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Accident lors d’un "toro-piscine" : commune exonérée, association condamnée

Cour d’appel de Nîmes, 28 février 2012, N° 11/01085

Une commune peut-elle être déclarée responsable d’un défaut de communication des consignes de sécurité aux participants d’une manifestation (ici toro-piscine) dont l’animation a été confiée à une association ?

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Pas si la commune a pris le soin, dans la convention la liant à l’association, de mettre à la charge de cette dernière l’obligation de rappeler les consignes de sécurité aux participants. En cas de manquement à son obligation, l’association engage sa responsabilité. Elle doit être en mesure d’établir que les règles de sécurité ont bien été diffusées, ce qui suppose, pour limiter le risque de contestation, qu’un document écrit ait été remis aux participants en complément des consignes orales.

Au cours d’un "toro-piscine" organisé dans les arènes d’une commune de Camargue, un participant est projeté à terre par une vachette. Blessé au niveau des vertèbres cervicales et au bras gauche, il recherche la responsabilité de la commune, de l’association, du manadier et du directeur des arènes.

A l’appui de ses prétentions, il fait valoir :

 qu’originaire et résident dans le département de Saône-et-Loire il ignorait en quoi consistait un tel jeu avant d’y participer et qu’il n’a pas été en mesure d’en appréhender les risques réels ;

 qu’il a été encouragé à participer au jeu par l’animateur ;

 que la commune, organisatrice de spectacle, et le directeur des arènes sont redevables d’une obligation contractuelle de sécurité qui doit être appréciée avec d’autant plus de rigueur que le "toro-piscine" est une activité dangereuse ;

 que le manadier n’a pas respecté ses obligations contractuelles qui lui imposaient de fournir des vachettes ne présentant aucune méchanceté excessive, l’animal à l’origine de l’accident étant particulièrement excité ;

 que l’association a failli à son obligation d’information, les seules consignes de sécurité délivrées l’ayant été par le micro dans le chahut des arènes.

Pour sa défense la commune objecte, d’une part, que la convention met à la charge de l’association le soin de diffuser avant chaque "toro-piscine" les consignes de sécurité, et d’autre part, que l’animal est resté sous la garde de la manade.

Le tribunal de grande instance de Nîmes déboute le requérant de l’ensemble de ses demandes. La cour d’appel de Nîmes confirme l’absence de responsabilité de la commune mais retient celle de l’association.


Pas de manquement de la commune à son obligation contractuelle de sécurité

En préambule la cour souligne que "le jeu de toro-piscine expose ses participants qui sont confrontés à une vachette camarguaise aux réactions imprévisibles, à un danger réel de risques et de blessures".

C’est d’ailleurs pleinement consciente du danger, que la commune a exigé contractuellement :

 du manadier qu’il fournisse "cinq vaches qui ne manifestent aucune méchanceté excessive afin de minimiser les risques des participants" ;

 de l’association de rappeler avant chaque toro-piscine les règles de sécurité et de ne pas pousser les personnes en piste à se mettre en danger.

La cour d’appel déduit de ces précautions contractuelles que la commune n’a commis aucun manquement à son obligation de sécurité qui était à sa charge en sa qualité d’organisateur de spectacles dans les arènes dont elle est propriétaire.


Responsabilité de l’association

A la différence des premiers juges, les magistrats de la cour d’appel retiennent la responsabilité de l’association lui reprochant un défaut de communication des consignes de sécurité. La cour écarte à ce titre comme peu probantes les attestations produites par l’association. Elles émanent en effet toutes de personnes membres ou proches de l’association qui de surcroît "connaissent parfaitement les règles à observer pour vivre en permanence au contact des taureaux et des vachettes de Camargue dont le comportement leur est familier".

Les attestations produites par le groupe d’amis de la victime, en camping dans la région, sont jugées plus crédibles. Or elles ne permettent pas d’affirmer "que les consignes de sécurité ont été exposées avec suffisamment de clarté et d’exhaustivité par l’animateur du jeu de toro-piscine".

Il en ressort en effet que le speaker, après avoir incité les spectateurs à se porter volontaires sous les encouragements du public, a simplement rappelé aux participants les consignes à respecter en cas de chute en faisant l’impasse sur les autres règles.

Cette carence fautive ouvre à droit à réparation de la victime sur le fondement de l’article 1382 du code civil. L’association doit ainsi verser une provision de 7500 euros dans l’attente des résultats d’une expertise médicale permettant d’évaluer de manière plus précise le préjudice subi.

La cour écarte en revanche la responsabilité du manadier mais sans motiver son arrêt sur ce point. Il aurait été pourtant intéressant de connaître son argumentation sur la question de sa responsabilité du fait des animaux dont il avait la garde.

Cour d’appel de Nîmes, 28 février 2012, N° 11/01085

[1Photo : © Podfoto