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Protection fonctionnelle ou paix sociale : il faut parfois choisir...

Conseil d’État, 26 juillet 2011, N° 336114

Une administration peut-elle, pour apaiser des tensions sociales, refuser d’accorder la protection fonctionnelle à un agent qui a déposé plainte pour diffamation contre des syndicalistes ?

 [1]


Oui si la collectivité peut justifier d’un intérêt général motivant un tel refus. Tel est le cas notamment si la poursuite d’une action judiciaire en diffamation contre les auteurs d’un tract syndical serait de nature à aggraver un climat social déjà tendu et susceptible de nuire à la qualité du service rendu.

Une agent contractuelle est visée par un tract syndical qui lui impute des problèmes comportementaux. Elle porte plainte pour diffamation et demande la protection fonctionnelle à son administration.

L’employeur public est embarrassé par cette demande, le climat social au sein du service étant extrêmement tendu. Il est décidé de ne pas renouveler le contrat de deux ans de la plaignante dont le comportement n’est pas jugé étranger à la dégradation des relations de travail.

L’administration en profite pour décliner la demande de protection, au motif, qu’au moment de la décision, l’intéressée n’avait plus désormais la qualité d’agent public...

Le Conseil d’Etat désapprouve les juges du fond d’avoir validé un tel refus :

" la circonstance que la personne qui demande le bénéfice de cette protection a perdu la qualité d’agent public à la date de la décision statuant sur cette demande est sans incidence sur l’obligation de protection qui incombe à la collectivité publique qui l’employait à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire à l’agent".

Il faut dire qu’entre-temps le législateur est intervenu [2] pour préciser clairement que c’est la collectivité publique qui emploie le fonctionnaire à la date des faits en cause [3] d’assurer la protection.

Pour autant, le Conseil d’Etat rappelle que l’administration peut, pour un motif d’intérêt général, décliner la protection fonctionnelle sollicitée par un agent attaqué.

Tel est jugé le cas en l’espèce. En effet le relationnel extrêmement difficile de l’agent n’est pas étranger à l’existence d’un climat gravement et durablement conflictuel au sein du service. Ainsi la poursuite de l’action en diffamation engagée par celle-ci ne pouvait qu’aggraver ce climat et était susceptible d’avoir une incidence sur la qualité du service rendu. Le refus de l’employeur de prendre en charge les frais de procédure et d’avocat engagés par l’ex-agent est donc bien justifié.

Conseil d’État, 26 juillet 2011, N° 336114

[1Photo : © Dmitriy Shironosov

[2Loi n°2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit

[3Ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire.