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La jurisprudence de la semaine du 2 au 6 avril 2012

Elections / Fonction publique / Hygiène et sécurité au travail / Marchés publics et contrats / Responsabilités / Urbanisme

(dernière mise à jour le 19/03/2013)

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Elections

 L’inéligibilité au conseil général frappant les ingénieurs du génie rural ou des eaux et des forêts porte-t-elle atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales ?

Non, une telle inéligibilité étant limitée aux cantons où elles exercent leurs fonctions ou les ont exercées depuis moins de six mois. Le législateur est en effet compétent, en vertu de l’article 34 de la Constitution, pour fixer les règles concernant le régime électoral des assemblées locales et déterminer les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales. Le Conseil constitutionnel ne dispose pas d’un pouvoir général d’appréciation de même nature que celui du Parlement. En prévoyant que ne sont pas éligibles au conseil général les ingénieurs et agents du génie rural et des eaux et des forêts dans les cantons où ils exercent leurs fonctions ou les ont exercées depuis moins de six mois, les dispositions du 14° de l’article L. 195 du code électoral ont opéré une conciliation qui n’est pas manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles.

Conseil Constitutionnel, 6 avril 2012, n° 2012-230 NOR : CSCX1210227S


Fonction publique

 L’accident survenu à l’intérieur d’un magasin, dans lequel le fonctionnaire s’est arrêté sur son trajet domicile-travail pour acheter un sandwich, peut-il être imputé au service ?

Non : si les détours sur le trajet domicile-travail sont tolérés dès lors qu’ils sont dictés par les nécessités de la vie courante, encore faut-il pour que l’accident soit imputé au service que celui-ci ait lieu sur le trajet du détour et non pendant l’interruption du trajet. Ainsi, seuls peuvent être imputés au service les accidents survenus à l’extérieur du magasin.

Conseil d’État, 4 avril 2012, N° 341190


Hygiène et sécurité au travail

 La victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de l’employeur peut-elle prétendre à la réparation de son préjudice sexuel ?

Oui : "les dispositions de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu’interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, ne font pas obstacle à ce qu’en cas de faute inexcusable de l’employeur, et indépendamment de la majoration de rente servie à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, celle-ci puisse demander à l’employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation, non seulement des chefs de préjudice énumérés par le texte susvisé, mais aussi de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale".

Il en est notamment ainsi du préjudice sexuel, qui comprend tous les préjudices touchant à la sphère sexuelle, et du déficit fonctionnel temporaire.

Cour de cassation, chambre civile 2, 4 avril 2012, N° de pourvoi : 11-14311 11-14594


Marchés publics et contrats

 Une personne publique peut-elle invoquer des blessures aux arbres pour résilier unilatéralement une convention privative d’occupation du domaine public la liant avec l’exploitant d’un parcours acrobatique ?

Oui : il incombe à l’exploitant de veiller à ce que le parcours en hauteur n’occasionne pas de blessures irrémédiables aux arbres. Le desserrement des plateformes et du platelage relève de l’entretien régulier qui incombe à l’exploitant, nonobstant les difficultés de cette opération, qui peut, dans certains cas, nécessiter de démonter entièrement la plateforme (en revanche, le remplacement des plateformes vétustes ou qui ne peuvent être adaptées à l’accroissement de l’arbre relève des grosses réparations incombant au propriétaire). Faute pour l’exploitant d’avoir réalisé les travaux permettant de conserver les lieux en bon état permanent d’entretien et d’usage, la personne publique peut résilier unilatéralement la convention d’occupation du domaine public.

Cour Administrative d’Appel de Nantes, 6 avril 2012, N° 10NT00657


Responsabilités

 La victime d’un accident peut-elle obtenir du responsable la prise en charge de " Viagra " qui lui est désormais nécessaire ?

Potentiellement oui mais encore faut-il que la demande de prise en charge du médicament " Viagra " soit accompagnée d’une justification médicale et de factures correspondantes.

Cour de cassation, chambre criminelle, 3 avril 2012, N° 11-83270


Urbanisme

 En cas d’appel de l’ordonnance du juge fixant l’indemnité d’expropriation, les dispositions autorisant l’expropriant à prendre possession des biens expropriés moyennant le versement d’une indemnité égale aux propositions qu’il a faites et inférieure à celle fixée par le juge de première instance, sont elles conformes à la Constitution ?

Non : "si le législateur peut déterminer les circonstances particulières dans lesquelles la consignation vaut paiement au regard des exigences de l’article 17 de la Déclaration de 1789, ces exigences doivent en principe conduire au versement de l’indemnité au jour de la dépossession". Les dispositions des articles L. 15-1 et L. 15-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique méconnaissent ainsi l’exigence selon laquelle nul ne peut être privé de sa propriété que sous la condition d’une juste et préalable indemnité. Elles sont donc déclarées contraires à la Constitution. Afin de permettre au législateur de mettre fin à cette inconstitutionnalité, l’abrogation de ces dispositions prend effet au 1er juillet 2013.

Conseil constitutionnel, 6 avril 2012, n° 2012-226 QPC NOR : CSCX1210225S


[1Photo : © Treenabeena