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La jurisprudence de la semaine du 9 au 13 février 2015

Fonction publique territoriale et droit social / Protection fonctionnelle / Urbanisme / Voirie

(dernière mise à jour le 27/05/2015)

Fonction publique et droit social

 L’employeur peut-il consulter les SMS d’un salarié (ou d’un agent) envoyé ou reçu depuis un téléphone portable professionnel ?

Oui : "les messages écrits ("short message service" ou SMS) envoyés ou reçus par le salarié au moyen du téléphone mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte que l’employeur est en droit de les consulter en dehors de la présence de l’intéressé, sauf s’ils sont identifiés comme étant personnels". Ainsi un employeur peut produire en justice des messages n’ayant pas été identifiés comme étant personnels par le salarié, sans que cela constitue un procédé déloyal au sens des articles 9 du code civil et 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales rendant irrecevable ce mode de preuve. L’utilisation de tels messages par l’employeur ne peut être assimilée à l’enregistrement d’une communication téléphonique privée effectué à l’insu de l’auteur des propos invoqués. La Cour de cassation est ici dans la droite ligne de sa jurisprudence appliquant le même raisonnement qu’aux messages et fichiers stockés sur un ordinateur professionnel (Cour de cassation, chambre sociale, 10 mai 2012, N° 11-13884) ou même sur une clé USB (Cour de cassation, chambre sociale, 12 février 2013, N° 11-28649.

Cour de cassation, chambre commerciale, 10 février 2015,
N° 13-14779

 Un maire peut-il refuser à un responsable syndical une prime individuelle récompensant la qualité de service au motif que l’agent bénéficie d’une décharge totale de service et qu’il ne peut être procédé à son entretien d’évaluation professionnelle ?

Non : le fonctionnaire qui bénéficie d’une décharge de service pour l’exercice d’un mandat syndical est réputé être en position d’activité. Il a ainsi droit à l’attribution d’une somme correspondant à une prime, même si elle est instituée postérieurement à la date de cette décharge, dès lors qu’il aurait normalement pu prétendre à son bénéfice s’il avait continué à exercer effectivement son emploi. Seules sont exclues de ce droit les indemnités représentatives de frais et des indemnités destinées à compenser des charges et contraintes particulières, tenant notamment à l’horaire, à la durée du travail ou au lieu d’exercice des fonctions, auxquelles le fonctionnaire n’est plus exposé du fait de la décharge de service. Pour le calcul de la prime, c’est le taux moyen attribué aux agents occupant un emploi comparable à celui qu’occupait l’intéressé avant de bénéficier d’une décharge syndicale, eu égard notamment aux fonctions qu’il exerçait et à son cadre d’emplois, qui doit servir de référence.

Conseil d’État, 11 février 2015, N° 371257


Protection fonctionnelle

 L’administration est-elle tenue d’accorder à sa protection à un fonctionnaire poursuivi pénalement dès lors que la faute commise n’est pas dépourvue de tout lien avec le service ?

Non : l’administration n’est tenue d’accorder sa protection à l’agent que si les faits sont constitutifs d’une faute de service. Ainsi la faute d’un agent qui, eu égard à sa nature, aux conditions dans lesquelles elle a été commise, aux objectifs poursuivis par son auteur et aux fonctions exercées par celui-ci est d’une particulière gravité doit être regardée comme une faute personnelle justifiant que la protection fonctionnelle soit refusée à l’agent. Et ce alors même que, commise à l’occasion de l’exercice des fonctions, elle n’est pas dépourvue de tout lien avec le service, autorisant ainsi la victime à poursuivre aussi bien la responsabilité de l’administration devant la juridiction administrative que celle de son auteur devant la juridiction judiciaire. C’est ainsi à bon droit que l’Etat refuse d’accorder sa protection fonctionnelle à un magistrat, poursuivi du chef de faux en écriture publique [1].

Conseil d’État, 11 février 2015, N° 372359


Urbanisme

 Le maire peut-il refuser de délivrer un permis de construire pour non conformité au PLU sans vérifier d’office si le projet n’est pas susceptible d’adaptations mineures ?

Non. Aux termes de l’article L.123-1-9 du code de l’urbanisme : "les règles et servitudes définies par un plan local d’urbanisme ne peuvent faire l’objet d’aucune dérogation, à l’exception des adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes". Le Conseil d’Etat en déduit "qu’il appartient à l’autorité administrative, saisie d’une demande de permis de construire, de déterminer si le projet qui lui est soumis satisfait les dispositions du PLU, y compris telles qu’elles résultent le cas échéant d’adaptations mineures". Le pétitionnaire peut donc contester le refus opposé à sa demande en se prévalant de la conformité de son projet aux règles d’urbanisme applicables, le cas échéant assorties d’adaptations mineures. Peu importe qu’il n’ait pas fait état, dans sa demande initiale, de la possibilité de telles adaptations.

Conseil d’Etat, 11 février 2015, N° 367414

 Un plan local d’urbanisme (PLU) peut-il devenir exécutoire bien que la délibération l’approuvant n’ait pas été publiée au recueil des actes administratifs (pour les communes de 3 500 habitants et plus) ?

Oui : l’acte approuvant un plan local d’urbanisme devient exécutoire un mois suivant sa transmission au préfet, sauf si le préfet demande que des modifications y soient apportées et sous réserve qu’il ait fait l’objet d’un affichage dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article R. 123-25 du code de l’urbanisme et que mention de cet affichage ait été insérée en caractères apparents dans un journal diffusé dans le département. Est en revanche sans incidence la circonstance qu’il ait ou non été publié au recueil des actes administratifs, en application, lorsqu’il s’agit d’une délibération du conseil municipal d’une commune de 3 500 habitants et plus, du troisième alinéa de ce même article.

Conseil d’État, 13 février 2015, N° 370458


Voirie

 Un commerçant peut-il être indemnisé du préjudice résultant de travaux d’aménagement des voies rendant l’accès à son local plus difficile pour les véhicules excédant un certain gabarit ?

Oui : si, en principe, les modifications apportées à la circulation générale et résultant soit de changements effectués dans l’assiette, la direction ou l’aménagement des voies publiques, soit de la création de voies nouvelles, ne sont pas de nature à ouvrir droit à indemnité, il en va autrement dans le cas où ces modifications ont pour conséquence d’interdire ou de rendre excessivement difficile l’accès des riverains à la voie publique. Tel peut être le cas de travaux d’aménagement des voies qui rendent l’accès à un local plus difficile pour les véhicules excédant un certain gabarit, le propriétaire pouvant obtenir réparation du préjudice grave et spécial qui en résulte.

Conseil d’État, 11 février 2015, N° 367342


 [2]

[1Pour avoir fait modifier par le greffier la note d’audience pour y faire figurer des citations directes qui n’avaient pas été enregistrées ni régulièrement appelées à l’audience et pour avoir rédigé quatre jugements fixant des consignations alors qu’il n’en avait prononcé que deux sur le siège.

[2Photo : © Treenabeena