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Deanm1974

Agression sexuelle dans une maison de retraite : l’EHPAD responsable ?

Tribunal administratif de Poitiers, 22 novembre 2012, N°1002479

Deanm1974

Une maison de retraite (EHPAD) peut-elle être tenue responsable de l’agression sexuelle d’une pensionnaire par un autre résident ?

 

Oui dès lors que l’établissement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), bien qu’ayant conscience du caractère potentiellement dangereux de l’agresseur, au regard d’antécédents signalés au procureur de la République, n’a mis en place aucune surveillance de l’intéressé, ni pris aucune mesure assurant la sécurité des résidents. En outre, en l’espèce, l’EHPAD a retardé la prise en charge de la victime en ne sollicitant pas un examen médical immédiat de la victime et en n’informant pas la famille de la nature exacte de l’agression.
 

Une pensionnaire d’une maison de retraite est victime d’attouchements sexuels de la part d’un autre résident de l’établissement. Le personnel de nuit appelle l’infirmière de garde. Celle-ci ne juge pas utile de se déplacer et ne donne aucune consigne particulière au personnel sur place.

Les deux aides-soignantes qui assurent la surveillance de nuit des 150 pensionnaires de l’établissement font avec les moyens du bord : elles bloquent la porte de la chambre de l’agresseur avec un chariot pour éviter qu’il ne récidive pendant la nuit. Bien que la victime soit en état de choc, aucun soin ne lui est prodigué.

 

Le lendemain la famille de la victime est informée de l’intrusion d’un autre résident dans la chambre de leur proche mais sans mention d’une quelconque agression. Ce n’est que le surlendemain que la victime se confie à ses proches. Sur l’insistance de la famille, la maison de retraite appelle un médecin lequel, au vu de l’état de la victime, demande une hospitalisation en urgence...

Une plainte est déposée contre l’agresseur. Celui-ci décède avant que le tribunal correctionnel n’ait le temps de le juger. Les tuteurs de la victime recherchent la responsabilité de l’EHPAD. Ils soutiennent que jusqu’alors leur proche parent avait conservé toute ses facultés mentales et qu’elle était, depuis l’agression, plongée dans une aphasie totale. En outre elle est devenue sujette au stress au moment du coucher, et est dans l’impossibilité de reprendre la marche.

 

Le tribunal administratif de Poitiers leur donne raison et condamne l’EHPAD à leur verser 10 000 euros pour réparer les troubles dans les conditions d’existence de la victime :

 l’établissement, bien qu’ayant conscience de la dangerosité de l’agresseur, n’a pris aucune mesure spécifique pour en assurer la surveillance étroite, ni assurer la sécurité des autres pensionnaires ;

 en ne prenant aucune mesure après l’agression, en s’abstenant de faire appel à un médecin et de prévenir la famille, l’EHPAD a retardé la mise en œuvre des soins et la prise en charge adaptée de la victime.