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Dessous de table et financement associatif : même corruption !

Cour de cassation, 22 septembre 2004, chambre criminelle, N°03-88.040

Le tribunal n’a pas été sensible à la dette de jeu, excuse peu reluisante pour la corruption dans laquelle l’agent s’était fourvoyé. Et il n’a pas passé l’éponge sur le repas de fin d’année financé par un entrepreneur au bénéfice d’une association animée par le prévenu.

Estimant que le contrat passé avec un fournisseur était particulièrement désavantageux pour sa collectivité, un fonctionnaire décide de contourner les règles de passation des marchés publics et passe un marché à bon de commande au près d’une autre société pour la location "d’un fondoir avec fourgon atelier plus deux agents" pour un prix de 20 000 euros HT.

Ayant ainsi masqué en location de matériel une prestation de service, l’agent est notamment poursuivi pour faux en écriture publique. Il reconnaît les faits mais fait valoir qu’il eut été anormal de payer ces travaux "dix fois plus cher à la société titulaire du marché".

Ce louable souci de bonne gestion de deniers publics ne trouve pas grâce auprès des tribunaux qui condamnent l’agent à une peine d’un an d’emprisonnement avec sursis, 1 000 euros d’amende, 5 ans d’interdiction des droits civiques, civils et de famille, et à l’interdiction définitive d’exercer une fonction publique.

Il faut dire que la promotion de cette nouvelle société concorde avec treize versements d’un montant total de 9 000 euros qui sont venus créditer son compte en banque personnel ! La falsification du bon de commande, qui constitue bien selon la Cour de cassation un document administratif au sens de l’article 441-2 du code pénal, était donc révélatrice d’un pacte de corruption. Et ce n’est pas un prétendu paiement de dettes de jeu qui est de nature à rendre plus crédibles les allégations du prévenu.

Mais l’intérêt de l’arrêt rendu par la Cour d’appel d’Agen le 27 novembre 2003 et confirmé par la Cour de cassation le 22 septembre 2004 se situe moins dans cette désolante affaire de corruption que dans un autre volet de l’affaire : aux charges particulièrement lourdes qui pesaient à l’encontre du fonctionnaire, ont été adjoints des faits plus anodins. En effet, pour financer l’amicale dont il était membre, le prévenu avait sollicité un autre entrepreneur lequel avait accepté de financer le repas de fin d’année pour un peu plus de 750 euros. Bien qu’aucun enrichissement personnel n’ait été constaté en l’espèce, la Cour de cassation approuve les premiers juges d’avoir considéré que cette subvention révélait un acte de corruption répréhensible dès lors que l’entreprise en question travaillait dans le même temps pour le compte de la collectivité.