Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

Mutation : intérêt du service ou sanction déguisée ?

CONSEIL D’ETAT 17 décembre 2007, N° 301317 Inédit au Recueil LEBON

La mutation d’un fonctionnaire en raison des difficultés rencontrées dans son service constitue-t-elle une sanction disciplinaire ? Le fonctionnaire muté doit-il pouvoir consulter son dossier ? [1]


Le bon fonctionnement d’un établissement public est perturbé depuis quatre ans à la suite d’un différend opposant plusieurs agents du service. Le responsable du département est muté de Rennes à Paris dans l’intérêt du service.

Estimant qu’il s’agit là d’une sanction disciplinaire déguisée le directeur conteste sa mutation et la nomination de son successeur et demande 10 000 euros de dommages-intérêts en réparation de son préjudice. Le conseil d’Etat déboute l’intéressé :

1) « eu égard aux circonstances dans lesquelles elle est intervenue, notamment en l’absence de volonté de l’Office de sanctionner un comportement fautif de l’intéressé, et à l’incidence de cette mutation sur sa situation professionnelle et matérielle, une telle décision est dépourvue de caractère disciplinaire ». Dès lors les garanties procédurales inhérentes aux sanctions disciplinaires n’avaient pas à être respectées.

2) Certes, dès lors que la mutation est fondée notamment sur l’insuffisance du fonctionnaire « dans l’exécution des missions d’encadrement incombant à son emploi, ainsi qu’elle ressort, en particulier, de ses fiches de notation [elle] doit être regardée comme ayant été prise en considération de la personne de l’intéressé ». En conséquence en application des dispositions de l’article 65 de la loi du 22 avril 1905 le fonctionnaire devait être mis à même de demander la communication de son dossier en temps utile même si la mesure dont il est l’objet ne constitue pas une sanction disciplinaire. Mais il « ressort des pièces du dossier que M. D... a été informé de l’intention de l’administration de procéder à sa mutation dans l’intérêt du service lors d’un entretien avec le directeur général de l’Office, le 9 décembre 1999 et « qu’il a disposé, préalablement à l’édiction de la mesure litigieuse en date du 17 décembre 1999, d’un délai suffisant pour demander la communication de son dossier ». Et les magistrats d’en conclure « qu’ainsi, et alors même qu’il n’aurait pas été informé de la possibilité d’une telle communication, M. D... a été mis à même de présenter une demande en ce sens ».

3) Pour satisfaire aux dispositions de l’article 65 de la loi du 22 avril 1905, l’administration n’est pas tenue d’informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. Il suffit qu’un délai suffisant lui ait été laissé pour demander la communication de son dossier.

[1Photo : © Gilles Cohen