Jurisprudence judiciaire
– Ressources humaines - Harcèlement moral - Dénonciation calomnieuse
Pour être constitué le délit de dénonciation calomnieuse suppose qu’il soit prouvé que le délateur connaissait au moment de la dénonciation la fausseté des faits dénoncés. La simple constatation que les faits dénoncés sont en partie inexacts est insuffisante.
Cass crim 17 février 2009, N° de pourvoi : 08-85308
– Marchés publics - Responsabilité des élus - Prise illégale d’intérêts
Condamnation pour prise illégale d’intérêts et faux en écriture d’un maire (commune de 7 000 habitants) pour avoir attribué un marché municipal à l’entreprise de son fils et pour avoir établi des certificats faisant état de faits matériellement inexacts. L’élu est condamné à quatre mois de prison avec sursis et 10 000 euros d’amende.
Tribunal correctionnel de Nice 20 février 2009, n° de jugement 724/09
– Urbanisme - Santé publique - Principe de précaution - Antenne relai de téléphonie mobile
Condamnation d’un opérateur de téléphonie mobile à retirer une antenne relai sur plainte de riverains qui invoquaient un trouble de voisinage :
1° Le respect par l’opérateur des dispositions légales n’exclut pas l’existence de troubles anormaux de voisinage ;
2° "Compte tenu des incertitudes scientifiques encore existantes (...)
aucun élément ne permet à présent au tribunal d’écarter de prime abord l’éventualité d’un impact dommageable des ondes (...) sur la santé des personnes soumises à leur exposition (...) D’ailleurs l’existence d’un tel risque sanitaire a été explicitement pris en compte par le maire (...) qui a souscrit à la déclaration de travaux du pylone (...) en considérant qu’il était nécessaire de retirer les antennes de téléphonie mobile du centre du village "afin de protéger la population résidente à proximité des antennes actuelles". Ainsi, l’implantation de la nouvelle installation, à proximité de l’habitation [des réquérants], ne pouvait qu’engendrer à leur égard un danger comparable à celui auquel étaient précédemment soumis les habitants de l’agglomération (...). Le principe de précaution mis en exergue par le maire vaut poru tous ses administrés, sans distinction de localisation, en ville comme à la campagne".
3° Le pylone, d’une hauteur de 20 mètres et distant de l’habitation des requérants de 135 mètres, entrave la vue de ceux-ci sur l’espace naturel ouvert que constitue le vignoble et excède les désagréments auxquels ils pouvaient s’attendre.
TGI Carpentras 16 février 2009 n°08/00707
Jursiprudence administrative
– Fonction publique - Sanctions disciplinaires - Amnistie - Laïcité - Prosélytisme religieux - manquement à l’honneur professionnel
Les actes de prosélytisme religieux (en l’espèce remise par un guichetier de La Poste d’imprimés à caractère religieux) sont assimilés à un manquement à l’honneur professionnel et ne se sont donc pas couverts par la loi d’amnistie du 6 août 2002. En effet aux termes de l’article 11 de cette loi : « sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l’amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à l’honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs (...) ».
Conseil d’Etat, 19 février 2009, n° 311633
– Responsabilité administrative - accident de ski - nature de la piste - Service industriel et commercial - compétence des juridictions judiciaires
"L’exploitation des pistes de ski, incluant notamment leur entretien et leur sécurité, constitue un service public industriel et commercial, même lorsque la station de ski est exploitée en régie directe par la commune". Ainsi "en raison de la nature juridique des liens existant entre les services publics industriels et commerciaux et leurs usagers, lesquels sont des liens de droit privé, les tribunaux judiciaires sont seuls compétents pour connaître d’un litige opposant une victime à une commune en sa qualité d’exploitant de la station, que la responsabilité de l’exploitant soit engagée pour faute ou sans faute"
Conseil d’Etat 19 février 2009, n°293020
– Fonction publique territoriale - Autorisation d’absence
"A la différence des décharges d’activité de service prévues aux articles 16 et suivants du décret (...) du 3 avril 1985, les autorisations spéciales d’absence prévues aux articles 12 et suivants du même décret ont pour seul objet de permettre aux représentants des organisations syndicales, mandatés pour y assister, de se rendre aux congrès syndicaux ou aux réunions des organismes directeurs dont ils sont membres élus (...) Sur la demande de l’agent justifiant d’une convocation à l’une de ces réunions et présentée à l’avance dans un délai raisonnable, l’administration doit, dans la limite du contingent éventuellement applicable, accorder cette autorisation en l’absence d’un motif s’y opposant tiré des nécessités du service, qui ne saurait être utilisé pour faire obstacle à l’exercice de la liberté syndicale, laquelle constitue une liberté fondamentale"
Conseil d’Etat, 19 février 2009, n°324864
– Domanialité - Domaine privé - Litiges - Compétence des juridictions administratives (non)
Relève de la compétence des juridictions judiciaires le litige opposant un particulier à une commune sur la gestion d’un bien du domaine privé de ladite commune (moulin en état d’abandon sur un cours d’eau non navigable)
CAA Bordeaux, 19 février 2009, n°08BX00266
Dommages de travaux publics - enrochements - atteintes de la mer
"En l’absence de dispositions législatives ou réglementaires les y contraignant, les communes n’ont pas l’obligation d’assurer la protection des propriétés privées contres les atteintes de la mer ; (...) il ressort au contraire des articles 33 et 34 de la loi du 16 septembre 1807 que cette protection incombe aux propriétaires intéressés ; (...) toutefois, la responsabilité des collectivités publiques peut être engagée lorsque les dommages subis ont été provoqués ou aggravés par l’existence ou le mauvais état d’entretien d’ouvrages publics. Tel n’est pas le cas en l’espèce dès lors que les dommages causés à la propriété du réquerant "résultent de la dynamique de sédimentation, de l’érosion du littoral, de l’exposition à la direction des vents dominants et à la houle, d’une hauteur exceptionnelle de marée et de prélèvements abusifs et répétés de sable sur les plages avoisinantes". Si les enrochements de protection dont la commune était maître d’ouvrage se sont révélés insuffisants pour remplir leur office, aucun de ces ouvrages n’a provoqué ou aggravé les dommages subis par la propriété du requérant.
CAA Bordeaux, 19 février 2009, n°07BX01793
– Urbanisme - Permis de construire- Desserte dangereuse
N’est pas entaché d’erreur manifeste d’appréciation le permis de construire délivré par un maire dès lors qu’il ressort des pièces du dossier que la construction projetée est desservie par une voie privée d’une largeur d’environ quatre mètres débouchant en ligne droite sur une voie publique : d’une part les risques d’affaissement de la voie et de projection de pierres sur les propriétés voisines, du fait de la circulation sur ce chemin, ne sont pas établis ; d’autre part les requérants ne démontrent pas que les conditions de desserte du projet entraineraient des risques pour les usagers de cette voie ou de la voie publique sur laquelle elle débouche, en raison d’une visibilité insuffisante.
CAA de Bordeaux, 19 février 2009 , n°07BX02130
– Urbanisme - Permis de construire - Refus illégal - responsabilité de l’EPCI
Engage sa responsabilité pour refus illégal d’un permis de construire une communauté urbaine dès lors que c’est elle qui, par convention passée avec la commune, a la responsabilité de l’ensemble de la procédure d’instruction des dossiers de permis de construire. Peu importe que cette convention stipule que des agents de la communauté urbaine disposent, pour son exécution, d’une délégation de signature du maire.
Conseil d’État, 18 février 2009, N° 290961
Urbanisme - Remembrement - Divergences entre le plan adopté en mairie et le plan adopté par la commission départementale - Pouvoirs du préfet
Aucune disposition législative ou réglementaire ne confère au préfet le pouvoir de modifier le plan résultant des décisions des commissions d’aménagement foncier. Ainsi, lorsque les limites figurant sur le plan déposé en mairie transcrivent exactement l’emprise existante d’une voie publique tandis que celles figurant sur le plan adopté par la commission départementale entraîneraient, par l’effet d’une erreur matérielle, un empiètement de la parcelle en cause sur cette même emprise (de sorte qu’un transfert de propriété conformément à ces limites méconnaîtrait les principes d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité des biens des personnes publiques relevant du domaine public), il appartient seulement au préfet de "saisir la commission départementale d’aménagement foncier d’une demande tendant à la rectification du plan et, le cas échéant, au réexamen des attributions des propriétaires des parcelles concernées par l’erreur avant de déférer, éventuellement, au juge de l’excès de pouvoir le refus de la commission de procéder à cette rectification". Dans l’attente de la décision de la commission départementale d’aménagement foncier, le préfet doit seulement surseoir au dépôt en mairie du plan de remembrement.
Conseil d’Etat, 18 Février 2009, n°286267
– Elections - Casier judiciaire - Incapacités électorales
1° Il résulte des dispositions de l’article 775-1 du code de procédure pénale "que l’exclusion de la mention d’une condamnation au bulletin n° 2 du casier judiciaire n’emporte relèvement des interdictions, déchéances ou incapacités que lorsque celles-ci résultent de plein droit de la condamnation prononcée, et non d’une peine complémentaire".
2° Doit non seulement être déclaré nul le bulletin de l’électeur concerné mais également celui qu’il a exprimé pour le compte de sa fille (en effet il résulte de l’article L. 72 du code électoral que le mandataire d’un électeur ne peut régulièrement voter pour le compte de ce dernier que s’il jouit de ses droits électoraux).
3° "Lorsqu’il est impossible de déterminer sur quelle liste s’est portée la voix à retrancher ou à ajouter aux suffrages exprimés, le juge de l’élection procède au calcul des résultats qui seraient constatés dans chacune des hypothèses, en vérifiant si la liste arrivée en tête conserve la majorité des suffrages".
Conseil d’Etat, 18 février 2009, n° 318623
– Urbanisme - Pouvoirs de police - PV d’abandon manifeste - Possibilité de recours
"Les procès-verbaux « provisoires » et les procès-verbaux « définitifs » par lesquels le maire constate l’état d’abandon manifeste d’une parcelle, ne constituent que de simples mesures préparatoires à la décision éventuelle du conseil municipal de déclarer cette parcelle en l’état d’abandon manifeste et de procéder à son expropriation (...). Ces procès-verbaux ne portent par eux-même aucune atteinte directe au droit de propriété de leurs destinataires, garanti par le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (...). Les irrégularités dont ils seraient entachés ne peuvent être invoquées qu’à l’appui des recours dirigés contre la décision du conseil municipal une fois cette dernière intervenue
Conseil d’Etat, 18 février 2009, n° 301466
– Elections - Inéligibilité
"Aux termes de l’article L. 231 du code électoral : « (...) Ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois : (...)/ 7° Les directeurs et les chefs de bureau de préfecture et les secrétaires en chef de sous-préfecture (...) ». Tel est le cas d’un attaché territorial principal qui occupait, à la date de son élection, les fonctions de chef du pôle juridique de la préfecture et disposait ainsi d’une délégation de signature du préfet. En effet "compte tenu de son niveau hiérarchique et des responsabilités attachées à son poste, il occupait des fonctions équivalentes à celles de chef de bureau". Peu importe "que, compte tenu notamment d’une décharge d’activité à titre syndical, il effectuerait en pratique des tâches essentiellement matérielles".
Conseil d’Etat, 18 février 2009, n°317562
Jurisprudence communautaire
– Environnement - OGM - Information du public et sécurité des exploitations
L’information relative au lieu de dissémination d’OGM ne saurait rester confidentielle. En effet le public intéressé peut demander la communication de toute information transmise par le notifiant dans le cadre du processus d’autorisation relatif à une telle dissémination. Dans ces conditions un maire ne peut, même par souci d’assurer la sécurité des exploitations, refuser de communiquer à un particulier la fiche d’implantation, qui permet de localiser la parcelle complantée.
[1] Crédits photos : © Gary Blakeley