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Des garde-fous européens pour la judiciarisation de la vie publique ?

Par Michel Paves

En partenariat avec la Revue Lamy des Collectivités Territoriales, retrouvez l’éditorial de Michel Paves, président du conseil de surveillance de SMACL Assurances.

La judiciarisation de la vie publique, que nous observons en France depuis une douzaine d’années, est un phénomène de fond qui dépasse nos frontières.

Ainsi, mi-septembre dernier, lors d’un séminaire de l’EMIG (groupement
européen des mutuelles d’assurances des collectivités territoriales)
que j’avais l’honneur de présider, toutes les délégations en ont fait le constat : en Allemagne, en Belgique, en Irlande ou en Norvège, comme en France, le citoyen consommateur de service public, de plus en plus exigeant, hésite de moins en moins à demander réparation en cas de défaillance, rejoint en cela par le juge qui, à défaut de trouver un coupable, recherche un responsable... solvable.

La responsabilité sans faute est très protectrice pour le citoyen-consommateur. Elle est, du même coup, pénalisante pour les collectivités territoriales. Responsables de tout, comptables du moindre préjudice, elles doivent aussi faire face à l’exigence sociétale d’infaillibilité de leurs élus et de leurs agents, très souvent appelés
à répondre personnellement de l’exercice de leurs fonctions.

Le risque est évidemment financier. Mais pas seulement. La judiciarisation de la vie publique n’invite pas en effet à la prise d’initiative, dont la gestion dynamique des collectivités a par définition besoin.

Fort heureusement, il convient de la tempérer. C’est tout l’intérêt de l’Observatoire SMACL des risques territoriaux dont le « Rapport annuel 2013 » confirme certes la réalité statistique des mises en cause mais très loin, du moins au plan pénal, du niveau alarmant que d’aucuns décrient non sans quelques arrière-pensées. Les chiffres sont têtus et appellent à plus de retenue.

C’est là un message rassurant qu’il faut dire et répéter à quelques mois de nos élections municipales.

Le mérite en revient notamment aux associations et fédérations d’élus locaux et de fonctionnaires territoriaux qui, inlassablement, multiplient les actions de formation et d’information préventive auxquelles l’Observatoire SMACL apporte régulièrement son concours. De ce point de vue, un effort particulier est aujourd’hui en préparation pour sensibiliser et former les nouveaux élus qui seront appelés aux affaires locales par les urnes en 2014.

Pour autant, et nos homologues européens y sont – comme nous –
très sensibles, des garde-fous s’imposent pour que le légitime
droit à réparation des victimes ne se transforme pas en boite de
Pandore, au détriment des finances locales de plus en plus comptées,
au risque aussi d’un découragement démocratique.

Et puisque le phénomène dépasse les frontières, souhaitons que
la commission européenne, attentive tout à la fois à la protection
du consommateur et à l’efficacité du service public, se penche sur
cette question pour trouver le bon point d’équilibre.

Le sommaire de la Revue Lamy des Collectivités Territoriales d’octobre 2013