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Sanction contre un syndicaliste en dispense d’activité

CAA Bordeaux 4 novembre 2008 N° 07BX01721

Est-il possible de sanctionner disciplinairement un agent qui bénéficie d’une dispense d’activité pour motif syndical ? Un élu du conseil de discipline peut-il publiquement prendre position sur les faits reprochés à l’agent sans vicier la procédure ? L’autorité territoriale peut-elle fonder la sanction sur des faits susceptibles de recevoir une qualification pénale sans que la justice pénale ne se soit prononcée ?


 [1]

Un agent d’entretien d’une commune guyannaise (15000 habitants) bénéficie d’une dispense d’activité pour motif syndical. Estimant qu’en tenant des propos particulièrement violents, l’agent a manqué à son obligation de réserve et a commis des agissements de nature à porter atteinte aux intérêts de l’administration qui l’emploie, le maire le suspend provisoirement de ses fonctions avant de prendre un arrêté d’exclusion de quatre mois dont deux avec sursis.


Le syndicaliste attaque les deux arrêtés en soulevant principalement que :

 "le conseil de discipline n’a pas siégé en toute impartialité dès lors qu’antérieurement à sa séance, un de ses membres, représentant des élus, avait exposé publiquement sa position sur les faits dans le cadre d’une intervention radiophonique et désavoué l’action menée par la requérante"

 les droits de la défense ont été méconnus, seule les juridictions pénales étant compétentes pour constater la matérialité de faits susceptibles de recevoir une qualification pénale.

 il ne pouvait être sanctionné disciplinairement puisqu’il bénéficiait d’une dispense d’activité pour motif syndical.


Confirmant un jugement du tribunal administratif de Cayenne, la Cour administrative d’appel de Bordeaux réfute un à un les arguments du requérant :

 La circonstance qu’un élu du conseil de discipline ait pris, dans une interview radiophonique, publiquement position sur les faits reprochés à l’agent "ne suffit pas à établir que l’intéressé aurait manifesté à son encontre une animosité personnelle notoire et fait preuve d’une partialité de nature à vicier l’avis émis par ledit conseil".

 "en vertu du principe de l’indépendance de la répression disciplinaire et de la répression pénale, l’autorité administrative peut déclencher des poursuites disciplinaires sans que l’éventualité de poursuites pénales soit de nature à exercer une incidence sur sa liberté de décision (...) Par suite la circonstance que les faits reprochés à la requérante aient également pu faire l’objet de poursuites devant un tribunal répressif ne faisait pas obstacle à ce que soit engagée, à raison des mêmes faits, une procédure disciplinaire, ni à ce que soit prononcée, pour les faits dont s’agit, une sanction disciplinaire".

 " par leur nature que par la violence de leur expression et en l’absence de tout lien avec la défense des intérêts professionnels, les faits reprochés à Mme X dont l’exactitude matérielle est corroborée par les pièces du dossier notamment par les témoignages recueillis, constitués par un manquement à son obligation de réserve et par des agissements de nature à porter atteinte aux intérêts de l’administration qui l’emploie, ont le caractère de faute propre à motiver une sanction disciplinaire à son encontre alors même qu’elle n’avait jusqu’alors fait l’objet d’aucune sanction disciplinaire". Peu importe "que l’intéressée ait bénéficié d’une dispense d’activité pour motif syndical (...) dès lors qu’elle demeurait dans cette situation en position d’activité".

[1Photo : © Ximagination