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La jurisprudence de la semaine

Semaine du 12 au 16 janvier 2009

Retrouvez une sélection de décisions de justice intéressant les collectivités locales rendues entre le 12 et le 16 janvier 2009 (dernière mise à jour le 11 juin 2009). [1]

Jurisprudence judiciaire

Urbanisme – Travaux d’affouillement sans autorisation – Arrêté d’interruption des travaux – Pouvoirs du juge pénal – Exploitation agricole

1° Si l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme donne compétence exclusive au juge administratif pour apprécier la légalité d’un permis de construire, il appartient au juge pénal, devant lequel les dispositions de ce texte sont invoquées, de s’assurer de l’existence d’un permis exprès ou tacite, ainsi que de la conformité des travaux litigieux aux prescriptions de l’autorisation.

2° Un pisciculteur ne peut se prévaloir de sa qualité d’agriculteur pour effectuer des travaux d’affouillement et d’exhaussement du sol sans autorisation (en l’espèce travaux de terrassement pour la création d’un plan d’eau), dès lors qu’il n’a pas été autorisé à exercer une telle activité sur la commune (c’est dans le cadre d’un projet d’agrandissement de son exploitation agricole, que le pisciculteur avait acquis un terrain sur une commune voisine et avait entrepris les travaux litigieux). En effet l’exploitation piscicole, pour laquelle le prévenu avait entrepris des travaux, était distincte de celle qui, située sur le territoire de sa commune d’origine, avait reçu l’agrément de l’administration au titre de la réglementation sur la pêche.

Cour de cassation, chambre criminelle, 13 janvier 2009, N° de pourvoi : 08-82422


Urbanisme – Constructions liées aux besoins d’une exploitation agricole – reconstruction à l’identique – changement de destination

Se rend coupable de construction sans permis de construire un particulier qui, ayant obtenu un permis de construire l’autorisant à agrandir de 26 m² un bâtiment de 93 m² situé sur un terrain aclassé en zone ND du plan d’occupation des sols de la commune de Cuers (Var), où ne sont autorisées que les constructions liées aux besoins d’une exploitation agricole, fait démolir l’existant et construit une maison d’habitation d’une surface de 119 m². D’une part une reconstruction, fût-ce à l’identique, nécessitait un nouveau permis et , d’autre part, le bâtiment édifié était sans rapport avec une exploitation agricole.

Cour de cassation chambre criminelle, 13 janvier 2009, N° de pourvoi : 08-86216


Urbanisme – Construction sans permis de construire – Abri de jardin

Se rendent coupable de construction sans autorisation un particulier et une SCI qui ont érigé sans autorisation, sur une parcelle où le plan d’occupation des sols interdisait toute construction autre que celle d’équipements d’utilité et d’intérêt publics, un abri de jardin en bois de 50 m² fixé sur une dalle. Les prévenus sont également condamnés pour avoir, alors qu’ils avaient obtenu une autorisation de réfection de la façade et de la toiture d’un second bâtiment, répertorié par la commune comme cabanon, entièrement démoli celui-ci avant de le reconstruire sur une dalle surélevée et avec une superficie supérieure, les travaux comportant en outre la fermeture d’une partie de la construction anciennement ouverte. Ces travaux constituent un changement de destination du cabanon en logement.

Cour de cassation, chambre criminelle, 13 janvier 2009, N° de pourvoi : 08-85246


Jurisprudence administrative

 Action sociale - Assistante maternelle - Retrait d’agrément

"Il appartient à l’administration d’établir que la personne titulaire de l’agrément ne satisfait pas, à la date de la décision de retrait, aux conditions auxquelles la délivrance de l’agrément est subordonnée". Le président d’un Conseil général ne peut retirer un agrément sur la foi des seules déclarations d’une enfant accusant le compagnon d’une assistante maternelle d’attouchements. Il tient simplement des dispositions du code de l’action sociale et des familles le pouvoir de prolonger la suspension de l’assistante le temps nécessaire pour qu’une enquête administrative détermine si l’accueil d’enfants au domicile de l’assistante maternelle présente le moindre risque.

CAA Versailles, 15 janvier 2009, N° 07VE01296


 Urbanisme - retrait d’un permis de construire illégal - Contrôle de la légalité - Faute lourde - Responsabilité de l’Etat

Ne constitue pas une faute lourde de nature à engager la responsabilité de l’Etat dans l’exercice de sa mission de contrôle de la légalité des actes des collectivités territoriales, la circonstance que le préfet n’ait pas déféré le retrait d’un permis de construire. Peu importe que le dit retrait ait été ultérieurement annulé par le juge administratif. Ne constitue pas plus une faute lourde la circonstance que le représentant de l’Etat n’ait pas répondu favorablement aux diverses demandes des requérants tendant notamment à ce qu’il soit enjoint à la commune de supprimer l’emplacement réservé institué par le plan d’occupation des sols sur les parcelles leur appartenant.

CAA de Versailles 15 janvier 2009, n° 06VE00363


 Fonction publique territoriale - Renouvellement de CDD

Des renouvellements successifs des contrats à durée déterminée dont a bénéficié un agent, à supposer même que lesdits contrats soient irréguliers, ne sont pas de nature à justifier la requalification de ces contrats en contrat à durée indéterminée. Peu importe, dans ces conditions, que l’évolution du contrat emploi solidarité dont l’agent a bénéficié en contrat à durée déterminée n’aurait pas fait l’objet d’une décision particulière, qu’il occupait des fonctions qui auraient dû l’être par un fonctionnaire, que les visas des divers contrats seraient insuffisants et que le délai de préavis de dénonciation du dernier contrat dont il a bénéficié n’aurait pas été respecté.

CAA de Marseille, 13 janvier 2009, n°06MA02889


 Fonction publique territoriale - Détachement - Procédure

L’avis de la commission administrative paritaire compétente est nécessaire non seulement pour tout détachement mais également pour tout renouvellement (articles 2, 3 et 27 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions des fonctionnaires territoriaux). Il appartient néanmoins au réquerant d’établir que cette que cette illégalité fautive de l’administration est à l’origine des préjudices qu’il invoque.

CAA de Marseille, 13 janvier 2009, n°06MA01028


 Fonction publique territoriale - Avancement de grade

"L’avancement de grade dans la fonction publique se fait « au choix » et (...) le grade détenu statutairement est distinct de l’emploi occupé par un fonctionnaire". Dès lors la circonstance qu’un fonctionnaire "avait vocation à être promu au grade de directeur de préfecture ne lui confère aucun droit à obtenir la dite promotion". Peu importe également que le fonctionnaire occupe un emploi de chef de service des moyens et de la logistique qui comporterait des effectifs et des responsabilités similaires avec celles des autres directions de la préfecture.

CAA de Marseille, 13 janvier 2009, n°05MA02212


 Captage d’eau en amont d’une usine hydroélectrique - Perte de puissance hydraulique - Responsabilité de la commune et d’un syndicat intercommunal

Une papeterie exploitant une usine hydroélectrique alimentée par un torrent ne peut ulilement rechercher la responsabilité d’une commune et d’un syndicat intercommunal ayant procédé en amont à des captages d’eau, faute pour la société requérante d’avoir mis en place un enregistreur de débit rendue obligatoire par l’article 12 de la loi du 3 janvier 1992 sur l’eau et qui est seul susceptible d’établir la réalité d’une perte de puissance hydraulique.

Conseil d’Etat du 12 Janvier 2009, n°308455, 308546


Jurisprudence européenne

 Association étrangère - Capacité d’agir en justice en France

Deux associations islamiques saoudiennes qui s’estimaient diffamées par un article relatif aux attentats du 11 septembre 2001 avaient porté plainte en France pour diffamation. Les plaintes avaient été déclarées irrecevables par la justice française, faute pour les associations d’avoir
été déclarées auprès de la préfecture du siège de leur principal établissement comme l’exige l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901. Pour la Cour de cassation en effet "si toute personne morale qui se prétend victime d’une infraction est habilitée à se constituer partie civile devant la juridiction répressive, ce droit, qui s’exerce dans les conditions prévues par l’article 2 du code de procédure pénale, requiert, s’agissant d’une association, qu’elle remplisse les formalités exigées par l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901, auxquelles toute association, française ou étrangère, doit se soumettre pour obtenir la capacité d’ester en justice".
Cette position est censurée par la Cour européenne des droits de l’homme : "qu’en exigeant la déclaration prévue à l’article 5 de la loi de 1901 pour une association étrangère n’ayant pas de " principal établissement " en France et souhaitant introduire une action en diffamation afin de lui permettre d’ester en justice, les autorités françaises n’ont pas seulement sanctionné l’inobservation d’une simple formalité nécessaire à la protection de l’ordre public et des tiers, comme le soutient le gouvernement. Elles ont aussi imposé aux requérantes une véritable restriction, au demeurant non suffisamment prévisible, qui porte atteinte à la substance même de leur droit d’accès à un tribunal, de sorte qu’il y a eu violation de l’article 6 de la Convention".

Cour européenne des Droits de l’Homme, 15 janvier 2009, n°36497/05

[1Crédits photos : ©Gary Blakeley