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Prise illégale d’intérêts : vous avez dit prescription ?

Cass crim 21 septembre 2005

Mieux vaut manier la double casquette avec prudence ! Et cela d’autant plus que la prescription du délit de prise illégale d’intérêts ne court pas à compter de la signature du contrat : le compteur est remis à zéro à chaque acte administratif intéressé !

Un syndicat intercommunal confie à une SEM une mission de suivi technique de l’usine d’incinération des ordures ménagères de la commune. Le directeur technique de cette SEM se voit subdéléguer cette mission dans le cadre de son activité libérale exercée au sein d’un cabinet. Selon un schéma identique, la SEM a subdélégué au même directeur plusieurs maîtrises d’ouvrage pour la modernisation de l’usine d’incinération.

Poursuivi notamment pour prise illégale d’intérêts, le directeur de la SEM est relaxé de certains chefs de poursuites dès lors que :

 s’agissant de la mission technique subdéléguée au prévenu, " la SEM n’ayant mission ni de contrôler ou de surveiller de la société, ni de liquider ou de payer les marchés que le syndicat pouvait être amené à passer", le prévenu n’avait lui même, par ricochet, aucune fonction de contrôle ou de surveillance sur la société retenue.

 s’agissant des marchés de modernisation, plusieurs d’entre eux ont été passés plus de trois ans avant le réquisitoire complémentaire interrompant la prescription.

Aucun de ces arguments ne trouve grâce auprès de la Cour de cassation qui, sur pourvoi du Procureur Général, casse et annule la décision des juges d’appel :

 d’une part la SEM avait bel et bien une mission de contrôle et de surveillance puisqu’elle devait "notamment, suivre la comptabilité des quantités récupérées et incinérées, suivre certaines prestations de la société, contribuer à la mise en place du budget global du Syndicat et suivre les ventes et l’amortissement des investissements" ;

 d’autre part la prescription n’était pas acquise dès lors que "le délit de prise illégale d’intérêts se prescrit à compter du dernier acte administratif accompli par l’agent public par lequel il prend ou reçoit directement ou indirectement un intérêt dans une opération dont il a l’administration ou la surveillance". La Cour d’appel aurait dû rechercher "si le prévenu, lors de l’exécution de ces contrats, n’avait pas réalisé d’acte nouveau d’administration le plaçant en position de surveillé et de surveillant".