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La jurisprudence de la semaine du 10 au 14 octobre 2011

Associations / Fonction publique et droit social / Justice / Pouvoirs de police / Responsabilité / Urbanisme

(dernière mise à jour le 24/04/2012)

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Fonction publique et droit social (y compris associations)

 Les animateurs de colonie de vacances ont-ils droit, comme tout autre salarié, à un repos quotidien de 11 heures consécutives ?

Oui. Les dispositions du droit interne qui excluent les animateurs de colonies de vacances du droit à un repos quotidien sont jugées incompatibles avec le droit communautaire faute de prévoir des contreparties ou des protections suffisantes aux intéressés. Le décret n° 2006-950 du 28 juillet 2006 relatif à l’engagement éducatif est en conséquence annulé. Dans l’attente d’un éventuel nouveau texte qui prévoirait des garanties suffisantes, les animateurs de colonies de vacances ont ainsi droit, comme tout salarié, au bénéficie d’un repos quotidien d’une durée minimale de onze heures consécutives.

Conseil d’État, 10 octobre 2011, N° 301014


 Un salarié d’une association (ou un agent de droit privé d’une collectivité) peut-il être licencié pour avoir exercé une activité (tenue d’un stand sur un marché) pendant un arrêt maladie ?

Non : l’inobservation par le salarié de ses obligations à l’égard de la sécurité sociale ne peut à elle seule justifier un licenciement. En effet l’exercice d’une activité pendant un arrêt de travail provoqué par la maladie ne constitue pas en lui-même un manquement à l’obligation de loyauté qui subsiste pendant la durée de cet arrêt. Pour fonder un licenciement, l’acte commis par un salarié durant la suspension du contrat de travail doit causer un préjudice à l’employeur. Est ainsi non fondé, le licenciement pour faute grave d’un salarié au motif qu’il a travaillé pour son compte sur les marchés au stand de son épouse alors qu’il se trouvait en arrêt de travail.

Cour de cassation, chambre sociale, 12 octobre 2011, N° 10-16649

 Un directeur général mis au placard, dans l’attente d’une fin de détachement, peut-il être privé de traitement pour absence de service fait ?

Non : le DG n’étant plus en mesure d’accomplir son service, la collectivité ne peut invoquer l’absence de service fait pour ne plus le payer.

Conseil d’État, 10 octobre 2011, N° 341729


Justice

 La victime d’un viol par un criminel prématurément relâché dans le cadre d’une autre affaire criminelle à la suite d’une erreur du juge d’instruction peut-il rechercher la responsabilité de l’Etat pour fonctionnement défectueux du service public de la justice ?

Non : le principe de responsabilité posé par l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire ne peut être utilement invoqué que par l’usager qui est, soit directement, soit par ricochet, victime du fonctionnement du service public de la justice. Tel n’est pas le cas d’une victime qui n’est pas partie à une procédure criminelle viciée par un dysfonctionnement judiciaire.

Cour de cassation, chambre civile 1, 12 octobre 2011, N° 10-19720


Pouvoirs de police

 L’administration peut-elle être tenue responsable de la mauvaise exécution par un prestataire privé de la mise en œuvre d’une opération décidée dans le cadre de pouvoirs de police ?

Oui : le contrat administratif qui associe une personne privée à la mise en œuvre d’une mesure de police est exécuté sous le contrôle et la responsabilité de l’administration. L’Etat est ainsi jugé responsable des dommages causés à une exploitation agricole dans le cadre d’opération de désinfection à la suite de la détection de cas d’épizootie de fièvre aphteuse (le prestataire privé ayant, au cours des opérations, causé des dommages à la charpente du bâtiment d’élevage).

Conseil d’État, 10 octobre 2011, N° 337062


Responsabilités

 L’administration peut-elle, avant tout jugement et indépendamment de toute procédure disciplinaire, priver de traitement un fonctionnaire qui est poursuivi pénalement ?

Oui si l’intéressé est, en raison d’un placement en détention provisoire ou d’une mesure de contrôle judiciaire, dans l’impossibilité de poursuivre l’exercice de ses fonctions. En effet les dispositions relatives à la suspension de fonction qui prévoient le maintien de la moitié du traitement, n’interdisent pas à l’administration de mettre fin à tout moment à une mesure de suspension prise antérieurement à l’égard d’un fonctionnaire et, dans le cas où celui-ci fait l’objet d’une incarcération ou d’une mesure de contrôle judiciaire lui interdisant d’exercer ses fonctions, d’interrompre par voie de conséquence le versement du traitement pour absence de service fait à compter de la date à laquelle la mesure de suspension cesse de s’appliquer. Peu importe qu’aucune décision pénale ou disciplinaire n’ait été prise à l’encontre de l’intéressé et qu’aucun changement des circonstances de droit ou de fait ne soit intervenu. La perte de traitement pour absence de service fait ne méconnaît pas le principe de la présomption d’innocence posé au paragraphe 3 de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Conseil d’État, 10 octobre 2011, N° 333707

 Un opposant qui, par l’intermédiaire d’une demande préalable pour l’exercice d’une action au nom de la commune, accuse le maire de prise illégale d’intérêts peut-il se rendre coupable de diffamation ?

Pas s’il présente des éléments sérieux à l’appui de sa demande. Peu importe que les accusations portées se révèlent finalement sans fondement, le requérant ayant manqué de prudence et de mesure dans l’expression. En effet, il n’a ainsi fait qu’exercer une faculté qui est ouverte à tous les contribuables par le code général des collectivités territoriales.

Cour de cassation, chambre criminelle, 11 octobre 2011, N° 10-88657

 Une commune peut-elle être déclarée responsable de la chute d’un fidèle dans une église causée par la vétusté de l’édifice classé aux monuments historiques ?

Potentiellement oui : les fidèles sont des usagers de l’ouvrage public, propriété de la commune, qui ont droit à la sécurité. Encore faut-il que l’accident trouve son origine dans un défaut d’entretien normal de l’ouvrage. Des défectuosités (ex : dalles descellées ou affaissées) inhérentes à la vétusté du bâtiment ne suffisent pas à caractériser un tel défaut d’entretien dès lors qu’elles n’excèdent pas celles auxquels les usagers doivent s’attendre à y rencontrer. Il appartient aux fidèles de prendre, lors de leurs déplacements dans l’église, les précautions rendues nécessaires par la vétusté du bâtiment

Tribunal administratif de Poitiers, 13 octobre 2011, n°0901727


Urbanisme

 Un maire peut-il refuser de délivrer un permis de construire en se fondant sur les dispositions du plan d’occupation des sols déclaré illégal pour vice de procédure ?

Non : si le maire est tenu, lorsqu’il statue sur une demande d’autorisation après l’expiration d’un délai de six mois à compter de la prise d’effet du document d’urbanisme, de se fonder sur ce document dès lors que sa légalité ne serait affectée que par des vices de procédure ou de forme, il n’en va pas de même, en vertu des dispositions de l’article L. 125-5 du code de l’urbanisme, lorsque est intervenue une décision juridictionnelle déclarant ce document illégal. En effet la déclaration d’illégalité par le juge administratif d’un schéma directeur, d’un plan d’occupation des sols ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu a pour effet, au même titre qu’une annulation contentieuse, de remettre en vigueur le document d’urbanisme en tenant lieu immédiatement antérieur et, à défaut, les dispositions du code de l’urbanisme auxquelles s’était substitué le document déclaré illégal.

Conseil d’État, 10 octobre 2011, N° 329623

- Le juge administratif peut-il ordonner la destruction d’un ouvrage public construit en vertu d’une autorisation de construire jugée illégale ?

Oui tant que les constructions déjà réalisées n’ont pas encore été affectées au service public ou à l’usage du public, notamment en raison de leur inachèvement. Le juge administratif est alors compétent pour ordonner dans tous les cas, la suspension des travaux et, si les conditions sont réunies, la destruction totale ou partielle des constructions réalisées.

Conseil d’État, 14 octobre 2011, N° 320371

[1Photo : © Treenabeena