance ?

Oui. La Cour de cassation confirme le renvoi en correctionnelle du chef d’abus de confiance d’une directrice d’une association embauchée avec un salaire annuel de plus de 120 000 euros, outre la mise à disposition d’un véhicule de fonction haut de gamme. La perception de cette rémunération fixée par le conseil d’administration privé d’existence légale, faute d’avoir été désigné par une assemblée générale, qui n’a jamais été réunie, se situait selon un rapport d’audit mandaté par l’administrateur judiciaire « à un niveau hors du commun pour ce type d’activité » et ne correspondait ni aux qualifications professionnelles de la salariée, titulaire d’un CAP de secrétaire comptable, ni à la charge de travail réelle.

Cour de cassation, chambre criminelle, 4 juin 2009, N° 08-85413


Jurisprudence administrative

 Assistance éducative - Mineur responsable d’un accident - Hébergement chez les parents au moment des faits - Responsabilité sans faute de l’Etat

1° "La décision par laquelle le juge des enfants confie la garde d’un mineur, dans le cadre d’une mesure d’assistance éducative prise en vertu des articles 375 et suivants du code civil, à l’une des personnes mentionnées à l’article 375-3 du même code, transfère à la personne qui en est chargée la responsabilité d’organiser, diriger et contrôler la vie du mineur" ;

2° "En raison des pouvoirs dont l’Etat se trouve ainsi investi lorsque le mineur a été confié à un service ou un établissement qui relève de son autorité, sa responsabilité est engagée, même sans faute, pour les dommages causés aux tiers par ce mineur, y compris lorsque celui-ci est hébergé par ses parents, dès lors qu’aucune décision judiciaire n’a suspendu ou interrompu cette mission éducative"

Conseil d’Etat, 3 juin 2009, N° 300924


 Urbanisme - Espaces protégés - Création d’un parc naturel - Intérêt à agir d’un particulier

Les seules qualités de résident dans un département où est créé un parc naturel , et de promeneur ne confèrent pas à un particulier (qui est domicilié à 200 km des limites du parc, dans une commune dont le territoire n’est pas, même partiellement, compris dans le périmètre du parc) un intérêt lui donnant qualité pour demander l’annulation du décret portant création dudit parc.

Conseil d’Etat, 3 juin 2009, n° 305131


Urbanisme - Loi littorale - Directive territoriale d’aménagement - Critère de la covisibilité - Notion d’ensemble cohérent

1° Pour déterminer si une zone peut être qualifiée d’espace proche du rivage au sens des dispositions de l’article L. 146-4 du code de l’urbanisme, trois critères doivent être pris en compte, à savoir la distance séparant cette zone du rivage, son caractère urbanisé ou non et la covisibilité entre cette zone et le plan d’eau. La seule circonstance que la covisibilité ne soit pas été expressément mentionnée dans une directive territoriale d’aménagement ne suffit pas à établir qu’elle aurait été ignorée.

2° L’objectif d’urbanisation limitée visé par le II de l’article L. 146-4 du code de l’urbanisme "implique que soit retenu dans sa totalité, comme espace proche du rivage, un territoire dont le développement urbain forme un ensemble cohérent (...) ; si le critère de covisibilité est à prendre en compte pour la définition d’un tel espace proche du rivage, il n’implique donc pas que chacune des parcelles situées au sein de l’espace ainsi qualifié soit situé en covisibilité de la mer, dès lors que ces parcelles ne peuvent être séparées de l’ensemble cohérent dont elles font partie"

Conseil d’Etat, 3 juin 2009, n° 310587


Elections - Intercommunalité - Election des vice-présidents

1° Les vice-présidents d’une communauté d’agglomération sont élus au scrutin secret et à la majorité absolue des membres du conseil communautaire. Les désignations auxquelles procède un conseil communautaire constituent des opérations électorales. Par suite les contestations qui les concernent ont le caractère de litiges en matière électorale, qui relèvent des règles applicables au contentieux de l’élection des conseillers municipaux.

2° L’élection à l’organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale n’est soumise à aucune règle de parité.

3° Il doit être procédé de manière successive à l’élection de chacun des vice-présidents au scrutin uninominal à trois tours, ce qui ne permet pas de pouvoir recourir au scrutin de liste.

Conseil d’Etat, 3 juin 2009, N° 319101, N° 319642


 Marchés publics - Marchés communautaires - Formulaire standard - Rubriques non renseignées - Incidences sur la légalité du marché

Un candidat évincé d’un marché soutient que l’avis d’appel public à la concurrence ne comporte aucune indication dans les rubriques VI. 4.2) Introduction des recours et VI. 4.3) Service auprès duquel des renseignements peuvent être obtenus concernant l’introduction des recours et que la rubrique II.1.4) Information sur l’accord-cadre aurait dû être remplie, dans la mesure où le marché litigieux constitue un marché à bons de commande, lequel doit être regardé comme un accord-cadre au sens du droit communautaire. Le Conseil d’Etat lui répond que "eu égard à leur portée, il ne résulte pas de l’instruction que la société S..., qui a pu présenter utilement une offre et former un recours, soit susceptible d’avoir été lésée ou risque d’être lésée par les irrégularités ainsi invoquées"

De même si la rubrique VI. 3.7) Délai minimum pendant lequel le soumissionnaire est tenu de maintenir son offre de l’avis d’appel public à la concurrence ne comporte aucune indication, il ressort de l’instruction que le règlement de consultation indiquait clairement que le délai de validité des offres était de 120 jours à compter de la date limite fixée pour la remise des offres. "Ainsi, les candidats ont bien disposé en temps utile des informations nécessaires sur le délai de validité des offres".

Conseil d’État, 3 juin 2009, N° 321808


 Elections - Compte de campagne - Mandataire financier - formalité substantielle

L’obligation de recourir à un mandataire pour toute dépense engagée en vue de la campagne constitue une formalité substantielle à laquelle il ne peut, en principe, être dérogé. Le règlement direct de menues dépenses par le candidat tête de liste ou par ses colistiers ne peut être admis qu’à la double condition que leur montant soit faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l’article L. 52-11 du code électoral. Ne sont ni faibles, ni négligeables des dépenses payées directement par un candidat, après la désignation de son mandataire financier, d’achat de timbres et de frais de réception, pour un montant total de 1241 euros soit 7,66 % du montant total des dépenses inscrites au compte de campagne et 5,39 % du plafond des dépenses fixé pour la commune. Peu importe que ces dépenses aient fait l’objet d’un remboursement ultérieur par le mandataire financier dès lors que ces dépenses ont été exposées après qu’a été désigné ce mandataire, en méconnaissance de l’article L. 52-4 du code électoral.

Conseil d’Etat, 3 juin 2009, N° 323445


 Marchés publics - Référé contractuel - Suspension de la signature du marché - Pouvoirs du juge des référés

Il résulte des termes de l’article L. 551-2 du code justice administrative que si la signature d’un contrat en méconnaissance de l’injonction de suspension l’entache d’une irrégularité susceptible d’être invoquée par un candidat évincé, devant le juge du contrat, elle prive cependant de son office le juge des référés précontractuels.

Conseil d’Etat, 3 juin 2009, n° 323594


 Marchés publics - Marchés passés pour le compte d’une personne privée - Compétence du juge judiciaire

Seuls les marchés passés en exécution du code des marchés publics, c’est-à-dire entrant dans son champ d’application dont sont exclues les personnes morales de droit privé, pouvant être qualifiés de marchés publics en vertu de l’article 2 de la loi du 11 décembre 2001. Ainsi un contrat de fourniture conclu par une personne publique agissant sur mandat et pour le compte d’une personne privée au titre des besoins propres de cette dernière est un contrat de droit privé. Les litiges relatifs à la passation de ce contrat, tels ceux liés à la méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence posées par les dispositions de l’ordonnance précitée du 6 juin 2005, relèvent de la seule compétence du juge judicaire. Peu importe que l’acheteur (en l’espèce un OPAC) mandaté par l’entreprise privée ait choisi d’appliquer des règles de passation posées par le code des marchés publics.

Conseil d’Etat, 3 juin 2009, n° 324405


 Affermage - Pollution - Responsabilité de la commune - Appréciation

L’étendue des réparations incombant à une personne publique liée par un contrat public à une personne privée du fait d’un dommage dont la responsabilité lui est imputée, ne dépend pas de l’évaluation faite par l’autorité judiciaire dans un litige dans lequel cette personne publique n’était pas partie mais doit être déterminée par le juge administratif compte tenu des règles afférentes à la responsabilité des personnes ayant passé un contrat de droit public.

Conseil d’Etat, 5 Juin 2009, n° 295837


 Responsabilité de la commune - collaborateur bénévole de service public

Est un collaborateur bénévole du service public, le citoyen qui participe à l’animation d’une fête de Noël organisée pour des enfants défavorisés de la commune. La commune doit l’indemniser des conséquences de l’accident dont il a été victime à cette occasion.

Conseil d’Etat, 5 juin 2009, n° 312103


Fonction publique - Contractuel - Non renouvellement du contrat - Communication du dossier

Un agent dont le contrat est arrivé à échéance n’a aucun droit au renouvellement de celui-ci. L’administration n’est pas tenue de mettre l’agent à même de prendre connaissance de son dossier. Peu importe que la décision de ne pas renouveler ce contrat est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur l’aptitude professionnelle de l’agent et, de manière générale, sur sa manière de servir et se trouve ainsi prise en considération de la personne dès lors qu’elle ne présente pas un caractère disciplinaire.

Conseil d’Etat, 5 juin 2009, n° 312135


 Urbanisme - Permis de construire - Déféré préfectoral - Formes de la notification du recours

En application des dispositions de l’article R600-1 du code de l’urbanisme, il appartient à l’auteur d’un recours contentieux dirigé contre une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le code de l’urbanisme d’adresser au greffe de la juridiction où le recours contentieux a été enregistré une copie du certificat de dépôt de la lettre recommandée adressée à l’auteur de la décision contestée et au titulaire de l’autorisation. Il appartient au juge, au besoin d’office, de rejeter le recours comme irrecevable, lorsque son auteur, après y avoir été invité par lui, n’a pas justifié de l’accomplissement des formalités requises.

Conseil d’Etat, 5 juin 2009, n° 313229


 Elections - retrait de liste - retrait des bulletins de vote le jour du scrutin

Aux termes de l’article R55 du code électoral "le candidat ou son mandataire peut, à tout moment, demander le retrait de ses bulletins de vote" à la majorité des candidats de la liste. Un candidat peut faire usage de cette prérogative même s’il n’a pas retiré sa liste dans le délai imparti par les textes. En l’espèce la tête de liste a entamé dès samedi après-midi, veille du second tour, les démarches nécessaires pour procéder régulièrement au retrait de ses bulletins de vote, et ce n’est qu’en raison de l’inaction des services municipaux que ses bulletins ont été déposés dans les bureaux de vote, de sorte que le retrait effectif n’a pu être réalisé que dans la matinée du jour du scrutin, après que la commission de contrôle des opérations électorales eut donné son accord à ce retrait. Dès lors qu’il résulte de l’instruction que la majorité des candidats de la liste souhaitaient effectivement le retrait de leurs bulletins, la circonstance, à la supposer établie, que les mandats donnés par le candidat pour retirer les bulletins dans chacun des bureaux de vote, n’auraient pas été réguliers, est sans incidence sur la régularité du retrait. Peu importe que l’opération de retrait se soit prolongée jusque vers 12h30. Ce retrait tardif, bien qu’il ait eu pour conséquence que des électeurs ont pu voter en début de matinée pour la liste dont les bulletins étaient encore à disposition dans les bureaux de vote, n’a pas constitué, en l’espèce, une manœuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin.

Conseil d’Etat, 5 juin 2009, N° 321898, N° 321918


[1Photo :© Gary Blakeley

[2A dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis, 500 000 francs CFP d’amende, quatre ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité.