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Messagerie professionnelle et expression syndicale

Tribunal administratif de Besançon, 19 décembre 2006, n°0400718

Quelles sont les règles d’utilisation de la messagerie professionnelle par les organisations syndicales ?

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A l’occasion d’une inauguration réunissant diverses personnalités, une syndicaliste invite par messagerie ses collègues à profiter de l’occasion pour exprimer leur désaccord à la politique menée au plan local et national par la diffusion d’un tract.
Estimant que l’agent avait violé l’interdiction d’utiliser la messagerie à des fins personnelles ou syndicales, l’autorité territoriale inflige un blâme à l’agent. Le tribunal administratif de Besançon annule la sanction :

1° il résulte du préambule de la Constitution de 1946, de l’article 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, de l’article L411-1 du Code du travail et de l’article 8 de la loi du 13 juillet 1983 portant droit et obligation des fonctionnaires "que d’une part, le droit syndical constitue une liberté fondamentale dont l’exercice doit être protégé, et que, d’autre part, nul ne peut apporter à cette liberté fondamentale des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché".

2° Si le maire pouvait dans la charte internet et par note de service interdire l’utilisation des messageries Intranet et internet à des fins personnelles (et avait ainsi pu valablement s’opposer en 2003 à la diffusion d’un message contre la guerre en Irak), il ne pouvait étendre cette interdiction au message à caractère purement syndical sans commettre d’erreur de droit.

3° Le courriel, et le tract qui lui était annexé en pièce jointe, ne contenaient aucune expression diffamatoire ou injurieuse, ni attaque personnelle et ne présentaient pas "un caractère pornographique, raciste ou illicite et n’étaient pas susceptible de porter atteinte à l’intégrité ou à la sensibilité d’un autre internaute ou à l’image de la ville".

4° La diffusion du message litigieux n’a eu aucune incidence perturbatrice ou dommageable sur le fonctionnement des services publics de la ville.

5° L’appel à manifester "n’était adressé qu’aux seuls agents municipaux de la ville (...) et ne contenait aucune incitation à des actes contraires à l’ordre public".

🚨 Dans une autre affaire similaire jugée le 17 octobre 2017 la cour administrative d’appel de Bordeaux a jugé que la liberté de communication des syndicats n’est pas méconnue lorsque l’utilisation de l’intranet ou de la messagerie électronique du service ne leur sont pas autorisés

Tribunal administratif de Besançon, 19 décembre 2006, n°0400718

[1Photo : © Marc Dietrich