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La jurisprudence de la semaine du 29 décembre 2014 au 2 janvier 2015

Elections / Fiscalité / Marchés publics et contrats

(dernière mise à jour le 8/01/2015)

Elections

 Est-il possible de contester la validité d’un bulletin le lendemain des opérations de vote dès lors que les bulletins de vote déclarés valides par le bureau de vote n’ont pas été détruits et peuvent être ainsi vérifiés ?

Non, en l’absence de toute indication relative au bulletin litigieux dans le procès verbal des opérations de vote auquel il doit par ailleurs être annexé. En l’espèce les bulletins de vote déclarés valides par le bureau de vote n’avaient pas été détruits mais placés dans deux enveloppes. Le lendemain des opérations de vote, le maire de la commune avait extrait un bulletin de l’une de ces enveloppes hors la présence de l’ensemble des membres du bureau de vote et en l’absence de tout membre de la liste d’opposition. Un candidat battu avait fondé sa protestation sur le caractère équivoque et donc irrégulier de ce bulletin qui, selon lui, n’aurait pas dû être pris en compte, et avait obtenu du tribunal administratif de Pau de retrancher ce bulletin des suffrages. Le Conseil d’Etat annule le jugement et valide la prise en compte du bulletin litigieux.

Conseil d’État, 29 décembre 2014, N° 382204

 Les résultats du 2nd tour d’une élection municipale peuvent-ils être invalidés si les bulletins de vote d’une liste, distribués au premier tour de scrutin, ne mentionnaient pas la nationalité de l’un des candidats, ressortissant d’un Etat membre de l’Union européenne ?

Oui si les bulletins litigieux ont été pris en compte lors du dépouillement et si cette irrégularité entachant la 1er tour du scrutin a eu une incidence sur le déroulement et le résultat du second tour. Tel est jugé le cas en l’espèce dès lors que la liste en cause a pu fusionner avec une autre liste dans la perspective du second tour, cette fusion ayant été de nature, compte tenu du nombre de voix recueillies à affecter le résultat de ce scrutin. Peu importe que le candidat en cause ne figurait plus sur la liste fusionnée.

Conseil d’État, 29 décembre 2014, N° 383127

Fiscalité

 Une entreprise peut-elle, dans le cadre d’un contentieux fiscal, demander au centre des impôts fonciers de lui communiquer divers documents relatifs à la détermination de la valeur locative de locaux commerciaux d’une entreprise concurrente ?

Oui mais uniquement pour des documents qui revêtent un caractère pertinent pour l’évaluation des biens commerciaux et qui ne contiennent pas des informations couvertes par l’un des secrets protégés par l’article 6 de la loi du 17 juillet 1978. En effet lorsque l’administration décide de procéder à une évaluation directe de la valeur locative de locaux commerciaux, il appartient au contribuable, s’il s’y estime fondé, de contester la pertinence du recours à cette méthode par la production de tous éléments de nature à étayer sa contestation. Ainsi les dispositions de l’article L. 103 du livre des procédures fiscales ne sauraient faire obstacle, par elles-mêmes, à la communication à un redevable de l’imposition régie par l’article 1498 du code général des impôts, dans les conditions prévues par la loi du 17 juillet 1978, des éléments utiles à sa défense. A cet égard, si les procès-verbaux pertinents établis pour une telle évaluation sont susceptibles d’être communiqués à un redevable de l’imposition régie par l’article 1498 du code général des impôts, tel n’est pas le cas des fiches de calcul établies par l’administration fiscale à cette même fin, à moins que celles-ci ne revêtent un caractère pertinent pour contester le principe du recours, par l’administration, à l’une ou l’autre des méthodes d’évaluation.

Conseil d’État, 30 décembre 2014, N° 371225


Marchés publics et contrats

 Une collectivité peut-elle soumissionner à un marché public lancé par une autre personne publique dans le but notamment d’amortir des équipements ?

Oui sous réserve qu’une telle candidature :

1° réponde à un intérêt public local, c’est-à-dire constitue le prolongement d’une mission de service public dont la collectivité ou l’établissement public de coopération a la charge. Tel peut-être le cas si le but est notamment d’amortir des équipements, de valoriser les moyens dont dispose le service ou d’assurer son équilibre financier ;

2° ne compromette pas l’exercice de cette mission de service public ;

3° ne fausse pas les conditions de la concurrence. En particulier le prix proposé par la collectivité territoriale ou l’établissement public de coopération doit être déterminé en prenant en compte l’ensemble des coûts directs et indirects concourant à sa formation.

Conseil d’État, 30 décembre 2014, N° 355563

 L’annulation d’un acte détachable d’un contrat de droit privé impose-t-elle nécessairement à la personne publique partie au contrat de saisir le juge du contrat afin qu’il tire les conséquences de cette annulation ?

Non : il appartient au juge de l’exécution de rechercher si l’illégalité commise peut être régularisée et, dans l’affirmative, d’enjoindre à la personne publique de procéder à cette régularisation. Lorsque l’illégalité commise ne peut être régularisée, il lui appartient d’apprécier si, eu égard à la nature de cette illégalité et à l’atteinte que l’annulation ou la résolution du contrat est susceptible de porter à l’intérêt général, il y a lieu d’enjoindre à la personne publique de saisir le juge du contrat afin qu’il tire les conséquences de l’annulation de l’acte détachable. En l’espèce le conseil municipal d’une commune du Vaucluse (1400 habitants) avait décidé d’acquérir un immeuble situé sur le territoire de la commune, afin qu’y soit maintenue une activité de bar-tabac-restaurant et avait autorisé le maire de la commune à signer la convention d’acquisition. Puis le conseil municipal avait autorisé le maire à signer un contrat d’emprunt afin de financer cette acquisition. Sur requête d’une association, la cour administrative d’appel de Marseille avait enjoint à la commune de procéder à la résolution amiable du bail de location ou, à défaut, de saisir le juge du contrat afin qu’il en règle les modalités. Le Conseil d’Etat censure l’arrêt reprochant notamment aux juges d’appel de ne pas avoir examiné l’incidence de l’illégalité de la délibération du conseil municipal sur le bail commercial, ni recherché, pour chacun des contrats, si sa résolution était susceptible de porter une atteinte excessive à l’intérêt général. Réglant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat relève que l’illégalité non régularisable de la délibération est sans incidence sur l’objet et les clauses du contrat par lequel la commune a acquis le bâtiment litigieux, dès lors que ce contrat n’implique pas, par lui-même, que la commune prenne en charge l’activité économique de restauration. Il en est de même du bail commercial dès lors qu’il n’est ni établi, ni même allégué, que les clauses de ce contrat donneraient à la commune le contrôle de l’activité du locataire. Ainsi ce contrat n’a ni pour objet ni pour effet la prise en charge, par la commune, de l’activité économique de restauration.

Conseil d’État, 29 décembre 2014, N° 372477


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[1Photo : © Treenabeena