La victime de dégâts collatéraux causés par des opérations de lutte contre l’incendie peut-elle rechercher la responsabilité du SDIS sans mise en cause préalable de la commune du lieu où est subi le dommage ?
Suite à un départ de feu signalé au SDIS de Haute-Corse, un avion tracker [1] de la sécurité civile effectue des largages de produit retardant afin de stopper l’incendie. Un exploitant agricole prétend que les largages, effectués à une cinquantaine de mètres du front du feu, ont provoqué la destruction de ses plantations de persil. Il sollicite la condamnation du SDIS de Haute-Corse à lui verser la somme de 63 755 euros.
Condamné en première instance, le SDIS relève appel en soulignant notamment :
– que la mise en cause du service départemental d’incendie ne pouvait se faire, s’agissant de police administrative, sans mise en cause préalable de la commune du lieu où est subi le dommage ;
– que la réalité du préjudice allégué n’est pas démontrée, le rapport d’expertise n’étant pas contradictoire et se basant sur une estimation théorique.
Pas de responsabilité de la commune
Les juges d’appel écartent le premier argument :
Ainsi en l’espèce l’action du requérant tendant à réparer son préjudice matériel résultant de la destruction de ses cultures de persil du fait du largage par erreur, sur sa parcelle, d’un produit retardant par un tracker lors de l’incendie survenu sur le territoire de la commune tend à la mise en jeu de la responsabilité du SDIS sur le fondement d’une organisation et d’un fonctionnement défectueux de ses services.
Un préjudice non avéré
En revanche, la cour administrative d’appel reçoit le second argument : à supposer même que la faute du SDIS soit établie, le requérant ne démontre pas la réalité du préjudice qu’il estime avoir subi. En effet, si le requérant se prévaut d’une attestation établie près d’un mois après le prétendu sinistre, le SDIS fait valoir sans être contredit que le lieutenant signataire de l’attestation n’était pas au nombre des effectifs en poste le jour de l’incendie et qu’il n’a donc pu constater les dégâts lui-même...
Quant au rapport d’expertise établi deux mois après l’incendie, il n’a pas porté sur la réalité et l’étendue des dommages mais s’est borné, sur les déclarations de l’exploitant, à évaluer les pertes infligées.
[1] Avion bombardier d’eau de lutte contre les incendies.