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Protection fonctionnelle : la commune fondée à émettre un titre exécutoire contre l’ancien maire condamné pour harcèlement sexuel

Tribunal des conflits, 18 février 2013, N° 13-03889

Une commune qui a accordé sa protection fonctionnelle à des agents ayant porté plainte contre l’ancien maire peut-elle réclamer à l’intéressé le remboursement des sommes versées aux plaignants ?

 [1]


Oui : la personne publique est subrogée dans les droits de l’agent dont elle a assuré la protection pour obtenir de l’auteur des menaces ou attaques dont cet agent a été victime la restitution des sommes qu’elle lui a versées pour assurer sa protection. La commune est donc fondée à émettre un titre exécutoire contre l’ancien maire qui a été condamné pour agressions et harcèlement sexuels. En cas de contestation du titre exécutoire, ce sont les juridictions judiciaires qui sont compétentes. Peu importe que la personne condamnée ne soit pas un tiers à la collectivité mais un élu (ou un agent) dès lors que les faits qui lui sont reprochés sont constitutifs d’une faute personnelle.

Sur plainte de trois agents, le maire d’une commune francilienne (1 800 habitants) est condamné [2] pour attouchements sexuels, harcèlement sexuel et moral à huit mois de prison avec sursis et à 5 ans de privation des droits civiques.

La nouvelle majorité lui réclame le remboursement des quelques 26 000 euros versés aux agents victimes au titre de la protection fonctionnelle. En effet la personne publique est subrogée dans les droits de l’agent dont elle a assuré la protection pour obtenir de l’auteur des menaces ou attaques dont cet agent a été victime la restitution des sommes qu’elle lui a versées pour assurer sa protection.

Dans un premier temps la commune assigne l’ancien maire devant le tribunal de grande instance (TGI) pour obtenir le remboursement de ces sommes. Mauvaise pioche : le TGI se déclare incompétent.

Qu’à cela ne tienne : la commune émet alors un titre exécutoire à l’encontre de l’ancien maire. Mais, saisi d’un recours de l’intéressé, le tribunal administratif se déclare à son tour incompétent...

Belle illustration de ce que les juristes appellent un conflit négatif de compétence [3]... D’où l’arbitrage nécessaire du tribunal des conflits qui donne sa faveur aux juridictions judiciaires. En effet l’action subrogatoire exercée par la commune à l’encontre l’ancien maire "tend au recouvrement de la créance de nature privée née des sommes versées aux agents communaux victimes des agissements de celui-ci, auxquels elle a accordé sa protection à l’occasion des poursuites judiciaires dont il a fait l’objet au titre de sa faute personnelle". Ainsi la juridiction judiciaire est compétente pour connaître de la contestation par l’intéressé du titre exécutoire dès lors qu’une faute personnelle lui est imputable.

Tribunal des conflits, 18 février 2013, N° 13-03889

[1Photo : © Georges Chamberlain

[2Cour de cassation, chambre criminelle 31 mai 2007, N° : 06-88468

[3Par opposition au conflit positif de compétence où les deux ordres de juridictions se reconnaissent compétents pour trancher d’un même litige.