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La jurisprudence de la semaine du 9 au 13 janvier 2012

Associations / Elections / Fonction publique et droit social / Maires et adjoints / Responsabilités / Voirie

(dernière mise à jour le 11/07/2012)

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Associations

 Les associations qui organisent des compétitions sportives sur des voies ouvertes à la circulation publique sont-elles de plein droit responsables des accidents survenus au cours de l’épreuve ?

Non : elles sont tenues d’une obligation de sécurité de moyens et non de résultat. Ainsi un club sportif ne saurait être tenu responsable de l’accident survenu au concurrent d’une épreuve cycliste qui, roulant sur la partie gauche de la chaussée, a été percuté par un automobiliste sur le parcours ouvert à la circulation publique. En effet il a été rappelé aux coureurs l’obligation de respecter le code de la route pendant la compétition correctement signalée et encadrée. L’association a ainsi strictement respecté les obligations prescrites par l’arrêté préfectoral autorisant l’épreuve. C’est à l’assureur du conducteur du véhicule impliqué, qu’il revient, par application de la loi Badinter, d’indemniser la victime, sans recours possible contre l’association organisatrice.

Cour d’appel de Nîmes, 10 janvier 2012, N° 10/03730

 Un syndicat représentatif de salariés d’une association d’aide à domicile est-il recevable à agir en justice pour contester les effets d’un déconventionnement de l’association par la CRAM ?

Oui dès lors que la décision de la CRAM est susceptible d’avoir des conséquences pour l’emploi des salariés de l’association. Est ainsi recevable la demande d’un syndicat qui consiste à faire rectifier les informations données par la CRAM aux personnes âgées bénéficiant des prestations de l’association.

Cour de cassation, chambre sociale, 10 janvier 2012, N° 09-16691


Elections

 Un candidat qui anime un blog dans lequel il présente favorablement sa campagne électorale doit-il intégrer les dépenses correspondantes dans son compte de campagne ?

Pas si le blog est un site d’informations généralistes. Dans cette hypothèse, en effet, le blog doit être assimilé à un organe de presse disposant de la liberté de ses prises de position politiques, lesquelles ne peuvent être assimilées à des procédés de publicité commerciale au sens de l’article L52-1 du code électoral.

Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 10 janvier 2012, n°1108693

 Le droit de contester des élections sénatoriales est-il réservé aux seuls membres du collège électoral sénatorial ?

Non : ce droit est ouvert à toutes les personnes inscrites sur les listes électorales. Ainsi s’agissant des élections sénatoriales, toutes les personnes inscrites sur les listes électorales du département peuvent exercer ce droit.

Conseil constitutionnel, 12 janvier 2012, Décision n° 2011-4538 NOR : CSCX1201320S

 Le président d’un conseil général peut-il convier l’ensemble des électeurs sénatoriaux à se rendre, à l’issue du scrutin et dans l’attente des résultats, à une réception à l’hôtel du département ?

Oui : une telle réception organisée à l’issue du scrutin ne saurait être regardée comme la participation prohibée d’une collectivité territoriale au financement d’une campagne électorale.

Conseil constitutionnel, 12 janvier 2012, Décision n° 2011-4541 NOR : CSCX1201323S

 L’organisation, à l’initiative de plusieurs associations et syndicats, d’une réunion ayant pour thème la défense d’un hôpital, au cours de laquelle s’exprime publiquement un candidat aux élections sénatoriales, constitue-t-elle une participation de personnes morales de droit privé au financement de la campagne électorale ?

Pas en l’absence de lien direct entre cette manifestation et le scrutin sénatorial.

Conseil constitutionnel, 12 janvier 2012, Décision n° 2011-4541 NOR : CSCX1201323S


Fonction publique et droit social

 Un délégué syndical peut-il, en l’absence d’accord d’entreprise autorisant l’utilisation de la messagerie électronique par les organisations syndicales, diffuser via la messagerie professionnelle un tract syndical à l’ensemble des salariés ?

Non : une telle utilisation de l’outil de travail doit, selon l’article L2142-6 du code du travail, faire l’objet d’un accord d’entreprise qui définit les modalités de cette mise à disposition ou de ce mode de diffusion, en précisant notamment les conditions d’accès des organisations syndicales et les règles techniques visant à préserver la liberté de choix des salariés d’accepter ou de refuser un message. Pour autant l’avertissement infligé à un responsable syndical n’est pas en l’espèce jugé justifié dès lors qu’il n’a pas diffusé le message à l’ensemble des salariés mais aux seuls responsables d’agence. Ainsi il ne s’agit pas d’une diffusion au sens de l’article L2142-6 du code du travail.

Cour de cassation, chambre sociale, 10 janvier 2012,
N° 10-18558

 Un salarié masculin peut-il être licencié pour avoir refusé d’ôter ses boucles d’oreilles lorsqu’il est en contact avec la clientèle ?

Pas si l’employeur n’est pas en mesure de justifier que la directive donnée au salarié d’enlever ses boucles d’oreilles est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. En effet en vertu de l’article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être licencié en raison de son sexe ou de son apparence physique. Est ainsi jugé nul le licenciement d’un serveur d’un restaurant gastronomique ayant refusé de retirer ses boucles d’oreilles pendant le service. Peu importe que l’établissement reçoive une clientèle exigeante attirée par sa réputation de marque, laquelle impose une tenue sobre du personnel en salle.

Cour de cassation, Chambre sociale, 11 janvier 2012, n° 10-28213


 Une entreprise prestataire peut-elle utiliser les enregistrements des caméras de vidéo-surveillance installées par le client (éventuellement une collectivité) pour contrôler les horaires de travail de ses salariés ?

Oui mais encore faut-il que les salariés aient été préalablement informés de l’existence du dispositif. En l’espèce un employeur avait demandé de visionner les enregistrements des caméras de vidéo-surveillance placées à l’entrée d’une société cliente afin d’établir un relevé des heures d’arrivée et de départ de ses salariés à comparer avec les relevés d’activité établis par le chef d’équipe. L’employeur n’avait informé ses salariés de ce dispositif qu’une fois celui-ci mis en place. La cour d’appel avait admis le mode de preuve, estimant que l’employeur n’avait pas l’obligation d’informer ses salariés, le procédé ayant été installé par le client de l’entreprise. La Cour de cassation censure cette position :

"si l’employeur a le droit de contrôler et de surveiller l’activité de ses salariés pendant le temps de travail, il ne peut être autorisé à utiliser comme mode de preuve les enregistrements d’un système de vidéo-surveillance installé sur le site d’une société cliente permettant le contrôle de leur activité dont les intéressés n’ont pas été préalablement informés de l’existence".

Cour de cassation, chambre sociale, 10 janvier 2012, N° 10-23482


 Entretien annuel : la fiche d’évaluation peut-elle faire mention d’une disponibilité réduite du fait des fonctions syndicales exercées par l’intéressé ?

Non : il est interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions. Peu importe que la référence aux activités syndicales exercées constitue un simple constat dépourvu de jugement de valeur ne remettant pas en cause la qualité du travail de l’intéressé soulignée dans d’autres rubriques d’évaluation et que les éléments de fait présentés par le salarié ne laissent pas supposer l’existence d’une discrimination syndicale.

Cour de cassation, chambre sociale, 11 janvier 2012, N° 10-16655


 Un cadre peut-il être licencié pour avoir organisé, en dehors des heures de travail et en invoquant un motif professionnel, un rendez-vous avec une salariée placée sous ses ordres dans... une chambre d’hôtel ?

Oui : "le fait pour un salarié d’abuser de son pouvoir hiérarchique dans le but d’obtenir des faveurs sexuelles constitue un harcèlement sexuel même si les agissements ont lieu en dehors du temps et du lieu de travail".

Cour de cassation, chambre sociale, 11 janvier 2012, N° 10-12930

 Un accord collectif peut-il instituer une prime d’assiduité dégressive en fonction des seules absences pour arrêt maladie ?

Non : un tel dispositif constitue une discrimination à raison de l’état de santé du salarié. Si un accord collectif peut tenir compte des absences pour le paiement d’une prime, c’est à la condition que toutes les absences, hormis celles qui sont légalement assimilées à un temps de travail effectif, entraînent les mêmes conséquences sur son attribution.

Cour de cassation, chambre sociale, 11 janvier 2012, N° 10-23139

 Un contrat de travail peut-il prévoir une période d’essai de six mois renouvelable une fois ?

Non : une période d’essai dont la durée, renouvellement inclus, atteint un an, est "déraisonnable, au regard de la finalité de la période d’essai et de l’exclusion des règles du licenciement durant cette période".

Cour de cassation, chambre sociale, 11 janvier 2012, N° 10-17945


Maires et adjoints

 Absence ou empêchement du maire : le remplacement provisoire par le premier adjoint dans l’ordre des nominations neutralise-t-il les délégations consenties aux autres adjoints ?

Non : le maire peut très bien anticiper ses absences en accordant des délégations dans des domaines déterminés à ses adjoints. Dans ce cas, et dès lors que l’absence est dûment constatée, l’adjoint concerné peut prendre les actes dans le domaine délégué même s’il n’est pas le premier adjoint dans l’ordre des nominations.

Cour Administrative d’Appel de Marseille, 12 janvier 2012, N° 10MA00918


Responsabilités

 Le principe de libre administration des collectivités territoriales s’oppose-t-il a ce que le gouvernement puisse suspendre ou révoquer les maires et les adjoints de leurs fonctions ?

Non : l’institution de sanctions, instituées par la loi et réprimant les manquements des maires aux obligations qui s’attachent à leurs fonctions ne méconnaît pas, en elle-même, la libre administration des collectivités territoriales. Les dispositions de l’article L. 2122-16 du code général des collectivités territoriales sont ainsi jugées conformes à la Constitution. Pour rappel ce dispositif prévoit que le maire et les adjoints, après avoir été entendus ou invités à fournir des explications écrites sur les faits qui leur sont reprochés, peuvent être suspendus par arrêté ministériel motivé pour une durée qui n’excède pas un mois. Ils peuvent être également révoqués par décret motivé pris en conseil des ministres, la révocation emportant de plein droit l’inéligibilité aux fonctions de maire et à celles d’adjoint pendant une durée d’un an (à moins qu’il ne soit procédé auparavant au renouvellement général des conseils municipaux).

Conseil constitutionnel, 12 janvier 2012, Décision n° 2011-210


Voirie

 La responsabilité de la collectivité est-elle présumée en cas de chute d’un piéton sur une voie publique non éclairée ?

Non. Il appartient à la victime d’établir un lien de causalité directe et certain entre sa chute et l’absence d’éclairage. Cette preuve n’étant pas rapportée, une commune [2] n’est ainsi pas jugée responsable de la chute d’une administrée, qui regagnant le soir son domicile, a heurté une grille tombée sur la voie publique.

Tribunal administratif Clermont-Ferrand 10 janvier 2012 n°1100032

 La présence d’une plaque de verglas sur un trottoir est-elle nécessairement révélatrice d’un défaut d’entretien normal de l’ouvrage public ?

Non : en hiver les risques de chute due au verglas sont de ceux contre lesquels les usagers de la voie publique doivent se prémunir en prenant toutes les précautions utiles. Compte-tenu de la saison, la présence d’une plaque de verglas sur un trottoir légèrement en pente ne constitue pas en effet un danger exceptionnel. Ce d’autant que les lieux ont été sablés le matin même de l’accident et que rien n’indique que la plaque se soit formée depuis assez longtemps pour obliger les services municipaux à procéder à un second sablage dans la journée ou à signaler aux usagers la présence de verglas.

Tribunal administratif de Rouen, 12 janvier 2012, N°0900691


[1Photo : © Treenabeena

[2Gerzat dans le Puy-de-Dôme10 000 habitants