Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

La jurisprudence de la semaine du 22 au 26 octobre 2012

Assemblées délibérantes / Associations / Assurances / Fonction publique et droit social / Responsabilités

(dernière mise à jour le 23/05/2013)

 [1]


Assemblées délibérantes

 La circonstance qu’un élu exerce une activité professionnelle en lien avec une délibération prise par le conseil suffit-elle à caractériser un intérêt personnel prohibé ?

Non répond le Conseil d’Etat dès lors que l’intérêt de l’élu n’est pas nécessairement distinct de celui de la généralité des habitants. Ainsi la qualité de viticulteur d’un maire ne suffit pas à le considérer comme personnellement intéressé à une délibération du conseil favorisant la vente de vins du terroir dès lors que le secteur viticole représente l’activité économique prépondérante de la commune (qui compte notamment quarante-sept producteurs) et une part dominante des emplois de ses habitants. Attention cependant : cette jurisprudence n’engage pas le juge pénal qui reste autonome dans l’appréciation de l’intérêt « quelconque » de l’article 432-12 du code pénal réprimant la prise illégale d’intérêts.

Conseil d’État, 26 octobre 2012, N° 351801


Associations

 Un EPCI qui crée une école de musique après la liquidation judiciaire d’une association subitement privée de subventions publiques est-elle-tenue de reprendre les contrats de travail des salariés de l’association ?

Non sauf s’il est établi que la structure intercommunale a repris des éléments significatifs d’actifs corporels ou incorporels utilisés par l’association et nécessaires à la poursuite de l’activité. Peu importe que l’association ait dû cesser son activité en raison de l’interruption des subventions publiques.

Cour de cassation, chambre sociale, 24 octobre 2012 N° 11-22206


Assurances

 L’angoisse d’une mort imminente peut-elle constituer un préjudice distinct susceptible d’être indemnisé ?

Oui. La Cour de cassation le reconnaît pour la première fois en confirmant la position d’une cour d’appel appelée à statuer sur les conséquences dommageables d’un accident mortel de la circulation. Sont ainsi allouées aux parties civiles, au titre de leur action successorale, outre une indemnité à raison des souffrances physiques et morales subies par la victime du fait de ses blessures entre le moment de l’accident et son décès, une indemnité réparant la "souffrance psychique résultant d’un état de conscience suffisant pour envisager sa propre fin". En effet les préjudices constitués par les souffrances endurées du fait des blessures et "par l’angoisse d’une mort imminente" sont bien distincts et ont été évalués séparément.

Cour de cassation, chambre criminelle, 23 octobre 2012, N° 11-83770


Fonction publique et droit social

 Un directeur général des services (DGS) ayant fait l’objet d’une fin de détachement sur emploi fonctionnel peut-il bénéficier de l’allocation chômage s’il a opté pour une indemnité de licenciement plutôt que pour un congé spécial auquel il avait droit ?

Oui : "lorsqu’une administration met fin au détachement de l’un de ses agents sur un emploi fonctionnel sans être en mesure de lui offrir un emploi correspondant à son grade et lorsque celui-ci, en application du choix que lui offrent les dispositions de l’article 53 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, opte, alors même qu’il aurait pu prétendre au bénéfice d’un congé spécial dont il remplissait les conditions, pour le versement d’une indemnité de licenciement, il doit être regardé comme ayant été involontairement privé d’emploi au sens des dispositions de l’article L. 5421-1 du code du travail dès lors que la rupture des relations de travail résulte, en dépit de ladite option, de la volonté initiale de la collectivité qui l’emploie de lui retirer ses attributions". Doit être ainsi annulée la décision d’un maire refusant de faire droit à la demande d’allocation d’aide au retour à l’emploi présentée par l’intéressé.

Cour Administrative d’Appel de Marseille, 23 octobre 2012, N° 10MA02730

 Le fait pour un employeur de suspendre la ligne téléphonique et la messagerie électronique d’un salarié en arrêt de travail peut-il être jugé constitutif de harcèlement moral ?

Oui dès lors que la suspension des moyens de communication est intervenue en réaction à la volonté du salarié de défendre ses droits et n’est pas justifiée par l’intérêt de l’entreprise. En l’espèce l’employeur justifiait cette mesure par un manque de loyauté du salarié concerné et par les nécessité d’assurer la continuité du service, l’intéressé étant absent depuis trois mois et demi. La Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir écarté l’argument.

Cour de cassation, chambre sociale, 24 octobre 2012, N° 11-19862


Responsabilités

 Une collectivité peut-elle être déclarée civilement responsable des faits d’exhibition sexuelle commis par un cadre dans l’exercice de ses fonctions ?

Oui dès lors que la faute personnelle du cadre n’est pas dépourvue de tout lien avec le service. Tel est le cas si l’agent a agi pendant le temps du service, avec les moyens du service et/ou sur le lieu de travail. Les victimes sont alors en droit d’actionner la responsabilité de la collectivité à charge pour cette dernière de se retourner contre l’agent fautif pour obtenir le remboursement des sommes exposées. Une commune est ainsi déclarée civilement responsable de gestes déplacés et des faits d’exhibition sexuelle exercés par un cadre sur des subordonnés. La responsabilité de la collectivité est également engagée pour défaut d’octroi de la protection fonctionnelle aux agents victimes.

Tribunal administratif d’Orléans, 23 octobre 2012, n° 1002455 et n° 1102040

 Une plainte avec constitution de partie civile contre un fonctionnaire territorial peut-elle interrompre la prescription quadriennale contre la collectivité bien que celle-ci ne soit pas visée dans la plainte ?

Oui : une plainte avec constitution de partie civile interrompt la prescription quadriennale dès lors qu’elle porte sur le fait générateur, l’existence, le montant, ou le paiement d’une créance sur une collectivité publique. Peu importe que la commune ne soit pas partie à l’instance pénale. Les victimes d’un fonctionnaire condamné pour des faits d’exhibition sexuelle peuvent ainsi rechercher la responsabilité civile de la collectivité plus de quatre après les agissements reprochés : un nouveau délai court à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle la décision pénale est passée en force de chose jugée.

Tribunal administratif d’Orléans, 23 octobre 2012, n° 1002455 et n° 1102040


[1Photo : © Treenabeena