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Appel d’offres : possibilité pour un candidat de rectifier une erreur purement matérielle

Conseil d’État, 21 septembre 2011, N° 349149

Un candidat à un appel d’offres peut-il, en réponse à une demande de précisions, rectifier le montant de son offre en invoquant une erreur matérielle (oubli d’un zéro) ?

 [1]


Oui si l’erreur commise est d’une grossièreté telle que l’acheteur public n’aurait pu s’en prévaloir de bonne foi si l’offre avait été retenue.

Un département lance une procédure d’appel d’offre pour le transport et la mise en centre de stockage et de traitement de déchets dangereux. L’offre de l’un des candidats apparaissant anormalement faible, le département adresse une demande de précision sur le fondement des dispositions de l’article 59 du code des marchés publics.

Le candidat répond qu’il a oublié un zéro à son offre [2] et la corrige en conséquence.

La commission d’appel d’offres rejette l’offre ainsi modifiée estimant que l’entreprise n’a pas respecté le principe d’intangibilité de l’offre.

Le juge des référés annule la procédure de passation du marché litigieux à compter de l’examen des offres. Il estime que l’entreprise était fondée à rectifier l’erreur commise "eu égard au caractère très marginal de la prestation concernée et à l’incidence négligeable de cette rectification en cause sur le montant global de l’offre de l’intéressée".

Saisi d’un pourvoi, le Conseil d’Etat confirme l’annulation du marché mais par une autre motivation :

si les dispositions de l’article 59 du code des marchés publics "s’opposent en principe à toute modification du montant de l’offre à l’initiative du candidat ou du pouvoir adjudicateur, ce principe ne saurait recevoir application dans le cas exceptionnel où il s’agit de rectifier une erreur purement matérielle, d’une nature telle que nul ne pourrait s’en prévaloir de bonne foi dans l’hypothèse où le candidat verrait son offre retenue".

Le juge des référés ne pouvait donc annuler le marché sans vérifier si l’erreur présentait un tel caractère.

Evoquant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat estime que tel est bien le cas en l’espèce.

En effet la décomposition du prix faisait apparaître la mention du seul prix unitaire de transport de ces déchets et omettait la ligne tarifaire correspondant à leur stockage et traitement. Ce qu’a d’ailleurs décelé le département, comme en témoigne sa demande de précision.

L’entreprise était donc fondée à rectifier cette erreur purement matérielle sans violer le principe d’intangibilité de l’offre dès lors que l’erreur "était d’une nature telle que nul, notamment pas le département, n’aurait pu ensuite s’en prévaloir de bonne foi dans l’hypothèse où l’offre du groupement dont la société était le mandataire aurait été retenue".

Conseil d’État, 21 septembre 2011, N° 349149

[1Photo : © Dolnikov Denys

[2Le prix unitaire étant de 220 euros et non de 22 euros comme indiqué par erreur.