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Validité des délégations consenties aux adjoints en cas d’absence du maire

Cour Administrative d’Appel de Marseille, 12 janvier 2012, N° 10MA00918

Absence ou empêchement du maire : le remplacement provisoire par le premier adjoint dans l’ordre des nominations neutralise-t-il les délégations consenties aux autres adjoints ?

 [1]


Non : le maire peut très bien anticiper ses absences en accordant des délégations dans des domaines déterminés à ses adjoints. Dans ce cas, et dès lors que l’absence est dûment constatée, l’adjoint concerné peut prendre les actes dans le domaine délégué même s’il n’est pas le premier adjoint dans l’ordre des nominations.

En l’absence du maire, un adjoint d’une commune de 700 habitants signe un arrêté refusant un permis pour la construction d’une maison d’habitation. Il est en effet titulaire d’une délégation dans le domaine de l’urbanisme en cas d’absence du maire.

Le pétitionnaire demande l’annulation de ce refus, estimant que l’adjoint n’était pas compétent pour prendre une telle décision.
A l’appui de son recours il prétend que le maire ne pouvait, par l’intermédiaire de délégations, neutraliser les dispositions de l’article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales (CGCT) qui donnent priorité, en cas d’empêchement ou d’absence du maire, au premier adjoint dans l’ordre des nominations [2].

Cet argument est rejeté par la cour administrative d’appel de Marseille :

"les dispositions de l’article L. 2122-18 n’ont ni pour objet ni pour effet d’interdire au maire de déléguer une partie de ses fonctions, dans des domaines déterminés, à un adjoint particulier en cas d’absence ou d’empêchement temporaire et de déroger, ainsi, au régime de droit commun régi par l’article L. 2122-17 qui prévoit, dans ces circonstances, son remplacement provisoire par un adjoint choisi dans l’ordre du tableau".

Autrement dit, nonobstant les dispositions spécifiques du CGCT, le maire restait libre d’organiser ses absences par le jeu des délégations accordées aux adjoints.

Mais encore fallait-il, poursuivent les magistrats d’appel, que l’absence du maire soit dûment constatée dans l’acte contesté. En effet l’adjoint concerné, disposait non pas d’une délégation à caractère général en matière d’urbanisme, mais d’une délégation limitée aux seules situations d’absence du maire.

Ainsi, faute d’avoir expressément constaté une telle absence dans l’arrêté litigieux, l’adjoint au maire doit être considéré comme étant incompétent. L’arrêté est donc annulé. Peu importe que, compte-tenu des dispositions du POS, le maire aurait été tenu de prendre une décision similaire.

Cet arrêt illustre, une nouvelle fois, toutes les précautions qui doivent être prises dans le maniement des délégations. Sans grave conséquence ici, la situation aurait pu être bien plus inconfortable pour la commune si le permis avait été accordé et contesté [3] par un voisin mécontent ...

Cour Administrative d’Appel de Marseille, 12 janvier 2012, N° 10MA00918

[1Photo : © Dolnikov Denys

[2Et, à défaut d’adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l’ordre du tableau.

[3Mais ce n’est qu’une hypothèse d’école !