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La jurisprudence de la semaine

Semaine du 2 au 6 février 2009

Retrouvez une sélection de jurisprudences intéressant les collectivités locales rendues entre le 2 et le 6 février 2009 (dernière mise à jour le 20 août 2009)) [1]

Jurisprudence judiciaire

 Ressources humaines - discrimination syndicale - Prescription - Eléments de comparaison

Si la prescription trentenaire interdit la prise en compte de faits de discrimination couverts par elle, elle n’interdit pas au juge, pour apprécier la réalité de la discrimination subie au cours de la période non prescrite, de procéder à des comparaisons avec d’autres salariés engagés dans des conditions identiques de diplôme et de qualification à la même date que l’intéressé, celle-ci fut-elle antérieure à la période non prescrite.

Cour de cassation, chambre sociale, 4 février 2009, N° de pourvoi : 07-42697


  Délits de presse - Diffamation - Juridiction territorialement compétente

Le délit de diffamation perpétré par la voie de la presse écrite est réputé commis partout où l’écrit a été publié. La publicité est réalisée par la diffusion d’un journal à ses abonnés, en quelque lieu qu’ils se trouvent.

Encourt la censure l’arrêt qui, pour faire droit à l’exception d’incompétence territoriale soulevée par le prévenu, énonce que rien ne permet d’affirmer que le journal contenant les propos diffamatoires a été effectivement distribué aux deux abonnés demeurant dans le ressort du tribunal saisi.

Cour de cassation, chambre criminelle, 3 février 2009
N° de pourvoi : 08-82375


 Santé publique - principe de précaution - Antennes de téléphonie mobile

Condamnation d’un opérateur de téléphonie mobile à retirer une antenne-relai de téléphonie mobile bien que les normes françaises aient été respectées : "si la réalisation du risque reste hypothétique, il ressort de la lecture des contributions et publications scientifiques produites aux débats et des positions législatives divergentes entre les pays, que l’incertitude sur l’innocuité d’une exposition aux ondes émises par les antennes relais, demeure et qu’elle peut être qualifiée de sérieuse et raisonnable"

Cour d’appel de Versailles, 14ème chambre, 4 février 2009 n° 08/08775


 Urbanisme - Préemption - Discrimination

Relaxe du maire d’une commune de l’Isère (8000 habitants) poursuivi pour usage discriminatoire du droit de préemption afin d’empêcher un couple d’origine maghrébine de se porter acquéreur d’un logement sur la commune. La Cour de cassation avait annulé la condamnation pour des motifs de droit. La Cour d’appel de renvoi prononce la relaxe sur des considérations de fait : « aucun élément concret ne permet (...) d’affirmer que la consonance étrangère du nom des acquéreurs ait été évoquée par des membres de l’exécutif et de l’administration communale, avant, pendant, ou après la déclaration d’intention d’aliéner et l’exercice du droit de préemption » ;

Cour d’appel de Lyon 4 février 2009 n°46


Jurisprudence administrative

 Elections - Modes de preuve - Mise à disposition de vidéo

1° Un film vidéo peut utilement être produit à l’appui d’une requête en annulation d’un scrutin. Il "appartient seulement au tribunal administratif, une fois ces pièces enregistrées, de les tenir à la disposition des parties de sorte que celles-ci soient à même, si elles l’estiment utile, d’en prendre connaissance".

2° Aux termes des dispositions du deuxième alinéa de l’article R. 63 du code électoral : « Les tables sur lesquelles s’effectue le dépouillement sont disposées de telle sorte que les électeurs puissent circuler autour ». Tel n’était pas le cas en l’espèce dès lors "qu’il résulte de l’instruction que l’emplacement où se situaient les tables de dépouillements des deux bureaux de vote de la commune (...) était délimité par une structure de barrières amovibles, que les deux accès ménagés vers les tables de dépouillement étaient entravés par des tables et que les électeurs n’étaient pas tous admis à pénétrer dans l’espace ainsi délimité".

Conseil d’Etat, 6 février 2009, n°317504


 Maitrise d’ouvrages publics - Réception tacite

Dès lors qu’un maître d’ouvrage a manifesté clairement et publiquement son refus de procéder à la réception de l’ouvrage à l’occasion d’une réunion organisée avec l’ensemble des intervenants concernés, l’absence d’information postérieure de la part du maitre d’ouvrage délégué n’a pu valoir réception tacite de l’ouvrage en application d’un article du CCAG Travaux (selon lequel à défaut de décision de la personne responsable du marché notifiée dans les 45 jours, les propositions du maître d’oeuvre sont considérées comme acceptées).

Conseil d’Etat, 6 février 2009, n°294214


 Domanialité publique - Autorisation d’occupation

Si les autorisations d’occupation du domaine public doivent en principe être délivrées pour une durée déterminée, ainsi que le rappelle l’article L. 2122-2 du code général de la propriété des personnes publiques, la seule circonstance qu’une convention ne conférant pas de droits réels à l’occupant du domaine public ne contient aucune précision relative à sa durée n’est pas de nature à entacher celle-ci de nullité. En effet "dans le silence sur ce point de la convention, le principe d’inaliénabilité du domaine public, qui s’applique sauf texte législatif contraire, implique que l’autorité gestionnaire du domaine peut mettre fin à tout moment, sous réserve de justifier cette décision par un motif d’intérêt général, à l’autorisation d’occupation qu’elle a consentie".

Conseil d’Etat, 5 février 2009, n°305021


  Fiscalité locale - Taxe foncière - Assiette - Vente d’un immeuble au rabais - Subvention

Constitue une subvention au sens de l’article 1499 du code général des impôts (et non un réduction du prix de vente) un rabais sur le prix d’un immeuble consenti par un syndicat intercommunal en contrepartie de l’engagement de l’acquéreur de créer et maintenir 500 emplois sur le site pendant 12 ans. C’est donc la valeur d’origine de l’immeuble (avant déduction du rabais) qui doit servir d’assiette au calcul de la taxe foncière.

Conseil d’Etat, 5 février 2009 n° 291627


 Comptabilité et finances locales - Taxe d’assainissement - Raccordement au réseau

1° La somme mise à la charge des propriétaires par l’article L. 1331-8 du code de la santé publique "a le caractère d’une contribution imposée dans l’intérêt de la salubrité publique à quiconque ayant la possibilité de relier son immeuble à un réseau [collectif] néglige de le faire (...). Cette contribution, dont le tarif est fonction du montant de la redevance d’assainissement fixée par l’organe délibérant de la collectivité territoriale chargée du service de l’assainissement en vertu des articles L. 2224-12 et R. 2333-121 et suivants du code général des collectivités territoriales et dont le produit est perçu par cette collectivité, constitue un impôt local au sens de l’article R. 222-13 du code de justice administrative".

2° "Il résulte des dispositions des articles L. 1331-1 et L. 1331-4 du code de la santé publique que les propriétaires doivent dans un délai de deux ans suivant la mise en service du réseau public de collecte des eaux usées se raccorder à ce réseau". Peu importe que le syndicat mixte n’avait encore réalisé les travaux qui lui incombaient : cette circonstance ne permet pas au propriétaire de refuser de procéder aux travaux nécessaires au raccordement de son habitation à ce réseau et dont il avait la charge dans le délai qui lui était imparti dès lors que le règlement ne comporte aucune disposition impérative imposant à l’établissement public de réaliser cette installation avant les travaux incombant aux particuliers et qu’il n’interdit pas de tels travaux avant cette installation".

Conseil d’Etat, 5 février 2009, n°306045


 Fonction publique territoriale - Mise en disponibilité - Réintégration

1° Le fonctionnaire placé en disponinibilité pour convenances personnelles et qui sollicite sa réintégration ne peut demander à « être maintenu en surnombre » et ne peut se prévaloir de la règle selon laquelle « tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ou l’établissement lui est proposé en priorité » ;

2° Le fonctionnaire territorial mis en disponibilité sur sa demande, qui n’a pas rompu le lien qui l’unit à son corps, a le droit, sous réserve de la vacance d’un emploi correspondant à son grade, d’obtenir sa réintégration avant le terme de la période de disponibilité.

CAA de Bordeaux, 5 février 2009, n°07BX00268


 Délégation de service public - Respect par les candidats des obligations d’emploi des travailleurs handicapés

1° "Les collectivités publiques qui se proposent de conclure une délégation de service public doivent s’assurer que les sociétés candidates sont en situation régulière au regard de leur obligation d’emploi de travailleurs handicapés". Pour autant le juge de référés ne peut en déduire une atteinte aux de publicité et de mise en concurrence sans "rechercher si ce manquement, eu égard à sa portée et au stade de la procédure auquel il se rapportait, avait lésé [un candidat] ou était susceptible de [le] léser" ;

2° "Le cahier des charges peut comporter des informations plus détaillées que les informations essentielles contenues dans l’avis d’appel à la concurrence, sous la seule réserve de ne pas faire apparaître une prestation à exécuter différente de celle résultant de l’avis d’appel à la concurrence" ;

Conseil d’Etat, 4 février 2009, n°311949


 Délégation de service public ou marché public - Référé précontractuel - Ambiguïtés sur la nature du contrat - date de signature du contrat - durée excessive de la DSP - Pouvoir de négociation

1° "Il appartient au juge des référés précontractuels de rechercher si l’entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l’avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente".

2° "Si le texte de l’avis paru au bulletin officiel des annonces des marchés publics, issu du formulaire électronique type, fait apparaître en raison de la conception de ce dernier la mention « marché » dans l’intitulé et le contenu d’une de ses rubriques, toutefois, les mentions « délégation de service public » et « concession », qui apparaissent neuf fois dans cet avis, dont une fois dans le titre, ainsi que la référence explicite aux articles L. 1411-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, sont de nature à exclure toute ambiguïté quant à la nature du contrat pour les candidats potentiels" ;

3° "Aucune règle applicable n’impose à une collectivité qui se propose de passer une délégation de service public de faire connaître la date prévue pour la signature du contrat" ;

4° Une collectivité peut "indiquer les durées potentielles de la délégation au regard desquelles s’exerce la concurrence, à condition il est vrai que ces potentialités n’induisent pas une incertitude telle qu’elle puisse empêcher des entreprises de présenter utilement leurs offres. En affichant une durée de la convention comprise entre 20 et 25 ans, la collectivité publique n’a ni introduit d’incertitude, ni imposé un durée excessive ;

5° "En vertu de l’article 38 de la loi du 29 janvier 1993 l’autorité responsable de la personne publique délégante choisit librement, au vu des offres présentées, celui ou ceux des candidats admis à présenter une offre avec qui elle entend mener des négociations"

Conseil d’Etat, 4 février 2009, n°312411


 Marchés publics - Mobilier urbain - Méconnaissance de normes techniques d’accessibilité

"En vertu du 6° de l’article 1er de l’arrêté du 15 janvier 2007, pris en application du décret du 21 décembre 2006 relatif aux prescriptions techniques pour l’accessibilité de la voirie et des espaces publics, et visant à faciliter la détection par les malvoyants des mobiliers urbains sur panneaux ou sur pieds, ces mobiliers doivent ménager un passage libre d’au moins 2,20 m de hauteur ou, à défaut être rappelés par un élément bas se situant au maximum à 0,40 m du sol (...) Dès lors, et en l’absence d’impossibilité technique dûment constatée, en exigeant, dans le cahier des clauses techniques particulières du marché, que le mobiliers d’informations de 2 m2 comportent une hauteur sous le bas du caisson de 0,50 m minimum, la commune a méconnu de telles prescriptions". Un candidat qui a dû réviser les cotes de ses panneaux conformes à la réglementation en vigueur est en conséquence fondé à demander l’annulation de la procédure.

Conseil d’Etat, 4 février 2009, n°311344


 Fonction publique territoriale - Avancement d’échelon et promotion de grade

1° L’arrêté par lequel un maire réintègre un agent dans les effectifs de la collectivité et procède à la reconstitution de sa carrière ne refuse pas à l’intéressé un avantage dont l’attribution constitue un droit. Il ne présente pas le caractère d’une décision individuelle défavorable au sens de l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et n’est donc pas au nombre des décisions soumises à l’obligation de motivation.

2° Les dispositions de l’article 30 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 selon lesquelles « le temps passé (...) en congé de longue durée (...) est valable pour l’avancement à l’ancienneté et entre en ligne de compte dans le minimum de temps valable pour pouvoir prétendre au grade supérieur », "n’imposent aucunement à l’autorité territoriale de retenir l’avancement d’échelon à la durée minimale, lequel n’est pas un droit mais peut seulement, conformément à l’article 78 de la loi susvisée du 26 janvier 1984, être accordé au fonctionnaire dont la valeur professionnelle le justifie".

CAA de Nancy du 4 février 2009, n° 08NC00065.


 Fonction publique territoriale - Frais de déplacement - Pouvoirs du chef de service

S’il appartient à un chef de service d’organiser le remboursement des frais de déplacement en fonction des crédits dont il dispose, il ne saurait faire supporter à un agent les frais d’utilisation de son véhicule personnel exposés par nécessité de service.

CAA de Bordeaux, 3 février 2009, n°07BX01596


 Dommages de travaux publics - Voirie - Accotements

1° "Les accotements des voies publiques ne sont pas normalement destinés à la circulation et que l’administration n’est pas tenue de signaler aux usagers les dangers qu’ils courent en les empruntant" ;

2° "la circulation sur l’accotement ne saurait être exceptionnellement justifiée que par la nécessité démontrée de permettre un croisement avec un autre véhicule dans le cas où ce dernier, notamment en raison de l’étroitesse de la voie, exige qu’avec toutes les précautions utiles, l’un des véhicules empiète sur cet accotement".

En conséquence, un département ne saurait être jugé responsable des dommages de pollution causé par un ensemble routier dont le fuel s’est déversé dans un étang dès lors qu’il résulte de l’instruction que la largeur de la route départementale sur la section de la route où s’est produit l’accident était de 5,20 mètres et que cette section était normalement entretenue et comportait des virages signalés et un accotement non stabilisé.

Cour administrative d’appel de Bordeaux, 3 février 2009, N° 07BX01558


 Dommages de travaux publics - Eboulis - accident de la circulation

Un département ne saurait être déclaré responsable de l’accident provoqué par la présence sur la chaussée d’un amas de boue, de cailloux et de branchages couvrant toute la largeur de la voie et provenant d’une parcelle privée située en surplomb de la route et en contrebas d’un canal. En effet si ce terrain présentait une pente notable et recevait les écoulements souterrains d’une source, aucun indice ne permettait au département de prévoir, à l’époque de l’accident, l’instabilité de cette parcelle, alors qu’aucun accident analogue n’avait été signalé au cours des années antérieures sur cette fraction de route très fréquentée. Dès lors, l’absence de signalisation et l’insuffisance du mur de soutènement existant pour parer à cet éboulement ne constituent pas un défaut d’entretien normal susceptible d’engager la responsabilité du déparement.

CAA Bordeaux, 3 février 2009, n°07BX00012

[1Crédits photos : © Gary Blakeley