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La jurisprudence de la semaine du 3 au 7 octobre 2011

Fiscalité et finances publiques / Fonction publique / Hygiène et sécurité au travail / Marchés publics et contrats / Responsabilités / Urbanisme

(dernière mise à jour le 1/02/2012)

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Fiscalité et finances publiques

 Toutes les communes peuvent-elles instituer, sans attendre le 1er janvier 2014, la nouvelle taxe locale sur la publicité extérieure au tarif maximal ?

Non. Il résulte de l’article L. 2333-16 du CGCT que seules les communes qui ne percevaient aucune taxe de publicité en 2008 peuvent instituer la nouvelle taxe locale sur la publicité extérieure au tarif maximal, sans disposition transitoire, dès le 1er janvier 2009. Les communes ayant déjà imposé la publicité en 2008, doivent appliquer le tarif de référence progressif, prévu par ledit article L. 2333-16, pendant la période transitoire du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2013.

Cour de cassation, chambre commerciale, 4 octobre 2011, N° 10-23614


Fonction publique

 L’état d’ébriété d’un agent peut-il justifier son exclusion définitive directe ?

Oui dès lors que l’état d’imprégnation alcoolique de l’agent entraîne des risques d’accidents (pour autrui ou pour lui même) et porte gravement atteinte à l’image du service public auprès des usagers. L’autorité territoriale est fondée à choisir d’emblée la sanction la plus grave. Peu importe que la dépendance à l’alcool de l’agent révèle un état pathologique qui aurait pu se traduire par une déclaration d’inaptitude de l’agent à l’exercice de ses fonctions. Est ainsi justifiée l’exclusion définitive d’un agent travaillant dans une déchetterie dont l’état habituel d’imprégnation alcoolique sur son lieu de travail le met dans l’impossibilité d’exercer normalement ses fonctions.

Cour administrative d’appel de Lyon, 4 octobre 2011, N° 10LY00723


 Neutralité du service public : une assistante maternelle communale qui substitue, en signe d’appartenance religieuse, le port d’un bandana à celui d’un voile peut-elle être licenciée pour faute grave ?

Oui dès lors que l’agent persiste ainsi à vouloir marquer de manière manifeste son appartenance religieuse. Le fait pour un agent public, quelles que soient ses fonctions, de manifester dans l’exercice de ces dernières ses croyances religieuses, notamment en portant un signe destiné à marquer son appartenance à une religion, constitue un manquement à ses obligations professionnelles.

Est ainsi justifié le licenciement pour faute grave d’une assistante maternelle qui, en dépit des mises en garde et des tentatives de médiation, persiste à vouloir se couvrir la tête en signe d’appartenance religieuse. Peu importe que l’intéressée ait substitué un bandana au port du voile et qu’elle ne se couvre la tête que devant les parents. Cette circonstance ne saurait, en effet, l’exonérer du nécessaire respect du principe de neutralité à l’égard des usagers du service public.

Cour Administrative d’Appel de Versailles, 6 octobre 2011, N° 09VE02048


 Appartient-il au conseil de discipline de se prononcer sur la question de l’incompatibilité entre les mentions portées sur le casier judiciaire d’un fonctionnaire condamné pénalement et l’exercice de ses fonctions ?

Non : en vertu des dispositions de l’article 24 de la loi du 13 juillet 1983, il n’appartient qu’à la commission administrative paritaire (CAP) de donner un avis sur la question d’une telle incompatibilité.

Cour administrative d’appel de Douai, 6 octobre 2011, N° 10DA00499


 Un agent condamné pénalement pour des faits commis dans sa vie privée peut-il être sanctionné disciplinairement ?

Oui. Tel est le cas notamment si les faits pour lequels il a été condamné sont particulièrement graves et ont porté atteinte à la dignité de la fonction publique. Est ainsi justifiée la révocation d’un agent condamné à une peine de cinq ans d’emprisonnement dont trois ans avec sursis, pour avoir agressé sexuellement une mineure handicapée. Ce d’autant plus que chargé notamment d’effectuer des travaux de peinture et de voirie sur l’ensemble du territoire de la commune et de poser des barrières de sécurité lors des nombreuses manifestations et fêtes publiques, il peut être amené à rencontrer des mineurs dans le cadre de ses fonctions.

Cour administrative d’appel de Douai, 6 octobre 2011, N° 10DA01437

 Un licenciement pour insuffisance professionnelle constitue-t-il une sanction disciplinaire ?

Non. Il en résulte notamment que l’agent licencié ne peut invoquer le caractère disproportionné de la mesure. Est ainsi justifié le licenciement pour insuffisance professionelle d’une ATSEM en raison de relations conflictuelles avec ses collègues de travail, le personnel enseignant et les enfants.

Cour administrative d’appel de Douai, 6 octobre 2011, N° 10DA00373

 Le refus d’un agent contractuel de renouveler son CDD est-il assimilable à une démission ?

Non. Une commune ne peut ainsi porter la mention "démission" sur une attestation demandée par l’agent pour la perception des Assedic. Seule la mention "Fin de Contrat à durée déterminée" doit être portée sur ladite attestation.

Cour Administrative d’Appel de Versailles, 6ème chambre, 06/10/2011 N° 09VE02466


Hygiène et sécurité au travail

 L’obligation de chaque travailleur de ne pas nuire à la sécurité de ses collègues de travail s’applique-t-elle également sur le parking de l’employeur ?

Oui. Est ainsi justifié le licenciement d’un salarié qui, après avoir laissé son chien dans sa voiture, n’a pas pu empêcher la fuite de l’animal et l’attaque d’une salariée sur le parking de l’entreprise. Il a ainsi manqué à son obligation de ne pas mettre en danger, dans l’enceinte de l’entreprise, d’autres membres du personnel.

Cour de cassation, chambre sociale, 4 octobre 2011, N° 10-18862


Marchés publics et contrats

 Le titulaire d’un marché a-t-il droit à la réparation intégrale de son préjudice en cas de résiliation du marché par le pouvoir adjudicateur ?

Oui si la résiliation est abusive : "en cas de résiliation abusive d’un marché, son titulaire a droit à l’indemnisation de l’intégralité de son préjudice en résultant directement". Ainsi, s’agissant d’une remise anticipée de véhicules loués, l’administration ne peut se contenter de verser une indemnité de 5 % du montant du loyer. Toutefois, dans l’évaluation du préjudice subi par la société, il y a lieu de tenir compte de ce que, eu égard à la date anticipée de 5 mois à laquelle les véhicules lui ont été en définitive restitués, la valeur vénale de ces derniers était nécessairement supérieure à ce qu’elle aurait été au terme du contrat initial et a compensé partiellement la perte des loyers non encaissés.

Cour administrative d’appel de Lyon, 6 octobre 2011, N° 10LY00615


Responsabilité

 Un maire dénigré sur un blog peut-il obtenir réparation en exerçant une action de droit commun sur le fondement de l’article 1382 du code civil ?

Non : « les abus de la liberté d’expression ne peuvent être réprimés que par la loi du 29 juillet 1881 » (laquelle nécessite le respect d’un formalisme très strict). Doit être ainsi rejetée l’action d’un maire demandant réparation, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, à l’auteur d’un blog qui l’avait dénigré.

Ironie de l’actualité juridique, cet arrêt a été rendu le jour même du 10è colloque de l’Observatoire qui avait notamment pour thème les atteintes à l’honneur des élus à l’heure de facebook et des réseaux sociaux... A cette occasion, il a notamment été rappelé le caractère très hasardeux et parfois contreproductif de poursuites contre les auteurs de blogs diffamants. Cette affaire en est l’illustration parfaite puisque l’action en justice a remis en lumière, plus de 3 ans après, des faits qui, sans ce coup de projecteur, auraient été oubliés par l’opinion publique. Ce d’autant que la consultation du blog était, comme souvent dans ce type d’affaires, restée très confidentielle. Mieux vaut donc y réfléchir à deux fois avant d’engager une action judiciaire.

Cour de cassation, 1ère chambre civile, 6 octobre 2011, n°10-18142


Urbanisme

 Un propriétaire illégalement exproprié peut-il obtenir la restitution de son bien même si des ouvrages publics y ont, entre-temps, été édifiés ?

Oui : la présence d’ouvrages publics réalisés par l’autorité expropriante sur le bien litigieux ne constitue pas un obstacle de principe à la restitution du bien à son propriétaire. Ce dernier peut ainsi demander la restitution du bien en son état initial ce qui implique la démolition des ouvrages construits. Sauf si le juge de l’expropriation estime que des exigences d’intérêt général ou la nature des ouvrages construits s’y opposent (auquel cas l’exproprié a seulement droit à des dommages-intérêts).

Cour de cassation, chambre civile 3, 5 octobre 2011, N° 10-30121

[1Photo : © Treenabeena