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La jurisprudence de la semaine

Semaine du 11 au 15 mai 2009

Retrouvez une sélection de décisions de justice rendues entre le 11 et le 15 mai 2009 et intéressant les collectivités territoriales (dernière mise à jour le : 29/12/2009).


 [1]

Jurisprudence judiciaire

 Blog - Diffamation envers un élu

Se rend coupable de diffamation envers un citoyen chargé d’un mandat public, le syndicaliste qui, sur un blog, laisse très clairement entendre que les questions posées à un concours interne d’agent technique s’apparenteraient à un interrogatoire d’entrée dans la milice. L’auteur du blog porte ainsi atteinte à l’honneur ou à la considération du maire, lequel, sans être directement assimilé à un tortionnaire, l’est pour le moins à un maire qui incite à la délation. En effet "les références à la milice, corps formé sous l’occupation allemande dont la triste mémoire se perpétue de nos jours, constituent un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de celui qu’elles visent".

Cour de cassation, chambre criminelle, 12 mai 2009, N° 08-87467


 Diffamation envers un élu - Emploi fictif - Liberté d’expression

Ne se rend pas coupable de diffamation envers un adjoint au maire, le journaliste qui rédige un article intitulé « emplois fictifs le nec plus ultra pour entretenir ses permanents » dès lors que le contenu de l’article fait apparaître très clairement que l’emploi de l’élu au sein de la Banque de France n’est pas fictif mais qu’il bénéficie de conditions d’emploi avantageuses résultant d’un système réglementaire mis en oeuvre pour les élus depuis de nombreuses années. Les passages poursuivis, écrits sur un ton ironique sans dépasser les limites admissibles en matière de liberté d’expression, révèlent que le travail de l’élu au sein de cet établissement ne lui prend pas trop de temps moyennant un salaire significatif. Le qualificatif « pur » accolé à l’emploi fictif fait seulement comprendre, contrairement aux affirmations de la partie civile, qu’il bénéficie de manière légale, d’un emploi dont la rémunération n’est pas proportionnée au travail fourni, ce qui caractérise un simple jugement de valeur et participe du droit à la libre critique.

Cour de cassation, chambre criminelle, 12 mai 2009, N° 08-84961


 Refus d’insertion de droit de réponse

Se rend coupable de refus d’insertion de droit de réponse, le directeur de publication d’un hebdomadaire qui refuse de publier la réponse du président d’une communauté d’agglomération dont la gestion a été mise en cause dans un article. Pour justifier son refus d’insertion, le journaliste faisait valoir que la demande de droit de réponse manquait de clarté et que l’insertion d’une photographie était réclamée. Le moyen est écarté dès lors que :

1° le texte dont l’insertion était demandée, d’une longueur inférieure à cinquante lignes, était en relation pertinente et suffisante avec l’article incriminé ;

2° la communauté d’agglomération n’a pas expressément sollicité l’insertion du portrait de son président. En effet "à supposer que les quelques mots, mentionnant que la photographie du président de la communauté d’agglomération était jointe, aient pu faire partie de la réponse, il est incontestable que la photographie elle-même n’en faisait pas partie".

Cour de cassation, chambre criminelle, 12 mai 2009, N° 08-85218


Dénonciation calomnieuse - Non lieu - Autorité de la chose jugée

Une plainte pour faux en écriture dirigée contre un fonctionnaire est adressée en copie aux membres du conseil municipal. L’affaire étant classée sans suite, le fonctionnaire visé porte plainte pour diffamation contre l’avocat de la plaignante puis pour dénonciation calomnieuse contre son accusatrice. Les faits de diffamation imputés à l’avocat sont déclarés prescrits par arrêt de la Chambre de l’instruction. S’agissant de la plainte pour dénonciation calomnieuse, les juridictions d’instruction prononcent un non lieu au motif qu’il existe entre les deux poursuites une identité de cause, d’objet et de parties. La Cour de cassation censure cette position dès lors que les deux plaintes ne visent pas la même personne.

Cour de cassation, chambre criminelle, 12 mai 2009, N° 08-85744 et Cour de cassation, chambre criminelle, 12 mai 2009,N° 08-85745


 Discrimination syndicale
Constitue une discrimination syndicale le fait pour un employeur (en l’espèce un OPAC) de :

1° faire croire de manière fallacieuse à une salariée exerçant des fonctions représentatives que son emploi d’agent d’accueil était supprimé

2° d’exercer à son encontre de nombreuses pressions, en raison de sa faible disponibilité pour l’entreprise qui résultait de l’exercice de ses mandats représentatifs ;

Cour de cassation, chambre sociale, 13 mai 2009, N° de pourvoi : 07-45637 07-45690


 Maison de retraite - Mauvais traitements - Non dénonciation

Se rend coupable de non dénonciation de mauvais traitements sur des pensionnaires de maisons de retraite le maire (commune de 800 habitants) qui ne transmets pas aux autorités les signalements qu’il a reçus. La peur d’entacher la réputation de l’établissement, la volonté de préserver une structure qualifiée de « poumon économique de la région », ne peuvent en aucune manière constituer des faits justificatifs.

Cour de cassation, chambre criminelle, 13 mai 2009, N° 08-86820


Jurisprudence administrative

 Police des fouilles archéologiques - Financement

Si les dispositions de la loi validée du 27 septembre 1941 donnent aux services de l’Etat la possibilité de procéder d’office à l’exécution de fouilles archéologiques sur des terrains n’appartenant pas à l’Etat, dans les conditions qu’elles définissent, elles ne leur permettent pas de prescrire au propriétaire d’un terrain la réalisation, à ses frais, de fouilles archéologiques. S’agissant de la détection, de la conservation, de la sauvegarde du patrimoine archéologique ainsi que du contrôle et de l’évaluation d’opérations d’archéologie préventive, qui relèvent d’une mission de police administrative de l’Etat, celui-ci ne peut pas plus, y compris par voie contractuelle, prévoir leur financement total ou partiel par des personnes publiques ou privées. Seules les opérations de diagnostics et de fouilles, de nature économique, ne relèvent pas de ces missions de police administrative et peuvent donc être réalisées et financées par des tiers. Ainsi des conventions prévoyant le financement par une municipalité de l’ensemble des actions de fouilles archéologiques sans exclure celles relevant des missions de police administrative, sont entachées de nullité.

CE 11 mai 2009, n° 296919


 Urbanisme - élaboration d’une carte communale réduisant les espaces agricoles - consultation de la chambre d’agriculture

Dès lors qu’une carte communale approuvée par un conseil municipal comporte une réduction des espaces agricoles au bénéfice des zones nouvellement ouvertes à la construction, la chambre d’agriculture doit préalablement être consultée pour avis à l’occasion de l’élaboration du projet de carte communale. A défaut l’approbation de la carte communale est intervenue à la suite d’une procédure irrégulière [2].

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 12 mai 2009, N° 08BX01091


 Fonction publique - Logement de fonction - Mutation - Commission administrative paritaire

Une mutation comportant obligation de quitter un logement de fonction doit être soumise à l’avis de la commission paritaire.

Conseil d’Etat, 13 mai 2009, n° 309791


 Fonction publique - Droits des organisations syndicales non représentatives

Le décret du 28 mai 1982 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique ne limite pas de façon générale son champ d’application aux seuls syndicats représentatifs et ne pose aucune exigence de représentativité pour accorder aux organisations syndicales les droits qu’il mentionne à ses articles 4, 6, 8, 9, 10, 12, 13 et 15. Une administration ne peut pas réserver aux seules organisations syndicales représentatives de façon générale l’exercice des droits syndicaux.

CE 15 mai 2009, n° 299205


- Pouvoirs de police - liberté du commerce et de l’industrie - Conciliation

« Dès lors que l’exercice de pouvoirs de police administrative est susceptible d’affecter des activités de production, de distribution ou de services, la circonstance que les mesures de police ont pour objectif la protection de l’ordre public n’exonère pas l’autorité investie de ces pouvoirs de police de l’obligation de prendre en compte également la liberté du commerce et de l’industrie et les règles de concurrence (…) Il appartient au juge de l’excès de pouvoir d’apprécier la légalité de ces mesures de police administrative en recherchant si elles ont été prises compte tenu de l’ensemble de ces objectifs et de ces règles et si elles en ont fait, en les combinant, une exacte application ». En l’espèce, en prescrivant, dans un objectif d’amélioration de la sécurité des passagers, de calculer l’effectif minimal de l’équipage en fonction de la capacité maximale du bateau, l’arrêté du 20 décembre 2006 prévoit des mesures nécessaires et proportionnées.

Conseil d’Etat, 15 mai 2009, 311082


 Fonction publique - Sanction disciplinaire - proportionnalité

Est disproportionnée une sanction d’exclusion temporaire de 18 mois prononcée contre un agent d’entretien d’une maison de retraite dès lors que si fautes sont d’une réelle gravité (violence verbale à l’encontre du directeur de l’établissement et destruction volontaire de son téléphone portable de service) elles ont été commises dans un climat de relations très dégradées entre la direction de l’établissement et le personnel et que l’agent n’avait jusqu’ici pas été sanctionné disciplinairement. C’est donc à bon droit que la commission de recours a pu décider qu’une sanction d’exclusion temporaire de 15 jours était suffisante.

Conseil d’Etat, 15 mai 2009, N° 311151


 Elections - sectionnement électoral

Le sectionnement électoral est un acte préparatoire à l’élection dont la légalité peut être contestée à l’appui d’une protestation électorale. Un électeur est, par suite, recevable à contester l’acte par lequel il a été procédé à la division de la commune.

CE 15 mai 2009, n° 317633


 Elections – Lettre présidentielle en faveur d’un candidat

Compte-tenu de l’écart des voies importantes entre les deux listes, une lettre adressée par le Président de la République rendant hommage à l’action du maire sortant et annonçant des engagements de l’Etat en faveur de plusieurs projets menés par la ville n’a pas été de nature à fausser les résultats du scrutin. Si cette lettre a été rendue publique au lendemain du premier tour et a été utilisée par les partisans du maire sortant comme un argument électoral, la liste concurrente a disposé d’un temps suffisant pour y répondre.

Conseil d’Etat, 15 mai 2009, n° 322053


 Elections - Mandataires financiers

Aucune disposition du code électoral ne fait obstacle à ce que les agents des communes exercent les fonctions de mandataire financier des candidats aux élections municipales. Ainsi la seule circonstance que le mandataire financier d’un candidat a la qualité de fonctionnaire de la commune n’est pas constitutive d’une méconnaissance de l’article L. 50 du même code aux termes duquel : "Il est interdit à tout agent de l’autorité publique ou municipale de distribuer des bulletins de vote, professions de foi et circulaires des candidats".

Conseil d’État, 15 mai 2009, N° 322304

[1Photo : © Gary Blakeley

[2Pour un commentaire critique de cet arrêt voir la note de David Gillig, avocat, publiée à la revue de droit rural (revue mensuelle Lexis Nexis) d’octobre 2009