Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

La jurisprudence de la semaine du 9 au 13 juillet 2012

Contentieux et procédures / Environnement / Etat civil / Fonction publique et droit social / Marchés publics, DSP et contrats / Risques technologiques / TIC

(dernière mise à jour le 9/01/2013)

 [1]


Contentieux et procédures

 Une plainte adressée au procureur de la République interrompt-elle la prescription de l’action publique ?

Non : une plainte adressée au procureur de la République ne constitue pas un acte de poursuite ou d’instruction et n’a pas d’effet interruptif de la prescription de l’action publique.

Cour de cassation, chambre criminelle, 11 juillet 2012, N° 11-87583


Environnement

 Le propriétaire d’un terrain pollué par un exploitant en liquidation judiciaire peut-il être considéré comme le détenteur des déchets abandonnés et ainsi tenus à l’obligation de dépolluer le site à ses frais ?

Oui : en l’absence de tout autre responsable, le propriétaire d’un terrain où des déchets ont été entreposés en est, à ce seul titre, le détenteur au sens des articles L. 541-1 et suivants du code de l’environnement. C’est donc à lui qu’il revient en principe l’obligation d’assumer financièrement les travaux de dépollution du site. A moins qu’il ne démontre être étranger à l’abandon des déchets et ne l’avoir pas permis ou facilité par négligence ou complaisance.

Cour de cassation, chambre civile 3, 11 juillet 2012, N° 11-10478


Etat civil

 Les règles d’acquisition de la nationalité française par mariage, plus restrictives depuis 2003, sont-elles contraires au respect dû à la vie privée et au droit de mener une vie familiale normale ?

Non : "en fixant à deux ans la durée de mariage sans cessation de la communauté de vie nécessaire pour que le conjoint d’un Français puisse obtenir la nationalité française à raison du mariage, en instituant un délai de trois ans lorsque l’étranger ne justifie pas avoir résidé de manière ininterrompue pendant au moins un an en France à compter du mariage, en supprimant la dérogation à ces conditions de délai prévue en cas de naissance d’un enfant, en précisant le contenu de l’obligation de vie commune au sens de l’article 215 du code civil et en exigeant que le conjoint étranger justifie d’une connaissance suffisante de la langue française, l’article 21-2 du code civil, dans sa rédaction résultant de la loi du 26 novembre 2003, qui n’empêche pas l’étranger de vivre dans les liens du mariage avec un ressortissant français et de constituer avec lui une famille, ne porte, par lui-même, atteinte ni au droit au respect de la vie privée ni au droit de mener une vie familiale normale. L’article 21-2 du code civil est donc déclaré conforme à la Constitution.

Conseil constitutionnel, 13 juillet 2012, n° 2012-264


Fonction publique et droit social

 Un agent peut-il être licencié pour motif disciplinaire pour avoir publié, sur le mur facebook d’un ami, des propos désobligeants à l’égard de son employeur ?

Tout est question d’appréciation au cas par cas en fonction notamment de l’importance du réseau d’amis ayant accès aux publications litigieuses. En l’espèce un juge des référés ordonne, dans l’attente d’une décision au fond, la suspension du licenciement de deux éducatrices qui avaient échangé, sur Facebook, des propos peu amènes à l’égard leur hiérarchie. En effet les publications litigieuses n’ont eu qu’une diffusion restreinte au nombre limité des 11 « amis » de l’une des intéressées.

Tribunal administratif de Versailles, 11 juillet 2012, N° 1203629

 La liberté d’expression garantie sur le lieu de travail autorise-t-elle le salarié à contester, même de manière virulente, les choix opérationnels de son responsable hiérarchique direct ?

Non : "si le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, d’une liberté d’expression, il ne peut en abuser en tenant des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs". Pour autant, en l’espèce, les propos tenus par la salariée dans une lettre adressée à la direction des ressources humaines (DRH) [2] et le comportement d’opposition aux instructions de son supérieur ne justifiaient pas, compte tenu de leur caractère non public et des fonctions et responsabilités importantes qu’exerçait l’intéressée dans l’entreprise depuis des années, la rupture immédiate de son contrat de travail.

Cour de cassation, chambre sociale, 11 juillet 2012, N° 11-22225


 Le salarié en mission victime d’un accident de la circulation peut-il rechercher la responsabilité de son employeur sur le fondement d’une faute inexcusable ?

Oui : les dispositions de l’article L. 455-1-1 du code de la sécurité sociale, qui accordent au salarié victime le bénéficie du régime de réparation de la loi Badinter n° 85-677 du 5 juillet 1985, n’excluent pas l’application de la législation prévue au chapitre II du titre V du livre IV du code de la sécurité sociale, lorsque ce même accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur.

Cour de cassation, chambre civile 2, 12 juillet 2012, N° 11-20123


Hygiène et sécurité au travail

 Un salarié peut-il refuser une vaccination obligatoire contre l’hépatite B en invoquant le risque de développer une sclérose en plaques ?

Non : un tel refus expose le salarié à un risque de développer une maladie grave. Or l’employeur est tenu d’une obligation de résultat en matière de sécurité des salariés et engagerait sa responsabilité si le salarié contractait ladite maladie. Le salarié ne peut utilement opposer des controverses sur les effets secondaires possibles de cette vaccination obligatoire et notamment le risque de développer une sclérose en plaques. Ainsi le licenciement d’un salarié ayant refusé de se faire vacciner repose bien sur une cause réelle et sérieuse. Trois conditions cumulatives doivent cependant être réunies :

 la réglementation applicable au secteur concerné [3] doit imposer la vaccination des salariés exerçant des fonctions les exposant au risque de la maladie considérée ;

 la vaccination doit avoir été prescrite par le médecin du travail ;

 il n’existe aucune contre-indication médicale de nature à justifier le refus du salarié.

Cour de cassation, chambre sociale, 11 juillet 2012, N° 10-27888


 L’incompétence d’un cadre territorial peut-il justifier sa mise au placard et exonérer partiellement la collectivité des agissements de harcèlement moral dont il a été l’objet ?

Non : si le juge doit tenir compte du comportement du plaignant pour apprécier la réalité du harcèlement dont il estime être l’objet, en revanche la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l’existence d’un harcèlement moral est établie, qu’il puisse être tenu compte du comportement de l’agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Il appartient à l’autorité territoriale de trouver des solutions avec l’intéressé plutôt que de prendre des mesures humiliantes et dégradantes. Si le comportement de l’agent est fautif, il convient de prendre à son encontre des sanctions disciplinaires.

Cour Administrative d’Appel de Nantes, 12 juillet 2012, N° 10NT00677


Marchés publics, DSP et contrats

 Les juridictions administratives sont-elles compétentes pour statuer sur un litige opposant un concessionnaire, chargé par un syndicat intercommunal à vocation multiple de la construction et de l’exploitation d’une station d’épuration, et les sociétés auxquelles il a fait appel pour la réalisation de l’ouvrage ?

Non dès lors que le concessionnaire a agi pour son propre compte et non pour celui de la personne publique. En effet le litige né de l’exécution d’un marché de travaux publics et opposant des participants à l’exécution de ces travaux relève de la compétence de la juridiction administrative, sauf si les parties sont unies par un contrat de droit privé. Dans ce dernier cas, la compétence demeure administrative uniquement si l’une des parties au contrat agit pour le compte d’une personne publique.

Tribunal des conflits, 9 juillet 2012, N° de pourvoi : 12-03834


 Une collectivité peut-elle profiter des réserves émises par une entreprise sur le décompte général pour demander, dans un décompte rectificatif, le paiement de pénalités de retard initialement négligées ?

Non : les éléments du décompte signé sur lesquels les réserves de l’entreprise ne portaient pas ont acquis un caractère définitif et intangible, faisant obstacle à la notification postérieure d’un nouveau décompte comportant la mise en œuvre pour la première fois d’une clause de pénalités de retard. L’entreprise n’a pas à faire les frais de la négligence de la collectivité qui a oublié d’appliquer la clause de pénalités de retard insérée dans les stipulations contractuelles : « cette circonstance ne constitue ni une erreur matérielle, ni une omission ni un faux ou double emploi de nature a permettre une révision des décomptes en application de l’article 1269 du code de procédure civile ».

Cour administrative d’appel de Lyon, 12 juillet 2012, N° 11LY00924


 Une collectivité peut-elle imposer aux candidats à une délégation de service public de s’associer par la constitution d’un groupement ou de de recourir à un sous-traitant ?

Oui : "la circonstance que des candidats doivent s’associer par la constitution d’un groupement ou prévoir de recourir à un sous-traitant pour présenter leur candidature à une délégation de service public ne peut constituer en soi une atteinte aux principes de libre accès à la commande publique et d’égalité de traitement des candidats". Une commune qui souhaite regrouper en un même lieu un site de fourrière et un second site de fourrière-refuge en activité sur son territoire peut ainsi confier, par une unique délégation de service public, la gestion de ces activités à un même délégataire. La commune peut, dans cette optique, imposer aux sociétés commerciales de s’associer, par la voie d’un groupement ou d’un contrat de sous-traitance, avec une fondation ou une association habilitée à gérer la partie refuge de l’activité déléguée.

Conseil d’État, 13 juillet 2012, N° 358512


Risques technologiques

 Les règles et prescriptions techniques applicables aux installations classées soumises à autorisation peuvent-elles être publiées et transmises au Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques sans participation préalable du public ?

Non : l’article 7 de la Charte de l’environnement offre au public le droit non seulement d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques mais également de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. Or les les projets de règles et prescriptions techniques que doivent respecter, en vertu de l’article L. 512-5 du même code, les installations classées pour la protection de l’environnement soumises à autorisation, ont bien des impacts sur l’environnement. En effet ces règles et prescriptions techniques déterminent les mesures propres à prévenir et réduire les risques d’accident ou de pollution de toute nature susceptibles d’intervenir, les conditions d’insertion de l’installation dans l’environnement et de la remise en état du site après arrêt de l’exploitation. Le conseil constitutionnel, saisi d’une QPC par l’association France Nature Environnement, en déduit que les dispositions de la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 512-5 du code de l’environnement sont contraires à la Constitution, faute d’assurer la mise en œuvre du principe de participation du public à l’élaboration des décisions publiques en cause.

Conseil constitutionnel, 13 juillet 2012, n° 2012-262


Technologies de l’information et de la communication

 Une commune dispose-t-elle de moyens d’action juridique contre une société qui a régulièrement déposé son nom de domaine en « .fr » ?

Oui sur le fondement de l’article 1382 du code civil s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public. La commune peut demander au juge des référés de faire cesser ce trouble manifestement illicite. Peu importe que l’entreprise ait déposé le nom de domaine de la commune en toute légalité.

Cour de cassation, chambre commerciale, 10 juillet 2012, N° 11-21919


[1Photo : © Treenabeena

[2L’intéressé contestait des choix opérationnels de son responsable hiérarchique direct, exigeant en outre de celui-ci qu’il réitère par écrit des instructions qu’il lui avait données verbalement, et mettait en cause des pratiques comptables que sa hiérarchie lui avait demandé d’observer en des termes suggérant qu’elles ne respectaient pas les exigences d’honnêteté et de sincérité qui s’attachaient à ses fonctions. Elle mettait également en doute les compétences du directeur du contrôle de gestion.

[3Ici une entreprise de pompes funèbres