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La jurisprudence de la semaine

Semaine du 30 mars au 3 avril 2009

Retrouvez une sélection de décisions de justice intéressant les collectivités locales rendues entre le 30 mars et le 3 avril 2009 (dernière mise à jour le 24/10/2009).


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Jurisprudence judiciaire

 Responsabilité des élus - injures raciales

Rejet du pourvoi contre l’arrêt de la Cour d’appel de Montpellier du 13 septembre 2007 relaxant le président de la Région Languedoc-Roussillon du chef d’injures raciales (à la suite de ses propos tenus à l’encontre des harkis) :

1° "d’une part, la communauté des harkis ne constitue pas un groupe de personnes entrant dans l’une des catégories limitativement énumérées par l’article 33, alinéa 3, de la loi du 29 juillet 1881" ;

2° "d’autre part, l’interdiction de toute injure envers les harkis posée par l’article 5 de la loi du 23 février 2005 n’est assortie d’aucune sanction pénale".

Cour de cassation chambre criminelle, 31 mars 2009, N° de pourvoi : 07-88021


 Communication du rapport provisoire de la chambre régionale des comptes à des journalistes - violation du secret professionnel ?

La Cour de cassation confirme le non lieu dans le cadre d’une information judiciaire ouverte, sur plainte d’un élu, pour violation du secret professionnel et recel dès lors que l’information n’a pas permis de déterminer qui a transmis au quotidien la copie, découverte lors de la perquisition, du rapport d’observations provisoires de la chambre régionale des comptes de la région. La Cour d’appel avait relevé à cet égard :

 que l’article L. 241-6 du code des juridictions financières ne prévoit pas une classification d’un secret " erga omnes " des documents et communications provisoires comme cela peut exister en matière de défense ;

 qu’il résulte des dépositions de magistrats à la chambre régionale des comptes que les destinataires du rapport d’observations provisoires n’étaient pas tenus au secret professionnel.

Et les juges d’en conclure que le rapport d’observations provisoires a pu être communiqué au quotidien " par une personne non tenue au secret professionnel.

Cour de cassation, chambre criminelle, 31 mars 2009, N° de pourvoi : 07-87662


 Diffamation - Elu visé en raison de ses fonctions au sein d’un parti politique

Lorsqu’un élu est visé par des accusations qui concernent des fonctions qu’il exerce au sein d’un parti politique, il doit porter plainte du chef de diffamation contre une particulier et non pour diffamation envers une personne dépositaire de l’autorité publique. Peu importe que les accusations aient été portées par le chef de file de l’opposition au cours d’une séance du conseil municipal.

Cour de cassation, chambre criminelle, 31 mars 2009, N° de pourvoi : 08-83771


 Fonction publique territoriale - Détachement - Licenciement - Indemnisations

Le statut des fonctionnaires d’Etat interdit le versement au fonctionnaire détaché de toute indemnité de licenciement.

Cour de cassation du 31 mars 2009, n° 08-40137.


 Logement - Chute dans une cage d’ascenseur - Responsabilité du bailleur - Obligation de résultat de l’entreprise chargée de la maintenance

1° Le locataire est garanti pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l’usage, quand même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail. Il n’appartient pas au locataire victime d’une chute dans une cage d’ascenseur de prouver que le bailleur n’avait pas fait le nécessaire pour l’entretien de l’ascenseur. Il lui suffit de démontrer que l’appareil présentait un dysfonctionnement à l’origine de son préjudice.

2° Celui qui est chargé de la maintenance et de l’entretien complet d’un ascenseur est tenu d’une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité

Cour de cassation, chambre civile 3, 1 avril 2009, N° 08-10070


Jurisprudence administrative

 Urbanisme - Permis de construire

"La seule circonstance qu’une construction, sans être pour autant devenue une ruine, est restée inoccupée ou inexploitée pendant une longue période ne peut suffire à l’avoir privée de la destination qui ressort de ses caractéristiques propres".

Cour Administrative d’Appel de Paris, 2 avril 2009, N° 06PA00937


 Urbanisme - Droit de préemption - Délégation

Aux termes du second alinéa de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000, applicable aux décisions de préemption, « toute décision prise par l’une des autorités administratives mentionnées à l’article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ». Méconnait ces dispositions, une décision de préemption qui indique comme signataire le nom du maire de la commune et sa qualité ainsi que la mention « pour le maire empêché l’adjoint délégué » surmontée d’une signature illisible (en marge figure également une mention « pour copie conforme, le Maire » surmontant une autre signature également illisible).

CAA Paris 2 avril 2009, n° 07PA04301 et n° 07PA04769


 Domanialité publique - Occupation temporaire du domaine public- Frais de déplacement des réseaux

En principe le bénéficiaire d’une autorisation d’occupation temporaire du domaine public doit supporter sans indemnité les frais de déplacement de ses installations lorsque ce déplacement est la conséquence de travaux entrepris dans l’intérêt du domaine public occupé et que ces travaux constituent une opération d’aménagement conforme à la destination de ce domaine. Une commune et un opérateur téléphonique ont entendu de façon non équivoque déroger à ce principe en concluant une convention prévoyant que la commune remboursera les dépenses réellement supportées par l’opérateur pour le déplacement des réseaux. L’opérateur n’avait pas à rappeler dans la convention le principe sus-évoqué.

CAA de Bordeaux, 2 avril 2009, n°07BX01960


 Urbanisme - Terrain situé à l’intérieur des parties urbanisées - Certificat d’urbanisme

La circonstance qu’un terrain soit situé à l’intérieur des parties actuellement urbanisées d’une commune n’interdit pas par principe à l’autorité administrative, dès lors qu’une construction sur ce terrain serait de nature à favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, de se fonder sur ce motif pour délivrer un certificat d’urbanisme négatif.

CAA Bordeaux 2 avril 2009, n° 08BX02187


 Urbanisme - Permis de construire - Refus illégal - Responsabilité de la commune

Une commune dont le maire a refusé pour un motif erroné la construction d’une porcherie n’engage pas sa responsabilité dès lors que le refus aurait pu être légalement fondé sur un autre motif.

Cour Administrative d’Appel de Nancy, 2 avril 2009, N° 08NC00298


 Marchés publics - Délégation de service public - Publicité - Non discrimination des opérateurs établis à l’étranger

Le juge des référes ne peut annuler une procédure de mise en concurrence "sans rechercher si, en dépit de leur diffusion limitée sur le plan international, les publications spécialisées retenues (...) ne constituaient pas des supports de référence pour les annonces concernant les procédures de délégation de service public lancées en France dans le domaine du transport public urbain de voyageurs, insusceptible d’échapper à l’attention de l’ensemble des opérateurs raisonnablement vigilants pouvant être intéressés par une telle délégation".

Conseil d’Etat, 1 avril 2009, N° 323585


 Marchés publics - Référé pré-contractuel - Notification des motivations du rejet d’une offre - délai de 15 jours

Il incombe au juge des référés pré-contractuel de rechercher si, eu égard à sa portée et au stade de la procédure auquel il se rapporte, le manquement allégué aux obligations de publicité et de mise en concurrence est susceptible de léser ou d’avoir lésé la société requérante, fût-ce d’une manière indirecte en favorisant une autre entreprise. Le juge des référés ne peut annuler une procédure au motif que le représentant du pouvoir adjudicateur a méconnu le délai de quinze jours imparti par l’article 83 pour répondre à la demande de motivation détaillée du rejet de l’offre présentée par une société sans rechercher si ce manquement avait lésé ladite société ou était susceptible de la léser eu égard à sa portée et au stade de la procédure auquel il se rapporte.

Conseil d’Etat, 1er avril 2009, n°321752


 Marchés publics - Soumission - Contrats conclus par les sociétés d’autoroute titulaires d’une concession - Modification des critères de sélection

1° Les contrats conclus par les sociétés d’autoroutes, elles-mêmes titulaires d’un contrat de concession conclu avec l’Etat ont un caractère de droit public et sont soumis aux dispositions de l’article 11 de la loi du 3 janvier 1991 relative à la transparence et à la régularité des procédures de marchés. La conclusion de ces contrats est ainsi soumise à des obligations de publicité dont le juge des référés du tribunal administratif peut sanctionner la méconnaissance sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative.

2° Un acheteur public ne peut dans son appel d’offres initial proposer aux entreprises candidates deux solutions techniques différentes, avant de n’examiner que les offres correspondant à l’une de ces solutions. En agissant ainsi il modifie les critères de sélection après le dépôt de leurs offres par les candidats. En effet ce changement des critères d’attribution du marché a conduit au choix d’une offre sur la base de critères qui n’avaient pas fait l’objet d’une information appropriée des candidats dès l’engagement de la procédure. Dès lors que ce changement a été de nature à léser l’entreprise requérante et constitue ainsi un manquement aux règles de publicité le juge des référés du tribunal administratif est fondé à annuler la procédure litigieuse.

Conseil d’Etat, 1er avril 2009, n° 315586


  Travaux publics - Réception sans réserve - Appel en garantie des constructeurs

La fin des rapports contractuels entre le maître d’ouvrage et les constructeurs, consécutive à la réception sans réserve d’un marché de travaux publics, fait obstacle à ce que, sauf clause contractuelle contraire, les constructeurs soient ultérieurement appelés en garantie par le maître d’ouvrage pour des dommages dont les tiers demandent réparation.

CAA de Bordeaux, 31 mars 2009, n°07BX01851


 Fonction publique territoriale - Fin de détachement - Réintégration dans commune d’origine

En cas de fin de détachement sur emploi fonctionnel, il appartient à la commune d’origine, en application des dispositions de l’article 67 de la loi du 26 janvier 1984, de réintégrer le fonctionnaire, en le maintenant au besoin en surnombre pendant un an, et par suite d’assurer sa prise en charge financière. Peu importe que la date de la fin de ce détachement marque également la fin du détachement de l’intéressé dans l’emploi fonctionnel de directeur général des services au sein de la collectivité d’accueil. En effet il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune d’origine n’est pas en mesure d’offrir au fonctionnaire un emploi correspondant à son grade, ni que celui-ci ait demandé à la commune d’accueil, comme il était en droit de le faire, le bénéfice des dispositions de l’article 53 de la loi du 26 janvier 1984.

Conseil d’État, 30 mars 2009, N° 306991


 Urbanisme - Immeuble menaçant ruine - Opposition à travaux - Responsabilité de la commune

Engage la responsabilité de la commune le maire qui s’oppose à la réalisation de travaux nécessaires pour éviter l’effondrement d’un immeuble frappé d’un arrêté de péril imminent. Peu importe que le propriétaire conteste en justice la réalité du péril.

Conseil d’Etat, 30 Mars 2009, n° 293498


 Fonction publique territoriale - Fin de détachement - Droit à la réintégration dans la collectivité d’origine

Il appartient à la collectivité d’origine, en application des dispositions de l’article 67 de la loi du 26 janvier 1984, de réintégrer le fonctionnaire à la fin de sa période de détachement au besoin en surnombre pendant un an, et par suite d’assurer sa prise en charge financière. Peu importe que la date de la fin de ce détachement marque également la fin du détachement de l’intéressé dans l’emploi fonctionnel de directeur général des services au sein de la collectivité d’accueil. Il n’est en effet pas démontré que la commune d’origine n’était pas en mesure d’offrir au directeur un emploi correspondant à son grade et que celui-ci ait demandé à la commune d’accueil, comme il était en droit de le faire, le bénéfice des dispositions de l’article 53 de la même loi.

Conseil d’Etat, 30 mars 2009, n° 306991


 Comptabilité et finances publiques - Taxe professionnelle - Délibération de son taux annuel annulée - Conséquences

1° Si en principe la légalité d’un acte administratif s’apprécie compte tenu des circonstances de droit et de fait qui existaient à la date de son intervention, il en va toutefois différemment lorsque cet acte est pris sur le fondement d’un autre acte qui lui est indissolublement lié et que celui-ci est annulé par un jugement postérieur passé en force de chose jugée. Une telle annulation a pour effet de priver rétroactivement de base légale le second acte.

2° Le taux de taxe professionnelle adopté chaque année par les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs groupements est déterminé en fonction du taux arrêté l’année précédente. Il résulte du 1° que l’annulation par le juge administratif d’une délibération fixant le taux de taxe professionnelle au titre d’une année déterminée est de nature à entacher d’illégalité la délibération de l’année qui suit ayant le même objet. Il n’en irait autrement que si la collectivité publique intéressée établissait que le taux fixé par cette délibération n’excédait pas le niveau maximum qui pouvait être légalement fixé en appliquant les modalités prévues au b) du 1 du I de l’article 1636 B sexies du code général des impôts au taux arrêté au titre de l’année précédant celle au titre de laquelle le taux a été annulé.

Conseil d’Etat, 30 mars 2009, n° 301219


 Urbanisme - construction irrégulière - raccordement

Si les dispositions de l’article L. 111-6 du code de l’urbanisme prévoient que les constructions irrégulièrement édifiées ne peuvent être définitivement raccordées au réseau d’électricité, le président du syndicat (prenant une décision dans le cadre de la législation relative au déploiement du réseau électrique sur le territoire, dont le décret du 29 juillet 1927 précise les modalités d’application) n’ est pas tenu de refuser l’extension du réseau au seul motif de l’opposition du maire fondée sur le défaut d’autorisation de la construction.
En effet s’il incombe à l’autorité en charge du réseau de distribution d’électricité dans la zone concernée, lorsqu’elle est saisie d’une demande d’extension du réseau, de prendre en compte l’opposition du maire parmi d’autres éléments d’appréciation d’intérêt général, elle n’est pas tenue, en raison de cette opposition, de refuser de faire droit à la demande.

Conseil d’État, 30 mars 2009, N° 295793


 Marchés publics - Contrat tacite - Responsabilité extra-contractuelle

1° L’existence d’un contrat tacite ne saurait résulter d’une télécopie dépourvue de toute signature, faute de comporter l’expression d’un accord de volonté sur la chose et sur le prix par un représentant du maître d’ouvrage habilité pour engager contractuellement la collectivité.

2° Dans le cas où l’absence de contrat résulte d’une faute de l’administration, le cocontractant de l’administration peut prétendre non seulement au remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à l’administration mais également à la réparation du dommage imputable à cette faute et, le cas échéant, demander à ce titre, une indemnité égale au montant du bénéfice dont il a été privé par l’inexistence du contrat (sous réserve du partage de responsabilité découlant de ses propres fautes, si, toutefois, le remboursement de ses dépenses utiles ne lui assure pas une rémunération supérieure à celle à laquelle il aurait eu droit en application d’un contrat régulièrement formé).

CAA Paris, 30 mars 2009, n° 07PA00489

[1Photo : © Gary Blakeley