Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

Relations contractuelles avec les SEM : attention au favoritisme

Cass crim 25 juin 2008 N° de pourvoi : 07-88373 Publié au bulletin Rejet

Le fait qu’une commune soit actionnaire majoritaire d’une SEM propriétaire du titre du bulletin municipal dispense-t-elle la commune des règles mise en concurrence pour la réalisation dudit bulletin ?

Courant novembre 2002 une commune de la région PACA (45000 habitants) confie, sans mise en concurrence, le marché relatif à la création et à la réalisation d’un bulletin municipal, à une société d’économie mixte dont la commune est actionnaire majoritaire. L’année suivante le marché est attribué selon la même procédure à la même société qui entre-temps a été transformée en société anonyme. Des poursuites sont engagées contre le maire et un adjoint pour favoritisme et contre le directeur de la SEM pour recel. Ils sont tous les trois reconnus coupables et condamnés à 10 000 euros d’amende avec sursis : l’adjoint au maire pour avoir signé les actes d’engagement ; le maire pour avoir "participé aux délibérations des conseils municipaux ayant approuvé la passation des marchés négociés". Les élus se pourvoient en cassation en relevant que :

1° "la passation d’un marché public sans mise en concurrence, se justifie lorsqu’il ne peut être confié qu’à un prestataire déterminé en raison de droits d’exclusivité qu’il détient". Or en l’espèce, poursuivent-ils, la SEM était propriétaire exclusive du titre, ce qui faisait d’elle le seul prestataire susceptible de réaliser ce magazine ;

2° "en cas de contrat dit "in house", les marchés publics peuvent être passés sans appel d’offres. Tel est le cas selon eux en l’espèce, dès lors que les sociétés "étaient contrôlées par la collectivité territoriale détenant la majorité de leur capital social".

3° la ville de Martigues avait obtenu l’accord "du contrôle de légalité, avant la passation des marchés, objet des poursuites".

La Cour de cassation rejette un à un ces moyens :

1° "Le simple fait que la société attributaire du marché soit propriétaire du titre " Reflets " ne dispensait pas la commune d’une mise en concurrence, le support du bulletin municipal ne pouvant être " prédésigné " par la détention de droits exclusifs"

2° "la participation, fût- elle minoritaire, d’une entreprise privée dans le capital d’une société à laquelle participe également une collectivité locale exclut en tout état de cause que celle- ci puisse exercer sur cette société un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services"

3° « Les faits ont été commis en connaissance de cause par les élus qui, en raison de leur expérience et de leur ancienneté dans leurs fonctions et dont l’attention avait été appelée dès 1999 par la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sur la nécessité d’une mise en concurrence, ne pouvaient ignorer l’illégalité de la procédure litigieuse ». En outre « aucun accord préalable sur la procédure à suivre [n’a] été donné par l’autorité préfectorale pour les marchés, objet des poursuites ».